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Stop and go pour l'emploi automobile

L'actualité | publié le : 09.09.2008 |

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Stop and go pour l'emploi automobile

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Plans de départs, fins de mission d'intérim, mais aussi recrutements, annoncés au même moment en début de semaine dernière dans l'automobile : dans un contexte général de réduction des emplois, le secteur poursuit le «stop and go» dans la gestion des effectifs, notamment intérimaires.

Sale temps pour l'automobile hexagonale. En début de semaine dernière, coup sur coup, PSA a annoncé la suppression de 700 postes d'intérimaire à Poissy et d'un millier à Rennes d'ici à la fin de l'année, et Renault a confirmé une réduction d'effectifs annoncée en juillet, en dévoilant un plan de départs volontaires de 3 000 personnes, en plus des 1 000 suppressions d'emploi prévues dans la seule usine de Sandouville. Des chiffres qui pèsent lourd sur la rentrée sociale, au point d'irriter le secrétaire d'Etat à l'Emploi. « Il faut (leur) faire payer leurs responsabilités », alors qu'ils suppriment des emplois en France et délocalisent leur production, a déclaré Laurent Wauquiez, le 2 septembre dernier (lire ci-contre).

Alors que PSA avait déjà réalisé des plans de départs de 5 000 puis de 500 personnes en 2007 et début 2008, ces annonces de rentrée indiquent combien les personnels de la production, en particulier les précaires, constituent une «variable d'ajustement» de plus en plus sollicitée, en fonction des aléas du marché et de la réussite des modèles ou des segments. Ainsi, chez Renault, c'est le début de carrière décevant du modèle Laguna qui menace Sandouville.

Situation contrastée

Quant à PSA, la géographie de l'emploi est contrastée : ce sont Sochaux et Mulhouse qui rient, alors que Poissy et Rennes pleurent. Si la firme au Lion réduit l'intérim à l'Ouest et en Ile-de-France, elle entend recruter 1 000 personnes en CDD sur la même période à Sochaux. Et à Mulhouse, le recrutement de 600 intérimaires est en cours. Les usines de l'est de la France peuvent dire merci à la 308. Le succès de la dernière-née des Peugeot - elle est leader de son segment milieu de gamme en France - y entraîne des recrutements qui vont à l'envers du mouvement général de PSA dans l'Hexagone.

La chose n'est pas allée de soi. L'usine alsacienne, qui produit aussi des C4 et des 206, a conquis de haute lutte, après quatre reports, la constitution, fin juin, d'une équipe de nuit qui lui permet de recruter ces intérimaires. Cela un an après avoir supprimé... une équipe de nuit.

Sa voisine franc-comtoise dédiée à quasi 100 % à la 308, outre les CDD récemment annoncés, avait convaincu le groupe de la nécessité de recruter 400 CDI cette année, en exception à la règle du gel des embauches érigée l'an dernier en dogme par le patron du groupe Christian Streiff. La seule multiplication des heures supplémentaires ne suffisait pas à suivre le rythme intense induit par le lancement de cinq véhicules entre l'automne 2007 et l'année 2009.

Les deux usines pratiquent, ainsi, le «go» après le «stop» qu'a constitué leur contribution aux mesures générales de départs de 2007 et 2008, même si celles-ci concernaient des personnels de structure et non de production.

Marges de flexibilité

Néanmoins, les deux établissements se ménagent des marges de flexibilité au cas où le marché se retournerait. Devant les prévisions moroses au second semestre, Mulhouse a prolongé d'une semaine les congés d'été des équipes de montage, ce qui lui a fait « économiser » 8 000 véhicules. Sochaux, pour sa part, n'a pas encore décidé la création d'une équipe supplémentaire d'un millier de personnes en dépit de son fort plan de charge. Les 1 000 CDD en cours ne la présagent pas, ils remplacent du personnel en formation, voire renforcent des équipes existantes, souligne la direction. A l'exception de la CGT, qui réclame 2 000 embauches fermes, les syndicats adhèrent peu ou prou à cette posture de prudence.

Le volant des fins de mission

Pour les sites qui ne travaillent pas sur la plate-forme 2 (segment des voitures moyennes), la situation est moins favorable. Ainsi, Poissy, qui réduit les effectifs intérimaires, produit la 207 et la 1007. « Il a été décidé de ne pas supprimer d'emplois et de ne jouer que sur des fins de mission d'intérim », indique la direction, assurant que la mesure est transitoire. Ces modèles de segment B fléchissent sur le marché, sans compter que l'usine partage leur production avec celle de Trnava en Slovaquie et celle de Madrid. « Mais la production de 207 réalisée dans ces deux usines européennes va revenir entièrement à Poissy », assure encore la direction, tandis que Trnava assurera le lancement de la C3 Picasso.

A Rennes, spécialisée sur la plateforme 3, celle des plus gros modèles, les intérimaires qui quitteront l'usine dans les mois à venir sont essentiellement ceux qui avaient permis d'assurer le lancement du nouveau modèle Citroën C5, alors que le fléchissement de la Peugeot 407 et les volumes faibles du haut de gamme Citroën C6 ne permettent pas de maintenir l'effectif.

