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Les Pratiques

Le CDI, un marché prometteur

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 03.04.2007 | Anne Bariet avec M.-P. V.

En élargissant leur champ d'action, les entreprises de travail temporaire ont effectué, en deux ans, une belle percée dans le recrutement, en ciblant, d'abord, des fonctions non cadres et des PME. Un marché jusqu'ici délaissé par les cabinets de recrutement. Mais où s'arrêteront-elles ?

Deux ans après la loi de cohésion sociale, qui a mis fin au monopole - théorique - de l'ANPE, les entreprises de travail temporaire ont réussi leur entrée sur le marché du recrutement en CDI. Elles ont assuré 26 500 embauches en 2006, soit trois fois plus qu'en 2005, selon le Prisme (Professionnels de l'intérim, services et métiers de l'emploi), qui présentait ses résultats le 20 mars dernier. La marge de progression est aussi importante en termes de chiffre d'affaires. De 65 millions d'euros, aujourd'hui, cette activité « pourrait passer à près de 85 millions d'euros d'honoraires, voire plus en 2007 », indique Gilles Lafon, président du Prisme.

Majors de l'intérim

Autant dire que les entreprises du secteur se frottent les mains. Et, en particulier, les majors de l'intérim, qui ont été les premières à se positionner sur ce marché. Adecco, par exemple, annonce un chiffre d'affaires de 24 millions d'euros sur l'activité placement en 2006, soit trois fois plus qu'en 2005, pour 10 000 recrutements effectués. VediorBis affiche 14 millions d'euros (5 000 recrutements) ; Manpower 12 millions d'euros (6 000 recrutements). Pour ces trois enseignes, le marché est prometteur puisque leurs résultats pourraient doubler en 2007.

Le tertiaire recrute

Par secteur d'activité, le tertiaire a représenté 61 % des recrutements en 2006, dont 44 % dans les services. Ainsi, chez Adecco, plus de la moitié des recrutements ont été réalisés pour les métiers du tertiaire, assistants, comptables, mais aussi fonctions supports comme contrôleurs de gestion ou acheteurs. A l'inverse, l'industrie et le BTP, qui représentent respectivement 50 % et 20 % de l'activité intérim, sont sous-représentés dans le placement (25 % et 10 %). Mais le recrutement va se développer également dans les secteurs rencontrant des pénuries de main-d'oeuvre, comme le BTP ou les transports.

Dans 70 % des cas, ces recrutements portaient sur des postes en CDI ; dans 27 %, sur des CDD ; et dans 3 %, sur des CNE. « Environ une personne recrutée sur deux avait été intérimaire auparavant », poursuit Gilles Lafon. Qui est recruté ? Par catégories socioprofessionnelles, les ouvriers qualifiés ont représenté 34 % des recrutements, suivis par les employés (23 %), les techniciens (22 %) et les cadres (17 %).

En 2005, la majorité de ces contrats ont été signés par des grandes entreprises. Mais, en 2006, la demande des PME a été bien plus importante : 56 % des embauches ont été réalisées par des entreprises de moins de 50 salariés, contre 41 % en 2005.

Marché des PME

« Nous avons créé un marché qui n'existait pas, celui des petites et moyennes structures », souligne Jean-François Ferret, président de Manpower. Même écho du côté d'Adecco. « C'est un marché à forte valeur ajoutée, qui va fortement progresser dans les trois à quatre prochaines années, indique Christophe Catoir, directeur placement d'Adecco. Il va se développer fortement auprès des PME, qui sont très démunies en matière de gestion des ressources humaines. Nous leur apportons un service clés en main, souple et fluide, la réactivité et la proximité de 1 500 agences sur tout le territoire. » Les placements dans les PME ont généré, en 2006, 60 % du total du chiffre d'affaires placement d'Adecco.

Mais les entreprises de travail temporaire doivent aussi s'adapter : « Faute de service RH, ces structures connaissent moins bien le marché du recrutement, elles recherchent souvent le mouton à cinq pattes, assure Edith Martin Genet, directrice de division work solutions chez Ranstad. Leurs exigences sont souvent surdimensionnées par rapport aux profils de poste recherchés. A nous d'évaluer le meilleur candidat au plus près des besoins. »

Concurrence accrue

Mais le travail temporaire ne compte pas cantonner son activité à ce seul marché. « L'entrée en force des groupes d'intérim aura certainement un impact, à terme, sur les cabinets de recrutement classiques », poursuit Christophe Catoir. D'ailleurs, la plupart des sociétés de travail temporaire n'ont pas hésité à créer des structures ad hoc pour ce segment de marché. C'est ainsi que VediorBis a lancé Vedior Search, et que Randstad a ouvert, de son côté, Randstad Search & Selection pour les cadres spécialisés en banque-finance. Quant à Adecco, il a créé dix cabinets de recrutement pour le placement de «profils précis de plus haut niveau», dans l'informatique, l'ingénierie, la finance, et pour des postes de commerciaux. La centaine de consultants employés dans ces cabinets ont, pour la plupart, été recrutés en externe et exerçaient l'un de ces métiers auparavant. Une concurrence qui risque d'être douloureuse pour les cabinets de recrutement.

Vers le portage salarial ?

Après le recrutement, les entreprises de travail temporaire pourraient-elles s'attaquer au portage salarial ? C'est possible.

Pour François Roux, délégué général du Prisme, l'intérim pourrait, ainsi, garantir « un statut social sécurisé », sans crainte « du délit de marchandage ». Un message, en tout cas, que le syndicat souhaite faire passer au ministère du Travail, actuellement en pleine réflexion sur le sujet.

Une pratique qui, selon le Prisme, existe déjà en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas.

Auteur

  • Anne Bariet avec M.-P. V.