Le cabinet de conseil en stratégie et en organisation Eurogroup a invité un artiste à s'installer dans ses locaux et à exposer les résultats de ses observations.
Une vidéo sur laquelle une voyante lit l'avenir des missions confiées à des consultants dans le marc des cafés qu'ils ont consommés, « parce que, dans le conseil, on recourt à des méthodes compliquées, mais aussi à l'intuition ». Des objets en 3D évoquant un casse-tête chinois : « C'est un métier où l'on réfléchit beaucoup pour résoudre les problèmes des clients. » Des paperboards couverts de schémas et de sigles ésotériques récupérés à l'issue de réunions et qui sont présentés comme des tableaux abstraits.
Invité par Eurogroup à installer son atelier au vingt-deuxième étage de son immeuble de Puteaux, l'artiste Igor Antic a posé un regard ironique sur son commanditaire. Durant le premier semestre 2008, il a été l'électron libre de la société, assistant aux réunions internes, observant les rituels d'entreprise et les échanges pour y puiser son inspiration. Le 20 juin, les consultants d'Eurogroup ont pu découvrir le fruit de ses réflexions à l'occasion d'un vernissage. Ce créateur multimédia, qui s'exprime par la vidéo, la sculpture ou des installations, n'en est pas à son coup d'essai. Intéressé par le monde économique, Igor Antic a déjà fait un séjour à HEC pour s'y confronter à la fabrique des futures élites et au regard que ces dernières portent sur l'art. Influencé par Daniel Buren et ses installations in situ, il a exposé ses oeuvres en France, aux Etats-Unis et au Canada.
Mais quel intérêt Eurogroup a-t-il trouvé à inviter cet artiste ? « Nous voulons inciter nos collaborateurs à élargir leur questionnement au-delà de leur horizon professionnel. Ils doivent aller au-devant de l'inconnu, cultiver le doute et être capables de se connecter avec les autres, puisque notre métier consiste à accompagner les gens dans le changement », argumente Francis Rousseau, président d'Eurogroup.
Il ne s'agit donc pas de mécénat, et la société se défend de tirer un quelconque avantage fiscal de cette résidence d'artiste. Originale, l'initiative s'inscrit dans la culture d'ouverture de ce cabinet qui veut faire émerger sa différence dans le paysage du conseil. Elle s'ajoute à une communication de recrutement audacieuse, à l'organisation de cafés philosophiques ou à l'engagement en faveur de la réinsertion professionnelle de personnes en difficulté. Et que pensent les consultants d'Eurogroup de cette intrusion d'un artiste dans leur quotidien ? « Beaucoup s'intéressent à mon travail, mais certains doivent penser que je suis un imposteur ou que je risque de les déranger », estime Igor Antic. Pour sa part, l'artiste estime que les mondes de l'art et de l'entreprise doivent surmonter leurs clivages car, après tout, « ils ont pour point commun et raison d'être l'innovation ».
Pour l'illustration
Ci-dessous, un lien vers la galerie de photos du vernissage du 20 juin dernier :