Bonnes pratiques

Quant à la gestion de l'emploi intérimaire, pour laquelle PSA a été autrefois plusieurs fois condamné, la marque veut afficher aujourd'hui de bonnes pratiques, avec une charte de l'intérim et un accompagnement organisé, dans ces situations, avec les missions locales pour l'emploi.

Avec la production en flux tendu, la sensibilité des usines au succès des modèles qu'elles produisent s'ajoute à la logique de mondialisation de la production (lire ci-dessous). Alors que les mobilités intersites sont difficiles à organiser pour ces profils d'opérateur de production, un accord a été conclu chez PSA sur la création d'une unité multisite, composée de 300 personnes - Etam et opérateurs notamment -, qui bénéficiera d'un dispositif de mobilité spécifique pour intervenir sur des lancements dans différents sites français, ainsi qu'à Madrid, Vigo et Trnava notamment.

« Les changements de modèle ou les fins de vie posent toujours problème, constate Bruno Lemerle, délégué CGT de Sochaux et membre du comité de coordination du CE européen. C'est pourquoi nous souhaitons que les sites produisent plusieurs modèles. A une époque, ce n'était pas le cas à Sochaux. Nous avions protesté contre cette situation. » Ainsi, chez PSA, l'existence de deux marques et les lancements décalés lissent sans doute un peu les cahots imposés par les marchés et le zéro stock.

Le souci des syndicats est le même chez Renault. La CGT y dénonce, par exemple, la situation de Flins, qui a arrêté la Twingo, désormais fabriquée en Slovénie, pour ne plus produire que la Clio 3.

Soupçons de délocalisation

Délocalisation ou pas ? Une passe d'armes entre les directions de PSA et de Renault, d'une part, et Laurent Wauquiez d'autre part, a marqué la rentrée sociale. Les deux constructeurs ont, en effet, réagi aux accusations du secrétaire d'Etat à l'Emploi, qui mettait en cause la responsabilité des groupes automobiles en matière d'emploi sur le territoire français, en citant Renault, qui serait coupable de les « transférer dans des pays comme la Roumanie, la Turquie ou la Chine ».

Volontariat

La direction de Renault a rappelé que l'Etat, représenté au conseil d'administration du groupe, connaissait la mesure de réduction d'effectifs depuis juillet, a affirmé qu'elle ne faisait pas de « transferts d'activité » et rappelé que son plan de départs de 3 000 personnes est fondé « uniquement sur le volontariat ». Quant à PSA, le groupe sochalien a prudemment rétorqué qu'il ne se sentait « pas concerné par la remarque » ministérielle.

La politique des groupes français consiste à produire au plus près des marchés en croissance, notamment hors Europe. « Les grands projets en Inde, en Iran, en Roumanie ou au Maroc concernent principalement la fabrication de modèles destinés aux pays émergents », a indiqué une porte-parole de Renault.

La CGT de la marque, qui appelle à une manifestation sur le thème de l'emploi lors du Salon de l'auto à Paris, n'a pas la même analyse. « L'entreprise réduit la voilure en France, mais pas à l'extérieur. Les investissements en 2007 et 2008 ont eu lieu à l'étranger, souligne Fabien Gache, le DSC de cette organisation. La Sandero (second véhicule low-cost du groupe, après la Logan, NDLR) arrive pour l'instant d'Amérique du Sud. Mais elle sera produite ensuite par l'usine du Maroc, qui exportera la majeure partie de sa production. » Et de rappeler que son organisation avait donné son accord pour la production de la Logan chez Dacia en Roumanie. Louis Schweitzer, alors Pdg, assurait, à l'époque, que cette voiture n'avait pas vocation à être commercialisée en France. Quant aux petits véhicules, la Clio 2 et la Twingo, produites auparavant à Flins, elles sont désormais fabriquées en Slovénie.

Logique de mondialisation

PSA affirme aussi que les délocalisations ne sont pas à l'ordre du jour. Néanmoins, les périmètres de son activité sont désormais définis à l'échelle de continents. L'Hexagone fait partie de la plaque Europe, et « il ne faut pas mettre en opposition la France et les autres pays européens », indique la direction de la communication. Ainsi, l'usine slovaque de Trnava fabrique-t-elle des 207 au même titre que Madrid et Poissy, dont la production va être réduite. « Mais chaque site est autonome et spécialisé sur des silhouettes et des options différentes », poursuit ce porte-parole. Pour Bruno Lermerle, de la CGT, il s'agit pourtant d'une logique de mondialisation, dans la mesure où les 107, C1 et Toyota Aygo produites par PSA à Kolin (République tchèque), ainsi que les 207 de Trnava, sont bien réimportées en grande partie. « On parle de marchés en fort développement pour ces installations hors Europe de l'Ouest, explique-t-il. Mais, pour l'instant, ils représentent des volumes de marché très faibles. »

G. L. N.