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Les Pratiques

Nouveau départ pour la Verrerie du Languedoc

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 20.02.2007 | Solange de Fréminville

Menacée de fermeture, l'usine gardoise qui fabrique les bouteilles de Perrier a été finalement vendue, en décembre 2006, par Nestlé Waters à La Financière de la Croix Blanche. Le nouveau projet industriel est ambitieux : modernisation, diversification et amélioration des qualifications.

Le 22 décembre 2006, le groupe Nestlé Waters cède la Verrerie du Languedoc (Gard), qui fabrique les bouteilles en verre de Perrier, à La Financière de la Croix Blanche, holding dirigé par Michel Roquette. C'est l'aboutissement de longues négociations. Jusqu'au dernier moment, des salariés ont manifesté leur réticence à signer l'avenant à leur contrat de travail, exigé par le transfert dans la nouvelle structure. Les conditions de la reprise sont, en effet, draconiennes : près de 300 emplois supprimés et, pour les 174 salariés qui restent en poste, des baisses de salaires de 16 % à 18 % en moyenne, la suppression du 13e mois et de la prime de vacances, la diminution des autres primes (nuisance, salissure, transport) aux taux de la convention collective du verre, la disparition des jours de récupération.

« Il y avait des menaces de fermeture, souligne Michel Englan, secrétaire de la CGT. On aurait pu aller vers 470 départs. » « Cela a été déterminant dans les décisions des salariés », observe Jacques Colomines, directeur adjoint à la DDTEFP du Gard. Acculés, les syndicats ont fait bloc. « Une fois la vente décidée, au printemps 2006, il fallait négocier au mieux. Notre devise : personne au bord du chemin », rappelle le secrétaire de la CGT, syndicat majoritaire à la Verrerie du Languedoc. L'objectif est tenu : aucun licenciement n'est prononcé.

Le protocole, approuvé par 80 % des salariés et signé le 24 juillet 2006 par l'ensemble des syndicats (CGT, CFDT, CFTC, FO, CGC), prévoit la cessation anticipée d'activité pour les 50 ans et plus, avec 75 % de la rémunération annuelle pour les 50-54 ans et 80 % à partir de 55 ans. Un dispositif entièrement financé par Nestlé Waters. Il concerne la grande majorité des 294 postes supprimés. Seconde mesure : 34 reclassements internes, sur place, à la Source Perrier.

Compensation de salaire

Enfin, les syndicats obtiennent de Nestlé Waters qu'il compense les baisses de rémunérations pour les salariés restants. Le groupe a versé, fin 2006, une prime de transfert d'un montant de 35 000 euros brut à chacun des 174 employés repris par la Financière de la Croix Blanche. Pour ceux qui ont bénéficié d'un reclassement, la prime s'élève à 17 000 euros, la perte de rémunération étant moins élevée.

« Nestlé Waters a payé, conclut la CGT. Cela prouvait sa détermination à se débarrasser de la verrerie. » Le choix du PET (plastique) aux dépens du verre pour les bouteilles de Perrier, dès le début des années 2000, et l'absence d'investissements en faveur d'une diversification des produits ont mis l'usine sur la pente du déclin. Question de stratégie ? « Nestlé valorise les produits et filialise les fournisseurs », analyse le directeur adjoint de la DDTEFP.

Diminution des volumes fabriqués

Mais Nestlé Waters déplore, de son côté, la baisse des ventes de Perrier. Le repreneur, Michel Roquette, met en cause un coût salarial « nettement supérieur aux ratios de la profession » et une productivité trop faible. D'où les conditions drastiques de la reprise, d'après la direction du travail : « Les salariés avaient obtenu des conditions d'emploi exceptionnelles avec Perrier. La reprise ne pouvait se faire qu'au prix d'efforts très nets de leur part. » Une version contestée par la CGT : « D'après une étude menée par l'expert du CE, Secafi Alpha, les rémunérations étaient équivalentes dans les autres verreries si l'on tient compte des primes d'intéressement et de participation aux résultats. Quant aux coûts de production, la diminution des volumes fabriqués a alourdi d'autant les coûts fixes, de même que la fabrication de bouteilles San Pellegrino à des prix inférieurs à ceux du marché. »

Depuis la fin juillet 2006, date de la signature de l'accord de cession, Michel Roquette, fort de son expérience à la tête de la verrerie Saverglass et de Saga Décor (décor sur verre), peaufine son projet industriel. Sa priorité : la modernisation du seul four encore en fonctionnement en l'adaptant pour la conquête de nouveaux marchés. Le contrat d'approvisionnement de huit ans signé avec Nestlé Waters pour fournir des bouteilles à la marque Perrier garantit un volume de production, mais l'objectif est de diversifier l'activité en direction du marché viticole. « Un projet sérieux et ambitieux », estime la CGT.

Plan de formation

Deuxième priorité : améliorer les qualifications. Le départ brutal de 294 personnes, dont les trois quarts avaient plus de 50 ans, pourrait suffire à justifier un solide plan de formation. Mais Michel Roquette souligne également « le niveau technique insuffisant » des salariés de la Verrerie et la nécessité de les former à la fabrication de nouveaux produits. L'entreprise a sollicité l'Etat pour un dispositif FNE formation. La demande a de bonnes chances d'aboutir, d'après la direction du travail du Gard. Le programme est de 21 000 heures (dont 9 000 heures déjà utilisées fin 2006) pour un coût total de 700 000 euros. Les formations sont assurées dans un centre de Saint-Gobain Emballages. Pour motiver les salariés, le repreneur prévoit une participation aux résultats qui permettra, selon lui, de compenser les baisses de salaires.

Auteur

  • Solange de Fréminville