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De l'utilité d'établir un procès-verbal de carence

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 04.11.2008 |

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De l'utilité d'établir un procès-verbal de carence

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Lorsque l'institution représentative du personnel n'a pas été mise en place ou renouvelée (par absence de candidature ou de quorum au premier tour et absence de candidature au second tour), un procès-verbal de carence est établi par le chef d'entreprise. Celui-ci l'affiche dans l'entreprise et le transmet dans les quinze jours à l'inspecteur du travail, qui en envoie copie aux organisations syndicales de salariés du département concerné (art. L. 2314-5 et L. 2324-8 du Code du travail).

L'absence de rédaction du procès-verbal de carence peut conduire à la condamnation financière de l'employeur et lui interdire de conclure des accords collectifs.

Par un arrêt en date du 7 décembre 1999, la chambre sociale de la Cour de cassation condamna l'employeur pour ne pas avoir consulté les délégués du personnel avant de s'acquitter de son obligation de reclassement à l'égard du salarié victime d'un accident du travail (art.1226-10). Elle affirma que « l'employeur ne saurait s'y soustraire au motif de l'absence de délégués du personnel dans l'entreprise dès lors que leur mise en place était obligatoire et qu'aucun procès-verbal de carence n'a été établi ».

L'omission du procès-verbal de carence peut s'avérer extrêmement onéreuse puisque la méconnaissance des dispositions de l'article L1226-10 entraîne la réintégration du salarié et, en cas de refus par ce dernier ou par l'employeur, l'octroi d'une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaires (art.1226-15).

La sanction de l'absence du procès-verbal de carence fut, par la suite, légalisée dans le cadre de la procédure de licenciement pour motif économique. L'article L.1235-15, issu de la loi du 17 janvier 2002, dispose que « dans les entreprises employant au moins cinquante salariés où le comité d'entreprise n'a pas été mis en place alors qu'aucun procès-verbal de carence n'a été établi et dans les entreprises employant au moins onze salariés où aucun délégué du personnel n'a été mis en place alors qu'aucun procès-verbal de carence n'a été établi, tout licenciement pour motif économique s'effectuant sans que, de ce fait, les obligations d'information, de réunion et de consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel soient respectées est irrégulier ». Irrégularité sanctionnée par une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

Cette solution est applicable aux licenciements intervenus dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire nonobstant l'intervention du représentant des salariés. Alors même que L. 621-8 dernier alinéa ancien du code de commerce énonçait que, dans le cadre d'une procédure de redressement en l'absence de comité d'entreprise ou de délégué du personnel, le représentant des salariés exerce les fonctions dévolues à ces institutions, la Cour de cassation a estimé « qu'en l'absence de comité d'entreprise ou de délégué, la seule intervention du représentant des salariés dans la procédure de licenciement ne couvre pas l'irrégularité dont la procédure est atteinte du fait du défaut de mise en place de ces institutions sans qu'un procès-verbal de carence ait été établi » (Cour de cassation, chambre sociale, 23 septembre 2008).

Au-delà des conséquences indemnitaires, l'absence de procès-verbal de carence constitue un frein à toute négociation dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux.

En effet, la loi du 20 août 2008 a consacré la possibilité pour les entreprises dépourvues de délégué syndical de pouvoir négocier et conclure avec un salarié mandaté (L.2232-24). Cette négociation avec un simple salarié, ponctuellement mandaté par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche, ne peut intervenir qu'en l'absence de délégué syndical, mais aussi en l'absence de tous représentants élus du personnel dûment constatée par un procès-verbal de carence.

Aussi, face aux multiples risques encourus, l'employeur serait avisé de ne pas omettre de dresser un procès-verbal de carence en cas de défaillance de candidatures ou d'absence de quorum.

Rémi Dupiré, cabinet DaeM Partners, membre d'Avosial, le syndicat des avocats d'entreprise en droit social.