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De nouveaux partenaires pour les conseils généraux

Les Pratiques | Point fort | publié le : 24.04.2007 | Marie-Pierre Vega

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De nouveaux partenaires pour les conseils généraux

Crédit photo Marie-Pierre Vega

En 2004, l'Etat a transféré aux conseils généraux la responsabilité du RMI. Les départements pilotent désormais les deux volets de ce dispositif : allocation et insertion. Pour faire baisser la facture et remettre au travail au moins une partie des bénéficiaires, les collectivités concoctent des solutions qui font largement appel au secteur privé.

Dix-sept ans après sa création, le RMI bénéficie à 1,1 million de personnes. Depuis le début de la décennie, sous l'effet de la mauvaise conjoncture économique et du durcissement des conditions d'accès au régime d'assurance chômage, le nombre d'allocataires n'a cessé de progresser. Il augmente de 4 % à 5 % par an.

5,5 milliards d'euros

La somme qui leur est versée avoisine les 5,5 milliards d'euros, sans compter les aides connexes qui, accordées par l'Etat et les collectivités, gonflent considérablement l'enveloppe. Au premier rang des bailleurs de fonds : les départements, qui ont récupéré, en 2004, l'entière responsabilité du RMI. Depuis, ils partagent un objectif identique : diminuer le nombre d'allocataires.

Signatures de convention avec l'ANPE

Tous se sont attelés à multiplier les contrôles, mais aussi à inventer de nouvelles voies pour remettre les RMistes sur le chemin de l'emploi. Une grande majorité de conseils généraux ont signé une convention avec l'ANPE pour lui confier l'accompagnement vers l'emploi de ces bénéficiaires. Les modalités d'application varient d'un département à l'autre. « Des équipes ANPE sont rémunérées et/ou logées dans les locaux des conseils généraux pour s'occuper des RMistes pouvant être assimilés à n'importe quels demandeurs d'emploi. Le partenariat est parfois plus appuyé, avec la désignation de délégués insertion pour les RMistes plus éloignés de l'emploi », indique Christophe Sirugue, président de la commission insertion et RMI de l'Assemblée des départements de France et du conseil général de Saône-et-Loire.

Appel aux méthodes du privé

Plus innovants, d'autres départements ont choisi de faire appel aux méthodes du privé. Ils misent sur un accompagnement personnalisé par des cabinets de reclassement ou des sociétés de travail temporaire. « Une autre tendance émerge, ce sont des conventions passées avec des chambres de commerce ou des branches professionnelles, notamment dans le BTP et la restauration, constate Christophe Sirugue. Ces dispositifs commencent à porter leurs fruits, même si l'augmentation du nombre d'allocataires a tendance à occulter ces résultats positifs. »

L'essentiel

1 Lors de la décentralisation en 2004, les conseils généraux ont récupéré l'entière responsabilité du RMI.

2 Pour diminuer le nombre d'allocataires, ils multiplient les opérations de retour à l'emploi, calibrées pour être adaptées aux différents profils de bénéficiaires.

3 Ils explorent de nouveaux partenariats, avec des sociétés privées, des groupes d'intérim, des CCI ou des branches professionnelles.

Les Bouches-du-Rhône s'appuient sur la CCI Marseille-Provence

On n'attend pas une chambre de commerce et d'industrie sur ce sujet. « Pourquoi pas ? », rétorque Christian Perrier, directeur délégué à l'emploi de la CCI Marseille-Provence. Depuis longtemps, la CCI a une direction de l'emploi et de l'insertion qui mène des actions d'alternance, monte des formations à la demande des entreprises, réalise des diagnostics RH, des bilans de compétences ou encore d'orientation. Et puis, la CCI connaît les besoins en recrutement des entreprises. » Précisément, les 63 000 entreprises adhérentes à la CCI intéressent beaucoup Fabrice Kehayan, le directeur de l'insertion du conseil général des Bouches-du-Rhône qui a la charge de 65 000 RMistes. « Nous ne les connaissons pas. Or il est essentiel de mobiliser les entreprises et les convaincre qu'un RMiste a des compétences et peut occuper un emploi. »

19 accompagnateurs

La CCI a recruté 19 accompagnateurs pour définir avec les candidats leur projet professionnel, leur enseigner les techniques de recherche d'emploi et les mettre en relation avec les entreprises prospectées par une autre équipe de quatre personnes. Près d'un millier d'offres d'emploi ont ainsi émergé pendant l'opération, de janvier 2006 à avril 2007.

Sur les 949 personnes qui ont intégré le dispositif, 570 ont signé un contrat de travail, soit un taux de placement de 60 %. La moitié sont des CDI, les autres contrats sont d'une durée supérieure à six mois, dont des CIE (contrat initiative emploi) et des contrats de professionnalisation. Fabrice Kehayan juge ce bilan positif. « L'action a atteint son objectif, mais elle a aussi provoqué une évolution culturelle, chez les acteurs institutionnels du RMI qui se sont confrontés au monde économique, et les entreprises qui ont changé leur regard sur les RMistes. Nous allons certainement poursuivre l'expérience. Nous préparons aussi des partenariats avec des branches professionnelles et avec la chambre des métiers. » M.-P. V.

