C'est une première sur un site emploi. Depuis début septembre, Auchan propose, sur son site RH Talent.auchan.fr, en plus de ses offres d'emploi, une application un peu particulière nommée «Vidéo Coach». Le principe de ce nouveau service, qui permet aux internautes-candidats de s'entraîner à d'éventuels entretiens de recrutement, est simple : l'internaute, qui a préalablement sélectionné son métier parmi les 14 proposés, répond, en se filmant au moyen de sa webcam, à cinq questions générales ou spécifiques posées par un recruteur-avatar. L'entretien virtuel dure une quinzaine de minutes. Le candidat, qui peut effectuer jusqu'à quatre entretiens virtuels à la suite, s'observe, ainsi, sur l'écran, et peut revoir ses réponses après-coup.

Aucun bilan en ligne n'est réalisé, mais « l'internaute peut télécharger un document pdf donnant les réponses aux questions et des conseils standards », note Emmanuel Fraile, DRH en charge des recrutements d'Auchan France. L'ensemble du processus est totalement anonyme : il n'y a pas d'inscription préalable, « et nous ne conservons aucune donnée des internautes qui s'y essaient », précise le DRH.

Pour proposer ce service gratuit, qui ne nécessite pas de logiciel spécifique, Auchan a travaillé avec la PME marseillaise JobinLive, qui met à disposition des recruteurs, des écoles et des institutions de placement, sa plateforme de vidéo-recrutement. « Jusqu'à présent, nous avons travaillé avec des écoles comme le groupe Edhec ou les Arts et Métiers, précise Franck Dutheil, directeur associé de JobinLive. Notre travail avec une entreprise comme Auchan est une première. » Pour une société qui souhaite implémenter ce service de coaching vidéo sur son site de recrutement, il en coûtera au minimum 8 000 euros par an, paramétrage du site et enregistrement des questions inclus.

Dans le cas d'Auchan, JobinLive a enregistré les questions avec le service RH du groupe. « Nous proposons des entretiens virtuels pour des postes d'hôtesse de caisse, de chef de secteur, de chef de rayon, ou encore de pharmacien et d'opticien : il y a donc des questions générales, ainsi que des questions adaptées par métiers », précise Emmanuel Fraile.

L'objectif d'Auchan ? Créer du «buzz» sans doute, mais surtout « proposer, avec cet accompagnement avant un entretien, un nouveau service aux candidats potentiels », explique le DRH. Il s'agit, également, d'encourager les jeunes diplômés, alors que « 80 des 100 métiers pour lesquels nous proposons des postes sont sans condition d'expérience », précise-t-il.

Quoi qu'il en soit, l'effet de curiosité fonctionne à plein : quand le site emploi, ouvert en 2003, attire en moyenne 55 000 à 70 000 visiteurs uniques par mois, «Vidéo Coach» a reçu 15 000 utilisateurs mensuels depuis son lancement. Pour autant, Auchan demeure prudent : le service est à l'essai pour un an. « Par la suite, nous pourrions imaginer un service de dépôt de CV en ligne. Mais nous préférons attendre pour cela, car c'est encore très peu développé et peu convaincant », remarque le DRH.

Que pensent les recruteurs des CV vidéo, dans lesquels les candidats détaillent oralement leur formation et leur parcours professionnel ? Cette nouvelle manière de «se vendre» commence à avoir la cote auprès des candidats : il leur suffit de se filmer avec une webcam, de remonter éventuellement leur film avec un logiciel ad hoc, puis de le diffuser sur des sites de partage vidéo tels que Youtube ou Dailymotion, ou encore sur des sites communautaires comme Facebook, LinkedIn ou Viadeo. Des prestataires proposent également d'enregistrer l'entretien vidéo, voire de l'héberger en ligne : c'est le cas d'Easy CV, YouJob, ou encore Jobinlive.fr.

Pourtant, d'après un sondage réalisé en août dernier par le site Focus RH avec l'agence de conseil Nao Presse, sur les 371 sondés, quatre professionnels RH sur cinq n'y voient pas un grand intérêt. Un chiffre « qui contrebalance les nombreuses retombées médiatiques dont a bénéficié, au cours des derniers mois, l'apparition des CV vidéo en France », remarque l'étude. De fait, 84 % des recruteurs reconnaissent ne pas avoir visionné de CV vidéo, au cours des six derniers mois. Ils pointent du doigt, pêle-mêle, un risque accru de discrimination, des présentations trop artificielles, et le temps de visionnage trop important par rapport à un CV classique.