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2010, une année couperet pour les entreprises passives

Enquête | publié le : 13.02.2007 | L. G.

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2010, une année couperet pour les entreprises passives

Crédit photo L. G.

Entrée en application au 1er janvier 2006, la loi handicap de 2005 veut donner un nouvel élan à l'emploi des personnes handicapées. En 2010, la sanction financière sera sévère.

Le quota de 6 % reste inchangé dans la nouvelle loi. Tout établissement d'au moins 20 salariés reste soumis à l'obligation d'employer l'équivalent de 6 % de travailleurs handicapés. A noter que l'obligation d'emploi pour les employeurs du secteur public est également renforcée. Un «fonds pour l'insertion professionnelle dans la fonction publique» est créé, alimenté par les contributions des employeurs publics.

La non-discrimination est renforcée. Une décision défavorable ne peut être fondée sur l'état de santé ou sur le handicap, sous peine d'être sanctionnée pénalement pour cause de discrimination.

La loi introduit de nouveaux bénéficiaires de l'obligation d'emploi. Les titulaires de la carte d'invalidité et de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) peuvent, désormais, bénéficier du statut de travailleur handicapé sans démarche supplémentaire auprès de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH, ex-Cotorep).

L'effectif à prendre en compte pour calculer le taux d'emploi inclut désormais l'ensemble des salariés, y compris ceux qui occupaient des emplois dits «exclus».

Chaque bénéficiaire de l'obligation d'emploi, y compris les nouveaux bénéficiaires, est décompté pour une seule unité s'il est en CDD ou en CDI, et est retenu dans ce décompte s'il a été présent dans l'entreprise, au moins six mois, entre le 1er janvier et le 31 décembre.

Obligation de négocier

Le montant de la contribution à l'Agefiph peut néanmoins être diminué, si l'entreprise recrute un travailleur handicapé de moins de 26 ans ou de 51 ans et plus, ou s'il est chômeur de longue durée, ou issu du secteur du travail protégé ; si elle embauche ou emploie un salarié dont le handicap lourd est reconnu, si elle compte un grand nombre d'emplois autrefois dits «exclus», si elle embauche, pour la première année, un travailleur handicapé... (voir le site de l'Agefiph). De plus, la loi institue l'obligation de négocier, chaque année, pour toute entreprise ayant des représentants du personnel, sur les questions relatives à l'emploi des personnes handicapées. La périodicité de la négociation est portée à trois ans pour les entreprises qui concluent un accord collectif ainsi que pour les branches professionnelles.

Ces nouvelles obligations sont accompagnées de différentes aides déjà existantes. Selon Claudie Buisson, directrice de l'Agefiph, la prime à l'embauche est la plus connue et pourtant la moins utilisée. Elle est versée à l'employeur pour une embauche en CDI ou en CDD d'une durée supérieure à douze mois : 25 000 primes ont été versées en 2006. Les aides à la mise en place d'une politique d'embauche représentent 7 à 10 millions d'euros par an.

Les aides à l'aménagement des postes de travail représentent, actuellement, de 7 à 10 millions d'euros par an, mais ce dispositif est de moins en moins coûteux, car de plus en plus d'emplois se créent dans le tertiaire.

Accompagnement et tutorat

Le développement des aides humaines, comme le tutorat, permet un accompagnement du salarié handicapé dans sa prise de contact avec son poste, son environnement de travail et ses collègues. Les aides à la formation sont essentielles, car il existe un très fort décalage entre les qualifications des personnes handicapées et les exigences du marché du travail. C'est dans cette optique que l'Agefiph a lancé Handicompétences, son programme d'identification des besoins de formation des personnes handicapées en fonction des besoins des entreprises.

Claudie Buisson affirme que les emplois trouvés par des chômeurs handicapés sont souvent plus durables que ceux trouvés par les personnes valides et que cela fait la preuve des vertus de l'accompagnement.

Un taux de chômage doublé

- Selon la DGEFP, 680 000 personnes handicapées occupaient un emploi en 2005, un chiffre en croissance de plus de 4 % par rapport à 2004. Parmi elles, 535 000 travaillaient en milieu ordinaire, dont 160 000 dans le secteur public et 375 000 dans le secteur privé ; 35 000 étaient indépendantes et 110 000 travaillaient en milieu protégé. Le taux de chômage chez les personnes handicapées est néanmoins le double du taux classique.

23 000 entreprises récalcitrantes

- Selon l'Agefiph, sur les 100 000 entreprises d'au moins 20 salariés et donc assujetties à l'obligation d'emploi de 6 % de personnes handicapées, il apparaît que la moitié d'entre elles ont atteint le quota fixé ; 27 000 ont montré des efforts dans ce sens, sans l'avoir atteint, et 23 000 ont versé la contribution maximale, car elles n'emploient aucun salarié handicapé. Cette dernière catégorie concerne principalement les entreprises de 20 à 100 salariés. Le portrait type de l'entreprise qui a le moins de difficultés à progresser : un établissement de taille moyenne, appartenant au secteur industriel.

