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Les Pratiques

Le pouvoir d'appréciation du juge

Les Pratiques | L'AVIS DU JURISTE | publié le : 02.05.2006 | Alice Fages Juriste en droit social

Au cours de l'année 2005, la jurisprudence est intervenue à plusieurs reprises pour circonscrire la faute grave. Les arrêts mettent en avant deux principes : l'acte doit rendre impossible le maintien du salarié pendant le préavis, et un acte isolé n'est pas nécessairement une faute grave pour un salarié comptant une certaine ancienneté et qui n'a jamais fait l'objet de reproches pour des faits similaires.

L'étude des arrêts portant sur le licenciement disciplinaire devrait inciter les employeurs à avoir une nouvelle approche de la faute grave. Il fut un temps où certaines fautes étaient automatiquement qualifiées de graves : tel était le cas du vol, de l'abandon de poste, de l'insubordination caractérisée... Si ces faits peuvent encore motiver un licenciement pour faute grave, c'est à la condition que le salarié ait déjà fait l'objet de reproches pour des faits similaires, et que les faits rendent impossible le maintien du salarié pendant le préavis.

Ainsi, le licenciement fondé sur la présentation de fausses notes de frais ne repose pas sur une faute grave, compte tenu de la modicité du préjudice et de l'absence de reproches antérieurs (Cass. soc. 12/7/2005, n° 03-44.368). La qualification de faute grave n'est pas plus reconnue dans le cas d'une salariée qui se fait rembourser par l'entreprise des billets d'avion et de location de voiture pour son usage personnel, ces faits ne rendant pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant le préavis (Cass. soc. 23/11/2005, n° 04-46.245). Quant à la soustraction frauduleuse de marchandises par une employée de supermarché, ce seul fait ne constitue pas une faute de nature à rendre impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le préavis (Cass. soc. 2/11/2005, n° 03-42.452).

Dans le chapitre de l'insubordination, on retrouve les mêmes motivations : si le refus réitéré du salarié de se soumettre aux instructions de l'employeur justifie un licenciement, s'agissant d'un salarié comptant vingt-huit ans d'ancienneté, et en l'absence de tout manquement antérieur à la discipline, il ne s'agit pas d'une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le préavis (Cass. soc. 5/11/2005, n° 02-47.632). En revanche, le licenciement pour faute grave d'un sous-directeur pour propos injurieux est admis, le salarié ayant déjà reçu un avertissement pour comportement irrespectueux (Cass. soc. 15/11/2005, n° 03-46.697).

Il importe donc de ne pas se précipiter : des avertissements antérieurs sont indispensables pour qualifier une faute grave, et il faudra aussi montrer en quoi les faits rendent impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le préavis.

Auteur

  • Alice Fages Juriste en droit social