La maisie de Paris mise sur l'intérim

AParis, 60 000 personnes perçoivent le RMI. Profitant de la loi Borloo qui donne aux groupes d'intérim le droit de proposer des CDI et des CDD, la mairie a décidé de confier 200 allocataires à Adecco pour une durée d'un an. Adressés par des assistantes sociales, des associations d'insertion, ou des conseillers ANPE, ce sont, a priori, « des personnes se déclarant prêtes à travailler et ne présentant pas trop de freins à la mise à l'emploi, indique Marie-Noëlle Tavaud, responsable interrégionale des services de l'emploi d'Adecco. Dans les faits, 61 % des personnes que nous avons suivies étaient au RMI depuis au moins deux ans et 18 % depuis plus de cinq ans. L'objectif, lui, était de 60 % de mise à l'emploi. » Les résultats sont en deçà. Sur les 171 personnes qui sont allées au bout, 30 % sont en CDI et 17 % en CDD de plus de six mois. S'y ajoutent 14 % de CDD de trois à six mois et 10 % de personnes en contrats aidés ou en formation qualifiante. « Mais, pour certains, l'accompagnement n'a duré que quelques mois car ils ont adhéré dans le courant de l'année 2006, plaide Marie-Noëlle Tavaud. En outre, 87 % des candidats ont bénéficié, à un moment ou un autre, d'un contrat de travail en intérim court pour reprendre confiance et valider le projet professionnel. »

Adecco se dit prêt à rempiler sur ce type de marché, « mais pas à ces conditions financières. Nous avons perçu 1 375 euros par bénéficiaire accompagné et mis à l'emploi. Ce n'est pas le prix d'une telle prestation. Il faut aussi allonger la durée d'accompagnement. » M.-P. V.

L'Hérault crée le CI-RMA + avec une équipe détachée de l'ANPE

Le conseil général de l'Hérault, qui recense 37 000 RMistes, a décidé de continuer à financer seul une équipe de 25 agents de l'ANPE. Il leur demande notamment de mettre en oeuvre le CI-RMA (contrat d'insertion-revenu minimum d'activité), dont il a modifié les règles, « pour en faire un contrat de travail qui donne une vraie perspective de pérennisation dans l'emploi », explique Laurent David, chef du service emploi. Il a été rebaptisé CI-RMA +. L'aide versée à l'employeur est limitée à douze mois, au lieu de dix-huit. Pour l'obtenir, celui-ci doit proposer un contrat de travail d'une durée hebdomadaire de 30 heures, au lieu de 20 heures. « Dans ces conditions, l'écart de revenus entre le salaire et l'allocation devient suffisant pour inciter à reprendre un emploi », souligne Laurent David.

Engagement moral

Autre condition : l'employeur doit prendre l'engagement moral de pérenniser le salarié dans son poste. « Certes, ce n'est pas un engagement écrit, mais le chef d'entreprise donne sa parole. Pour le RMiste qui sort d'une situation d'exclusion, c'est une incitation plus forte qu'une reprise pour une courte durée », estime Laurent David. Pendant toute la durée du contrat, le candidat est accompagné par des structures associatives ou privées. « Il s'agit d'une véritable offre de service à l'entreprise qui lui garantit la réussite de son recrutement », souligne Laurent David.

A ce jour, 1 100 contrats ont été conclus ; 65 % des signataires ont plus d'un an d'ancienneté dans le RMI et 20 % plus de cinq ans. Un cinquième des contrats ont été rompus avant le terme de la période d'essai. Mais plus de 84 % des contrats arrivés à terme ont été transformés en CDI. M.-P. V.

Un cabinet privé étranger dans les Hauts-de-Seine

«L'ANPE obtient des résultats, mais pas assez vite. » C'est ainsi que Louis-Charles Bary, vice-président chargé de l'emploi au conseil général des Hauts-de-Seine, explique l'appel d'offres lancé pour Energies 92, un programme personnalisé d'aide à l'accès à l'emploi pour les RMistes de plus de deux ans. Ils sont 14 000 dans ce cas, soit la moitié des RMistes du département. Le marché a été remporté par Ingeus. Ce cabinet australien, spécialisé dans les solutions de réadaptation professionnelle et de retour à l'emploi, a été l'un des premiers à participer aux expérimentations lancées par l'Unedic et l'ANPE.

Dans les Hauts-de-Seine, il n'y a aucune présélection des bénéficiaires. A Ingeus de contacter, un par un, les 14 000 RMistes visés par l'opération qui a démarré en janvier 2006. A ce jour, le cabinet a passé 40 000 appels téléphoniques et adressé 35 000 courriers personnalisés. Objectif fixé par la collectivité : signer 6 000 chartes d'accompagnement pour aboutir à 900 retours à l'emploi en trois ans, dans des contrats de travail de droit commun de 30 heures hebdomadaires minimum. « C'est effectivement beaucoup plus compliqué que si les candidats nous avaient été adressés par les structures qui les accompagnent. Mais de cette manière, nous touchons aussi ceux qui ne sont suivis par personne », explique Jean-Louis Tauzin, directeur France d'Ingeus.

30 % en CDI

2 300 personnes adhèrent au dispositif, dont 523 ont actuellement un CDI (30 %), un CDD de plus de trois mois (31 %), un contrat d'intérim (11 %) et ou un contrat aidé (28 %). Ingeus perçoit un forfait lié à la durée du maintien dans l'emploi, avec un maximum de 3 700 euros pour un an dans le poste. Jean-Louis Tauzin est plutôt satisfait des premiers résultats : « Des RMistes depuis 15 ou 17 ans ont retrouvé un CDI. L'avenir est plus incertain pour d'autres, pour lesquels honorer un rendez-vous chez Ingeus une fois par semaine représente un effort colossal. Le fait qu'ils s'y rendent est déjà un résultat positif. » M.-P. V.

Auteur

  • Marie-Pierre Vega