Le cabinet de recrutement et de conseil RH Alain Gavand a entamé une démarche de lutte contre les discriminations fin 2005, avec l'expérimentation du CV anonyme. Un logiciel ôtait tous les paramètres susceptibles d'être discriminatoires : prénom, nom, adresse, situation familiale, e-mail, âge, sexe, activités extraprofessionnelles. Afin de ne pas désavantager les seniors, le cabinet allait jusqu'à transformer les expériences en durée (suppression des dates) en ne conservant que les six dernières.

Après quelques mois, il a cependant été décidé de stopper l'expérimentation en raison des difficultés techniques (relatives à l'usage du logiciel), organisationnelles (nécessité de passer par l'intermédiaire d'un assistant pour l'anonymisation) et managériales (certains consultants percevaient l'expérimentation comme un manque de confiance dans leur travail). Surtout, les efforts engagés par ailleurs et la mobilisation des équipes laissaient espérer que le processus de sélection du cabinet était neutre. « L'expérimentation s'est avérée néanmoins positive par son caractère pédagogique », commente Alain Gavand, fondateur du cabinet et de l'association «A compétence égale», auteur d'ouvrages sur les discriminations à l'embauche.

Le CV anonyme a, en effet, préparé les consultants à l'étape suivante, qui a pris la forme d'un audit, demandé, en 2007, à l'Observatoire des discriminations, un centre de recherche associé à la Sorbonne. « Les cabinets nous sollicitent davantage, nous avons déjà effectué quatre audits dans ce secteur », calcule le sociologue Jean-François Amadieu, directeur de l'Observatoire, qui a examiné 7 000 candidatures reçues, en 2005 et 2006, par Alain Gavand. En l'espèce, l'audit, qui mesurait l'influence du prénom sur les chances des candidats d'être reçus et présentés au client, n'a révélé aucune inégalité de traitement.

La même année, le cabinet a constitué un dossier pour obtenir le Label égalité, finalement décroché en octobre 2007. Pour ce faire, il a procédé à un audit des rémunérations et mis en place un plan d'action visant à s'assurer que la culture de l'entreprise, le management et les processus respectaient les exigences du label. Cette politique d'égalité entre hommes et femmes devrait constituer « un facteur d'attractivité dans le cadre de notre politique de recrutement interne alors que nous bénéficions d'une forte croissance », indique Alain Gavand.

Même si elle prend du temps aux consultants en interne, dans la phase initiale, cette politique se révèle très payante, tant sur le plan commercial que sur celui du sourcing. « Nous communiquons sur notre engagement pour attirer davantage de candidats reflétant la diversité, mais aussi vers les entreprises. Ce qui a contribué à nous faire gagner des clients, eux-mêmes motivés par cet enjeu », reconnaît Alain Gavand. Ainsi, l'obtention du Label égalité a permis au cabinet de renforcer sa crédibilité auprès des entreprises qui envisagent de « renforcer la mixité dans certaines fonctions ».