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« La taxation des complémentaires ne sera pas indolore »

Dossier | L'entretien avec | publié le : 14.10.2008 |

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« La taxation des complémentaires ne sera pas indolore »

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E & C : Assiste-t-on à un feu nourri sur la protection sociale complémentaire ?

A. R. : L'expression est un peu forte, mais nous sommes, il est vrai, en présence d'un train de mesures qui pèsent - ou qui pèseront - sur les contrats complémentaires santé. Précisons que ces dispositions sont de nature très diverse. Certaines d'entre elles ne sont d'ailleurs pas encore arrêtées. Nous sommes actuellement dans une situation bancale où nous avons à la fois des certitudes et de fortes préoccupations.

Au rayon des «certitudes», nous trouvons le projet gouvernemental de taxation des organismes complémentaires destiné à réduire le déficit de l'assurance-maladie. Les modalités d'application de cette nouvelle taxe, subtilement dénommée «contribution de solidarité», restent encore à préciser. Autres inconnues : cette taxe sera-t-elle pérenne ? Si oui, son taux sera-t-il figé ? Quoi qu'il en soit, elle devrait rapporter 1 milliard d'euros dès 2009, ce qui représente entre 3 % et 4 % du chiffre d'affaires des complémentaires santé. La contrepartie promise par le gouvernement, qui consiste à associer étroitement les complémentaires à la gestion du risque aux côtés de l'assurance maladie, me semble, à ce stade, assez illusoire.

Le discours des pouvoirs publics consistant à signifier que les complémentaires pourront, grâce à leur bonne santé financière, absorber cette taxe n'a pas de sens. Tôt ou tard, une charge supplémentaire est répercutée sur les assurés. Concrètement, chaque opérateur sera libre de répercuter ou non la taxe. La situation est loin d'être uniforme selon les différentes familles de la protection sociale - assureurs, mutuelles, institutions de prévoyance. Au sein de chacune de ces familles, les opérateurs agiront en fonction des résultats de leurs portefeuilles même, plus précisément, en fonction des résultats de chaque contrat ou catégorie de contrats.

E & C : D'autres projets sont susceptibles de renchérir le coût des régimes collectifs...

A. R. : Il y a effectivement d'autres sujets relatifs à la portabilité des droits en matière de protection sociale ou à la situation des retraités qui ne relèvent pas de la même logique mais qui compliquent le jeu. Par exemple, concernant les retraités, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation s'est récemment prononcée sur le maintien des garanties dans le cadre de l'article 4 de la loi Evin. L'interprétation de cet arrêt fait débat aujourd'hui. Certains estiment que la Cour s'est prononcée pour le maintien, à l'identique, des garanties, alors que, jusqu'à présent, les assureurs complémentaires avaient interprété cet article comme nécessitant la proposition, par l'assureur, de garanties similaires à celles des actifs. La nuance est de taille !

Les entreprises, qui avaient conservé leurs retraités dans leur régime collectif (elles étaient minoritaires puisque, dès l'origine, la majorité des entreprises avaient choisi des contrats d'accueil individuels pour les retraités), ont opéré un basculement en faisant entrer les retraités dans des logiques individuelles assorties de garanties similaires à celles proposées aux actifs. C'est le mouvement de fond que nous constatons depuis quelques années.

Si cette décision judiciaire devait se confirmer, cela deviendrait tout simplement ingérable pour les organismes complémentaires. Comment prendre en compte l'évolution des contrats collectifs ? Quid de la gestion de la diversité des contrats ?

Une des solutions serait de continuer à basculer les retraités dans une logique individuelle et de réfléchir à des modalités de mutualisation, tout en tenant compte de leurs revenus et de leur patrimoine. Cela pourrait prendre la forme d'une aide à la complémentaire pour les plus vulnérables financièrement.

Dans tous les cas, il reste à inventer de nouvelles formes de solidarité pour les retraités dans le domaine de la santé. Tout en sachant que faire payer les plus jeunes actifs pour financer les régimes des retraités ne serait ni juste, ni efficace.