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Reclassement et volontariat : un sujet d'interrogation

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 08.09.2009 |

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Reclassement et volontariat : un sujet d'interrogation

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L'articulation du volontariat mis en oeuvre dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi avec l'obligation de reclassement interne est de nature à susciter des interrogations.

Un salarié quittant l'entreprise pour construire un nouveau projet professionnel doit-il se voir proposer les offres d'emploi disponibles dans l'entreprise ou le groupe avant son départ ?

Il a été jugé à trois reprises (CA Lyon, 16 février 2006, TGI Nanterre, 12 décembre 2008, CA Versailles, 1er avril 2009) que, si la décision de quitter l'entreprise était librement prise, il ne pouvait être fait grief à l'employeur de ne pas rechercher de mesures de reclassement interne.

Cette analyse empreinte de pragmatisme dans un domaine à haut risque mérite d'être saluée. Cela étant, on peut s'interroger sur la pérennité du raisonnement, qui pourrait ne pas résister face à l'intransigeance des textes.

La règle édictée par l'article L.1233-3 alinéa 2 du Code du travail est claire : « Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail, à l'exclusion de la rupture conventionnelle. »

La force d'attraction du droit du licenciement pour motif économique est telle que la Cour de cassation en a conclu que la priorité de réembauchage (Cass soc 13/09/2005) et la convention de reclassement personnalisée s'appliquaient également aux salariés volontaires dont le départ se formalise par une rupture amiable de leur contrat de travail.

Doit-on, pour autant, faire application de l'ensemble de la réglementation prévue en matière de licenciement pour motif économique ou tenir compte de la spécificité du départ volontaire et, plus particulièrement, de la souplesse du dispositif qui fait aujourd'hui son succès ?

Un parallélisme avec la mise à la retraite n'est pas à exclure à la lumière de la décision rendue par la Cour de cassation le 18 mars 2008. La mise à la retraite comme mode de rupture lié à des raisons économiques ne produit pas les effets d'un licenciement, ce qui n'empêche pas, pour autant, que pour cette catégorie, le plan de sauvegarde de l'emploi se doit de prévoir des mesures spécifiques.

On sait déjà que le départ volontaire ne produit pas tous les effets d'un licenciement et, notamment, ne donne pas droit aux indemnités destinées aux salariés licenciés.

Si la dimension volontaire du départ prévaut, il semblerait dès lors logique que l'employeur n'ait pas à rechercher une solution de reclassement au bénéfice d'un salarié porteur d'un projet professionnel extérieur à l'entreprise.

En revanche, il est parfaitement légitime que le salarié dont le départ permettra d'éviter un licenciement contraint bénéficie en contrepartie de mesures d'accompagnement (à l'exclusion d'un reclassement éventuel) de la part de son employeur pour lui permettre de réussir son nouveau projet professionnel. C'est d'ailleurs le sens de la décision du tribunal de grande instance de Nanterre, confirmée par la cour d'appel de Versailles (décisions précitées).

Toutefois, il convient de conserver à l'esprit qu'en définitive, l'employeur est à l'origine des suppressions d'emploi et que, dans ces conditions, les modalités mises en place pour y parvenir deviennent indifférentes, et que le salarié devrait bénéficier de tous les avantages accordés aux salariés licenciés. En effet, mettre le salarié en situation de se déterminer en toute connaissance de cause en mesurant les avantages et les inconvénients d'un départ volontaire ou d'une offre de reclassement dans l'entreprise satisfait à l'obligation de loyauté à laquelle est tenu l'employeur et à l'esprit des textes gouvernant la matière.

Il semble, néanmoins, d'ores et déjà acquis que les plans mixtes comportant un volet volontariat et un volet de départs contraints en cas d'insuffisance de candidats au départ, devront, en tout état de cause, intégrer un plan de reclassement, car, dans une telle configuration, la décision de quitter volontairement l'entreprise pourra être jugée équivoque.

En l'état, on ne peut donc que préconiser la prudence dans la gestion des départs volontaires.

Gwenaëlle Artur, avocate associée au cabinet Staub & associés, membre d'Avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social.