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Les pratiques

Etats-Unis Le syndicat UAW, actionnaire majoritaire de Chrysler

Les pratiques | publié le : 26.05.2009 |

L'accord passé entre l'Etat, l'UAW Chrysler et Fiat donne au syndicat la majorité des titres du constructeur.

Mine de rien, les syndicalistes de l'UAW (Union Auto Workers) pourraient bientôt devenir les principaux propriétaires du constructeur automobile Chrysler. Et, dans la foulée, ils ont de grandes chances d'accéder au rôle d'actionnaire majeur de General Motors.

La crise profonde de l'industrie automobile américaine a conduit Chrysler sous la protection du chapitre 11 de la banqueroute. Mais, contrairement à ce qui se passe d'habitude, la procédure devrait être rapide. La sortie de la banqueroute est espérée fin août. Et les accords qui ont été conclus, depuis le début de l'année, entre l'envoyé spécial du gouvernement, les représentants de Fiat et Ron Gettelfinger, le président de l'UAW, sont plus que jamais d'actualité.

Sauf retournement de dernière minute, le juge des banqueroutes devrait entériner ce qui a, d'ores et déjà, été douloureusement négocié. L'UAW possédera 55 % des titres de la nouvelle compagnie, car Chrysler a réglé en actions ses dettes auprès de la Veba (Voluntary Employee Beneficiary Association), un fonds de gestion de l'assurance santé des retraités de l'automobile, administré par l'UAW ; les gouvernements américain et canadien, prêteurs de plusieurs milliards de dollars, 10 % des actions ; et Fiat, apporteur de son savoir-faire en matière de petites voitures, 20 %. Le groupe italien pourrait monter à 35 % par la suite. Et c'est son patron, Sergio Marchionne, qui dirigera Chrysler.

Un rapport de force inhabituel

La Veba obtient un siège au conseil d'administration du constructeur. Et son représentant aura voix au chapitre, tout comme les quatre représentants de l'Etat américain et l'élu du gouvernement canadien. « Ce nouveau rapport de force est tout à fait inhabituel pour un syndicat américain », s'exclame David Gregory, expert en droit du travail de l'université St John's de New York. Les Américains n'ont guère l'habitude de la cogestion à l'allemande. Et les cols bleus de Chrysler n'ont pas, comme leurs confrères de Renault, par exemple, fréquenté les conseils d'administration.

La promotion d'un membre de la Veba au rang d'administrateur est due à l'influence du nouveau président démocrate Barack Obama qui, plus que George Bush ou même Bill Clinton, est « sensible au sort des ouvriers de l'automobile », explique Arthur Wheaton, spécialiste des relations du travail à l'université Cornell. Alors que les banques et les hedge funds créditeurs de Chrysler se voient tout juste proposer le remboursement d'un quart de leur investissement en billets verts, sans aucune action, l'UAW apparaît donc comme le vainqueur de ce round de négociations.

Contrat de travail revu à la baisse

« Les syndicalistes n'ont pas perdu autant qu'ils l'auraient pu », corrige Arthur Wheaton. Les 26 800 syndiqués de Chrysler devront, néanmoins, accepter un contrat de travail revu à la baisse. La prise en compte de la hausse du coût de la vie n'est plus automatique, les heures supplémentaires sont plafonnées, l'assurance santé des retraités ne couvre plus le dentaire ni l'optique. Enfin, 3 000 nouvelles suppressions d'emploi sont attendues d'ici à la fin de l'année. « Et leurs titres sont bien plus risqués que de l'argent en liquide », insiste le professeur de Cornell. Sans compter que l'UAW, dans cette négociation avec le gouvernement et Fiat, a dû s'engager à ne pas recourir à la grève d'ici à 2015. « L'administrateur du syndicat ne dira pas quelle voiture construire et où investir, imagine Arthur Wheaton. Mais il devrait faire du lobby pour produire plus aux Etats-Unis et maintenir le financement de la Veba. »

L'accord qui se profile du côté de Chrysler sert déjà de modèle... chez General Motors. Les syndicalistes, toujours en négociations avec leur direction, pourraient accepter un gros paquet d'actions GM. Et faire vivre à leurs assurés - un million de retraités, d'épouses et d'enfants - la grande aventure de l'actionnariat.