- Les entreprises qui ne satisfont pas à leur obligation de recruter 6 % de salariés handicapés peuvent faire appel à des entreprises adaptées. Claudie Buisson, directrice de l'Agefiph, reconnaît que beaucoup y recourent, ce qui leur permet de s'acquitter en moyenne de 20 % de leur obligation d'emploi de personnes handicapées. La loi les incite aussi à y recourir. L'Agefiph développe cette politique d'incitation à utiliser les Esat (établissements ou services d'aide par le travail), car l'objectif est que les entreprises emploient des personnes handicapées, même si c'est par ce biais. Ces établissements reçoivent d'ailleurs le soutien de l'Adapt (Association pour l'insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées).

Emploi : le succès du job dating

- Selon Emmanuel Constans, président de l'Adapt, le paysage de l'emploi des personnes handicapées est, actuellement, en pleine évolution et une véritable prise de conscience est en train de s'opérer. Cette mobilisation des différents acteurs du monde du travail (les entreprises, mais aussi les chambres de commerce...) se fait sentir depuis les débats sur la loi handicap 2005, qui ont duré presque trois ans.

- Depuis deux ou trois ans, les entretiens de recrutement, organisés pendant la «Semaine pour l'emploi des personnes handicapées», ont d'ailleurs connu une expansion importante, jusqu'à atteindre 40 000 en 2005.

- Lors de la dernière Semaine pour l'emploi des personnes handicapées, fin 2006, l'objectif de 60 000 a été atteint, assure Emmanuel Constans. Dans le cadre des job datings, lancés depuis trois ans, il constate un taux de placement de 55 % en CDI au bout de trois mois.

Les fédérations patronales informent

Les fédérations patronales informent leurs adhérents sur les obligations de la nouvelle loi. Par exemple, au Fonds d'action pour la réinsertion et l'emploi (Fare) de la Fédération des entreprises de propreté et services associés, Sandrine Razeghi précise que « l'accent est mis sur la compétence des personnes handicapées, pas sur la sanction. Les adhérents ont été alertés via des campagnes d'information et la proximité des structures FEP. Certaines entreprises sont, d'ores et déjà, satisfaites de la réduction de contribution qu'elles enregistrent suite à leurs efforts, mais les autres s'inquiètent. Il est clair que nous sommes davantage contactés que les années précédentes sur cette question ».

Effort pédagogique auprès des PME

A la Fédération du commerce et de la distribution à prédominance alimentaire, Stéphanie Lagalle-Baranès rappelle qu'« un accord de branche a été signé en mars 2006 sur ce point, et qu'un effort pédagoqique a été fait auprès des PME. Les grands groupes font déjà beaucoup, et leurs actions servent d'exemple. Les petites entreprises, pourtant, s'inquiètent et ont du mal à surpasser les préjugés classiques ». Un guide d'action devrait être produit prochainement.

A la Fédération française du bâtiment, Carole Panozzo assure qu'« une campagne d'information très importante sur la loi a été menée via nos relais régionaux et départementaux, et notamment les treize cellules régionales «handibat» et «rebatir», d'autant plus que, désormais, les maçons ne font plus partie des emplois exclus ! Un accord de branche ne nous semble pas nécessaire, car le niveau pertinent de traitement du problème est local. Libre à chaque entreprise de faire le nécessaire. Mais il est difficile de dire si les réveils seront douloureux ».

Guide du chargé de mission handicap en entreprise

- Chargé de mission handicap en entreprise : quel est son profil, ses formations ? Quelles politiques ?.... Un guide du «chargé de mission handicap» en entreprise a été édité*, fin 2006, par l'Agefiph, le magazine Etre Handicap information et le FIPHFP (Fonds d'insertion pour les personnes handicapées dans la fonction publique) pour aider les 98 800 entreprises de plus de 20 salariés à gérer le problème.

- Au sommaire du guide : un état des lieux des populations en présence et des entreprises face à la nouvelle loi handicap du 11 février 2005 ; une rubrique «métier» qui analyse la fonction de chargé de mission handicap dans différentes entreprises (Total, Carrefour, Air France...), et une rubrique «emploi» qui détaille les différentes étapes de la mise en oeuvre d'une politique d'emploi des personnes handicapées et les pratiques observées dans les entreprises.

* Hors-série de Etre Handicap information, 120 pages, 20 euros. <www.etre-handicap-info.com>

Les 10 conseils des salariés handicapés aux managers

- Recrutez-nous au niveau de nos compétences, ni plus... ni moins !

- Fixez-nous de «vrais» objectifs, comme à de «vrais» professionnels.

- Anticipez les adaptations nécessaires pour faciliter notre prise de poste.

- Faites des points réguliers pour connaître nos besoins réels, ils sont parfois plus simples que vous ne l'imaginez.

- Communiquez sur notre profil et notre mission «naturellement», sans en faire trop.

- Dès le premier jour, considérez-nous comme les autres salariés...

- ... Mais prenez en compte la différence de chacun !

- Balayez les préjugés et comptez sur nos forces plutôt que sur nos faiblesses supposées.

- Comme nous, ne vous laissez jamais aller à la pitié !

- Comptez sur nos capacités d'adaptation pour nous permettre d'évoluer... comme les autres !

Source : Guide du chargé de mission handicap. L. G.

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  • L. G.