E & C : Vous venez de mener une enquête* sur le contentieux prud'homal chez les cadres. Comment celui-ci évolue-t-il ?

L. W. : Il reste stable, selon l'enquête que j'ai menée avec Benoît Verrier et Ferrucio Ricciardi sur le contentieux des tribunaux de Longjumeau, de Boulogne-Billancourt et de Grenoble. Par exemple, à Grenoble, il y avait, en 2004, 267 affaires nouvelles, et en 2007, 287. Stabilité ne veut pas dire, cependant, pacification des relations. En effet, le nombre d'appels est élevé. Ainsi, à Boulogne, en 2004, sur 569 jugements prononcés, 328 font l'objet d'un recours ; en 2006, 268 sur 544 ; en 2007, 226 sur 529.

E & C : Qu'y a-t-il de significatif dans la relation entre cadres et employeur au regard de l'analyse des plaintes ?

L. W. : Parmi les motifs de rupture, l'insuffisance professionnelle prend une part grandissante. En tout, un quart des cadres dirigeants sont licenciés pour ce motif. Cela révèle un niveau de confiance entre les deux parties très effrité. Enfin, le nombre de désistements en cours d'affaire augmente. A Boulogne, en 2007, 529 jugements ont été prononcés, mais 51 affaires ont été conciliées et 316 ont fait l'objet d'un retrait de rôle, contre 235 en 2002. Nous pensons que les négociations de gré à gré aboutissent plus favorablement aujourd'hui.

E & C : Que révèle l'analyse des résultats des jugements rendus ?

L. W. : 78,5 % des cadres dans la tranche de salaire 3 000/5 000 euros brut obtiennent gain de cause, mais les plus bas et les plus élevés dans la hiérarchie font de moins bons scores. Par ailleurs, les femmes sont plus souvent déboutées. Ainsi, à Boulogne, 67 % des hommes obtiennent totalement gain de cause et 20 % sont déboutés, contre 58 % et 36 % pour les femmes.