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Les pratiques

Allemagne Les grands patrons sous le feu des critiques

Les pratiques | publié le : 11.03.2008 |

Les dirigeants d'entreprise ont-ils une morale ? Depuis la révélation d'un scandale national de fraude fiscale, le débat fait rage outre-Rhin. Et, certaines entreprises revoient les rémunérations des dirigeants.

Perquisition spectaculaire, le 14 février 2008, au bureau et au domicile de Klaus Zumwinkel, Pdg de la Deutsche Post (qui a démissionné le lendemain), soupçonné de fraude fiscale ; près de 1 000 personnalités soupçonnées d'avoir soustrait plusieurs milliards d'euros au fisc par le biais de fondations au Liechtenstein ; 150 procédures judiciaires déjà lancées : l'Allemagne est secouée par le plus grand scandale de fraude fiscale de son histoire. Celui-ci a relancé le débat sur la cupidité présumée des dirigeants d'entreprise, dont certaines rémunérations astronomiques avaient déjà donné lieu à une vive controverse à l'automne dernier.

Dénonciation d'un scandale

A l'unisson, les deux grands partis au pouvoir ont dénoncé un « scandale allant au-delà de l'imagination » (Angela Merkel). Ce sont les élites qui font craquer le « système d'économie sociale de marché », a mis en garde le ministre des Finances, Peer Steinbrück (SPD). Dénonçant le fossé entre « la rhétorique et le comportement » des patrons, le chef du syndicat des services ver.di, Frank Bsirske, a plaidé pour un taux d'imposition de 80 % pour les dirigeants dont le revenu annuel atteint deux millions d'euros. Cette affaire est « dévastatrice pour l'acceptation de notre système économique », a reconnu également Jürgen Thumann, le président de la Fédération patronale de l'industrie (BDI), parlant toutefois de « comportements criminels individuels ».

Apparemment, ce débat commence à porter ses fruits. Réagissant aux très fortes critiques portant sur le niveau de la pension de préretraite perçue par son ancien Pdg, Utz Claassen, le groupe énergétique Energie Baden-Württemberg (EnBW), a corrigé son modèle de rémunération. Si l'actuel Pdg de EnBW, Hans-Peter Villis, quittait son poste avant terme, il ne recevrait plus désormais que le tiers de la pension perçue par Utz Claassen. A son arrivée aux commandes du groupe allemand, en 2003, Utz Claassen, qui, à l'époque, avait 39 ans, avait négocié un contrat lui assurant le versement d'une pension annuelle à vie de 390 000 euros en cas de rupture anticipée de son contrat. Cette enveloppe avait été qualifiée de «démesurée «et d'«éhontée «par les experts en corporate governance.

Des entreprises réagissent

Mais, selon ces derniers, la décision de EnBW est révélatrice d'une nouvelle tendance. « Les conseils de surveillance sont devenus beaucoup plus sensibles aux questions liées à la rémunération des dirigeants », assure Christian Strenger, membre de la commission Cromme, chargée par le gouvernement allemand de fixer les règles de corporate governance. Selon le cabinet-conseil en RH Kienbaum, les entreprises allemandes suivent de près le débat sur les rémunérations des dirigeants et sont en train de réviser leurs systèmes de rémunération. Plusieurs groupes ont déjà réagi. Daimler a, par exemple, supprimé le plan de stock-options qui avait permis à son ex-Pdg Jürgen Schrempp d'encaisser 50 millions d'euros. Siemens a adopté un nouveau règlement intérieur et supprimé des privilèges pour ses anciens dirigeants. D'autres entreprises devraient bientôt leur emboîter le pas.