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Enquête

une voie vers La flexsecurite

Enquête | publié le : 27.03.2007 | Sandrine Franchet

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une voie vers La flexsecurite

Crédit photo Sandrine Franchet

Les groupements d'employeurs apportent une réponse efficace au besoin de concilier flexibilité des entreprises et sécurité des salariés. Tout juste regroupés au sein de l'Union des groupements d'employeurs de France, les acteurs du secteur s'efforcent de lever les freins au développement de la formule.

Le 26 février dernier, devant le Conseil économique et social, Dominique de Villepin plaidait pour l'instauration d'une « véritable flexsécurité à la française », grâce à trois réformes : celle du droit du travail et du contrat de travail, celle de la formation professionnelle et celle du service public de l'emploi. « Des solutions existent déjà, sous nos yeux, pour allier les impératifs de compétitivité des entreprises et le besoin de sécurité des salariés », affirme pourtant Franck Delalande, président du CJD (Centre des jeunes dirigeants) Bretagne et directeur du groupement d'employeurs multisectoriel vannais Vénétis, en introduction de son récent ouvrage Groupements d'employeurs : mode d'emploi (1).

L'une de ces solutions réside dans les groupements d'employeurs (GE). Ces associations d'employeurs, qui existent depuis 1985 (lire l'encadré p. 27), permettent, en parallèle, à leurs adhérents de bénéficier de salariés à temps partiel, ponctuels ou saisonniers «fidélisés», et à leurs salariés de signer un contrat à durée indéterminée à temps plein. Comment ? En «maillant» les emplois, c'est-à-dire en les enchaînant les uns aux autres, soit dans une même semaine (exemple : un DRH occupé deux jours dans une entreprise et trois jours dans une autre), soit sur une année.

Gagnant-gagnant

Les avantages de la formule sont multiples. Pour les employeurs, elle permet de s'attacher, notamment, les compétences de professionnels de haut niveau qu'elles n'auraient pas les moyens d'embaucher à temps plein, de bénéficier de salariés fidélisés, qui connaissent les entreprises pour lesquelles ils interviennent et les missions qui leur sont confiées, et donc de gagner du temps en recrutement et en formation de leurs collaborateurs à temps partiel ou saisonniers. Et même si le recours à un GE demeure plus coûteux que l'embauche en direct, il est de 10 % à 30 % moins cher que l'intérim.

Emploi stable

Quant aux salariés, ils bénéficient avant tout d'un emploi stable, à temps plein, avec un seul bulletin de salaire, tout en conservant une variété de missions. Franck Delalande évoque, de son côté, un «carré magique», ajoutant deux autres «gagnants» : les territoires, sur lesquels les GE permettent de retenir, voire d'attirer, les compétences et les emplois, et les groupements eux-mêmes.

Malgré tout, le groupement d'employeurs demeure un phénomène marginal et encore largement méconnu : « Les groupements agricoles, très nombreux mais souvent de petite taille, totalisent environ 15 000 salariés ; les Geiq (groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification) emploient autour de 4 000 personnes ; quant aux groupements d'employeurs dans l'industrie et les services, ils comptent 11 000 salariés. Soit un total de 30 000 personnes concernées », précise Hervé Sérieyx, président de l'Union des groupements d'employeurs de France.

Employeurs réticents

Même si ces deux dernières années semblent marquées par un regain d'intérêt pour la formule (lire l'entretien p. 31), de nombreux obstacles freinent le développement des GE. Ces freins sont principalement d'ordre culturel : réticence des employeurs à partager «leurs» salariés, préférence pour la rapidité et la flexibilité totale offerte par l'intérim et le CDD, mauvaise image du temps partiel, tant pour les employeurs que pour les salariés, réticence des salariés à ne pas s'inscrire dans le modèle, jusqu'ici dominant, du CDI à temps plein dans une seule entreprise, ou encore difficultés des partenaires sociaux, organisés par branches, à se saisir de cet outil multisectoriel.

Obstacles législatifs

Mais les obstacles sont aussi politiques (absence de prise de position affirmée des décideurs politiques en faveur du dispositif) et législatifs (barrière de l'accord collectif pour les entreprises de plus de 300 salariés souhaitant adhérer à un groupement).

Pour Thierry Chevallereau, délégué régional du centre de ressources pour les groupements d'employeurs (CRGE) du Poitou-Charentes, les groupements eux-mêmes doivent prendre leur part de responsabilité : « Chaque directeur de groupement doit se demander comment il peut se saisir des réseaux existants pour faire la promotion de l'outil, car cela n'est pas beaucoup fait. »

Plan commercial

Outre la communication, Michel Desurmont, directeur général du groupement Alliance emploi, dans le Nord-Pas-de-Calais, plaide pour la mise en oeuvre d'un véritable plan d'action commerciale (lire p. 30).

Par ailleurs, pour mieux peser dans le débat, tant local que national, les acteurs des groupements d'employeurs ont décidé de mieux s'organiser, pour devenir des interlocuteurs plus aisément identifiables. Dans les régions, les centres de ressources se multiplient (lire p. 28). Tandis qu'au niveau national, la Fédération française des groupements d'employeurs, devenue, début mars, l'Union des groupements d'employeurs de France (Ugef), envisage de négocier un accord conventionnel sur des garanties minimales s'appliquant à leurs salariés.

(1) Groupements d'employeurs : mode d'emploi, de Franck Delalande et Lionel Buannic, coll. Ressources humaines, éditions d'Organisation, décembre 2006.

L'essentiel

1 Depuis le milieu des années 1990, les groupements d'employeurs permettent de concilier sécurité pour leurs salariés - embauchés en CDI à temps plein - et flexibilité pour leurs adhérents.

2 Malgré les succès de la formule, celle-ci reste encore largement confidentielle, avec seulement 30 000 salariés concernés.

3 Tant au niveau local que national, les groupements travaillent ensemble pour lever les obstacles culturels, légaux et politiques au développement du dispositif.

Auteur

  • Sandrine Franchet