RTT contre travail, l'opinion oppose volontiers des stéréotypes qui correspondent assez rarement à la réalité. Avant d'être une réforme instituée par le gouvernement socialiste, la réduction du temps de travail a été une initiative de Gilles de Robien, député UDF.

Aujourd'hui, même à gauche, il est souvent de bon ton de ne plus défendre une réforme que les salariés ont pourtant largement plébiscitée. Martine Aubry, dont le nom reste attachée à la réforme, n'en a peut-être même pas été à l'origine. Quant à la forme prise par le texte sur les 35 heures, il est douteux que sa principale instigatrice ait, d'emblée, cru à la possibilité de travailler moins sans perte de salaire. L'histoire est une chose, les mythes en sont une autre. D'ailleurs, l'attitude de Nicolas Sarkozy, selon les besoins, se situe du côté du mythe en exaltant la valeur travail ou du côté de la réalité en reconnaissant qu'une durée plancher doit demeurer, ne serait-ce que pour calculer les heures supplémentaires. Au-delà des besoins de notre pays en main-d'oeuvre et en flexibilité, ce sont les valeurs des uns et des autres qui sont en cause. Alors que certains chefs d'entreprise, soucieux de flexibilité, pouvaient souhaiter l'obtenir dans une logique gagnant-gagnant en échange de davantage de repos pour les salariés, une autre mouvance patronale, aujourd'hui plus bruyante, ne jure que par la peine, l'effort et les larmes pour la condition salariale. Dans cette logique, les enseignants ou les chômeurs ont vite fait d'être qualifiés de paresseux, tandis que les chefs d'entreprise du CAC 40 apparaissent comme les nouveaux sauveurs du pays.

Sophie Dufau, journaliste, met son talent à exposer les enjeux idéologiques dans lesquels se noient sans doute les autres véritables enjeux, pour les travailleurs comme pour les entreprises.

Sophie Dufau est journaliste.