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Enquête

Le casse-tête de l'invalidité

Enquête | publié le : 11.03.2008 |

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Le casse-tête de l'invalidité

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Dans les pays européens les plus en pointe sur l'emploi des seniors, c'est le système de prise en charge de l'incapacité/invalidité qui a souvent permis les sorties du marché du travail. Plusieurs d'entre eux doivent désormais le réformer, comme les Pays-Bas et la Grande-Bretagne.

Chez les champions de l'emploi des seniors, un mouvement de vases communicants s'est souvent opéré vers des systèmes de prise en charge de l'invalidité ou de l'incapacité. « Ils continuent de servir de soupape, mais se traduisent par des poches d'inactivité de longue durée », constate Henri Sterdyniack, économiste de l'OFCE, dans une enquête pour le Conseil d'orientation des retraites (COR). « Les «bons élèves» ont aussi trouvé une solution de sortie du marché du travail », résumait Martine Durand, directrice adjointe de l'emploi et des affaires sociales de l'OCDE, lors du colloque du COR du 29 novembre dernier. Et ceux-là s'attaquent désormais à la réforme de leur système d'incapacité de travail. C'est le cas des Pays-Bas et de la Grande-Bretagne.

Retour au travail

La Haye a pris le taureau par les cornes, voilà deux ans, pour remettre les Néerlandais au travail. Révision en profondeur du régime de préretraite, de l'incapacité de travail et du système de chômage. La coalition de centre-droit au pouvoir à La Haye a supprimé quasiment tous les avantages fiscaux liés à la préretraite. Et elle s'est attaquée au régime d'allocations chômage, réduisant la période maximale de versement des indemnités de cinq ans à trois ans et deux mois. Parmi les mesures les plus impopulaires figurait aussi la remise en cause de la généreuse loi sur l'incapacité de travail, en vigueur depuis 1967. Longtemps utilisé comme une voie de garage par les entreprises pour éviter de licencier leurs salariés, notamment les seniors, ce système a connu des dérives au cours des années. D'autant qu'il suffisait d'avoir une incapacité de travail de 15 % pour prétendre aux allocations. Les rangs des bénéficiaires ont grossi, au point de frôler le million d'«incapables» en 2001. L'Etat est allé jusqu'à dépenser 12,7 milliards d'euros par an en allocations d'invalidité. Aujourd'hui, le système a été revu de fond en comble, au point que les allocations ne sont plus versées qu'aux personnes présentant une incapacité totale ou permanente de travail. Des centaines de milliers d'actifs ont donc été remis sur le marché du travail.

Mesures d'accompagnement

Sur le terrain, les entreprises ont bénéficié de mesures d'accompagnement pour absorber ce flot de «nouveaux» travailleurs, dont une réduction des cotisations sociales pour leurs employés seniors. Afin de fluidifier le marché du travail, une mesure plus coercitive les a aussi obligés à proposer des emplois à temps partiel aux salariés qui le désirent. Entre 1996 et mi-2007, la participation des Néerlandais entre 55 et 64 ans à la vie active a été multipliée par deux, avec un retour marqué des femmes. Deux fois plus de femmes de cet âge sont aujourd'hui employées, soit 45 % d'entre elles. En revanche, le taux d'emploi des hommes est resté stable, à 77 %. Par ailleurs, le taux de chômage n'a pas explosé. Au contraire. Il est tombé à 4,5 % de la population active l'année dernière, en constante amélioration par rapport à 2006 (5,5 %) et 2005 (6,5 %).

L'Angleterre fait la chasse aux allocations

Le gouvernement britannique serre aussi les boulons. Dans un contexte de diminution de moitié du nombre de chômeurs, celui des titulaires d'allocations a explosé durant la dernière décennie pour atteindre aujourd'hui 2,64 millions de personnes. Et plus de la moitié de ces allocataires sont restés inactifs pendant plus de 5 ans, comparé à 998 000 en 2001. Au total, près de 12,5 Mds de livres (16,5 Mds d'euros) ont été versés l'année dernière à des personnes incapables d'accomplir la moindre tâche professionnelle.

Adopter une démarche plus positive

Afin de réduire d'au moins 20 000 le nombre de titulaires aux indemnités d'incapacité, le gouvernement britannique renforce le niveau des tests, à compter du mois d'octobre prochain. Sous le nom de Work Capability Assessment, ces examens devraient permettre d'augmenter le nombre de dossiers de demande, rejetés de 40 % à 50 %. Dans les faits, il s'agira d'adopter une démarche beaucoup plus positive : au lieu de pointer du doigt les déficiences à la fois mentales et physiques d'un individu, le test permettra de discerner ses compétences, comme, par exemple, l'utilisation d'un ordinateur pour une personne qui ne parvient pas à se déplacer correctement.

Des certificats de maladie revisités

Dans le même esprit, le secrétaire d'Etat à la Santé Alan Johnson a demandé, en début d'année, aux médecins généralistes de transformer les certificats de maladie ou «sicknotes», délivrés dès les premiers jours d'absence, en «well notes» (littéralement, certificats de bien-être). Les ministres pensent, en effet, que des milliers de personnes souffrant de problèmes de dos ou de santé mentale sont orientées à tort vers des régimes d'incapacité de longue durée (Incapacity Benefit System), accessibles à compter de 26 semaines d'absence du lieu de travail.

Ces nouveaux certificats devraient ainsi permettre de discerner les tâches susceptibles d'être réalisées par le malade. Pour soutenir cette initiative, le gouvernement britannique a d'ores et déjà annoncé qu'il libérait des crédits supplémentaires pour tripler le nombre de consultants dans les centres médicaux, parallèlement à l'introduction - à titre d'essai - d'un service de soutien et de conseils à destination des petites entreprises. Objectif de ce programme : permettre de mieux déceler le stress et les problèmes de santé mentale, qui représentent une perte de 175 millions de journées ouvrées par an, selon le CIPD. Près de 40 % des titulaires d'indemnités d'incapacité souffriraient actuellement, outre-Manche, de problèmes psychologiques.