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Les pratiques

La moutarde monte au nez des salariés d'Amora

Les pratiques | Retour sur... | publié le : 31.03.2009 |

Le 20 novembre 2008, la direction d'Unilever a annoncé la fermeture de deux sites de production d'Amora-Maille, dont son usine historique de Dijon ; 244 emplois seront supprimés d'ici à la fin de l'année. Seule la CFDT a accepté les propositions de la direction.

La moutarde de Dijon, est-ce bel et bien fini ? La semaine dernière encore, les usines de production de Dijon et d'Appoigny, dans l'Yonne, distantes de 150 kilomètres, étaient totalement fermées et le site logistique de Chevigny-Saint-Sauveur bloqué et occupé par les salariés. La raison : avant la fin de l'année, le groupe Unilever fermera l'usine de sauce et condiments, emblématique de la ville, ainsi que le site d'Appoigny, où sont produits les cornichons d'Amora-Maille.

Des ventes en chute de 20 % en trois ans

Le 20 novembre dernier, la présentation de ce projet plonge dans la désolation les 184 salariés du site historique qui ne fabrique plus de moutarde depuis 2007, mais de la mayonnaise, des sauces et du ketchup, et les 77 employés d'Appoigny. « L'entreprise connaît de réels problèmes de compétitivité. Les ventes d'Amora-Maille ont particulièrement souffert, chutant de près de 20 % en trois ans au profit des marques de distributeurs et des hard-discounters », se justifie Hervé Laureau, président d'Amora-Maille. Pour y remédier, Unilever rassemblera la production des deux usines fermées sur le site de Chevigny (134 salariés), à 10 kilomètres de Dijon.

Réorganisation de l'activité logistique

En parallèle, une partie de l'activité logistique de Chevigny sera transférée vers une nouvelle plateforme implantée par FM Logistic à Fauverney, dans le périmètre du Grand Dijon. « L'organisation logistique aussi doit changer, car, aujourd'hui, les clients d'Amora-Maille et d'Unilever veulent réduire leurs stocks et demandent des livraisons de plus en plus fréquentes. Il devient indispensable de massifier les flux logistiques en regroupant les produits », explique encore Hervé Laureau. Mamadou N'Gningue, délégué syndical central CGT, s'interroge : « Est-ce qu'Unilever regroupe dans le but de vendre ? »

Le 18 mars, le dernier comité central d'entreprise avant la fermeture des deux sites s'est conclu sur un constat de désaccord entre la direction et les représentants des salariés, qui refusaient d'émettre un avis. Après une réunion de la dernière chance, le 23 mars, la CFDT a fait volte-face, le 26 mars, en signant le protocole d'accord sur les mesures financières du plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant au minimum 50 000 euros d'indemnités pour tous, dont 40 000 euros de préjudice. FO, majoritaire, et la CGT ont refusé de parapher un accord qu'ils estiment, comme la grande partie des salariés grévistes, trop éloigné des « 125 000 euros » demandés. L'intersyndicale, qui réclamait à l'origine 400 000 euros d'indemnités par licencié, avait pourtant revu ses exigences à la baisse.

Bernard Deschamps, délégué syndical central CFDT (majoritaire sur le site de Chevigny) se justifie en indiquant que le syndicat « ne veut pas prendre le risque de tout faire perdre aux salariés ». De fait, la direction promettait d'appliquer le PSE, avec ou sans la signature des syndicats sur le protocole d'accord. Dans ce dernier cas, il n'y aurait pas eu d'indemnité de préjudice.

Primes de « très haut niveau »

Le reste du plan social est qualifié de « plus que correct » par la CFDT. La direction a proposé au CCE « 304 emplois » externes et des « primes de très haut niveau » allant jusqu'à « 100 000 euros en fonction de l'ancienneté », pour chacun des 244 salariés dont l'emploi sera supprimé. « J'ai autant, voire plus de solutions que le nombre de postes supprimés », affirme Hervé Laureau.

A Fauverney, FM Logistic devrait créer 250 à 300 postes d'ici à la fin du premier trimestre 2010, dont 150 réservés aux salariés d'Amora-Maille. « Mais avec une convention collective plus défavorable : les salaires seront de l'ordre de 1 074 euros net par mois, contre 1 700 euros chez Amora-Maille », déplore Mamadou N'Gningue. Unilever garantit une compensation de salaire temporaire. Les 35 salariés de la logistique dont les postes seront supprimés à Chevigny sont transférés à Fauverney. A Chevigny, 52 postes d'opérateur sont créés sur les lignes de fabrication. « Mais les départs en retraite prévus sur ce site ne seront pas remplacés. La pénibilité va augmenter dans cette usine qui compte déjà un fort taux de travailleurs handicapés », s'inquiète Mamadou N'Gningue.

Des propositions de poste

La direction table, par ailleurs, sur une trentaine de départs volontaires et des mesures d'âge. « 30 postes nous ont aussi été proposés par des entreprises ; 10 à Appoigny et 20 à Dijon. Huit autres sont disponibles chez un sous-traitant dans le Loiret, où part notre production de produits frais. Enfin, les usines du groupe offrent plus de 30 possibilités de mutation en interne », compte Hervé Laureau.

La direction s'est, par ailleurs, engagée à «réindustrialiser» Appoigny en vue de créer 40 emplois. « Nous avons mandaté un cabinet pour trouver un industriel agroalimentaire offrant des postes qui correspondent au profil des salariés dont l'emploi est supprimé. Nous travaillons avec l'Etat et la région. »