logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Les Pratiques

L'insertion, un levier de recrutement dans le BTP

Les Pratiques | Point fort | publié le : 25.04.2006 | Sylvie Karsenty

Image

L'insertion, un levier de recrutement dans le BTP

Crédit photo Sylvie Karsenty

Face aux difficultés de recrutement et à la nécessité de rajeunir les effectifs du BTP, l'insertion constitue un levier de recrutement dans ce secteur. Screg Est et Eiffage Construction réalisent, ainsi, 5 % de leurs embauches.

Screg Est recrute 200 salariés par an, dont 130 Compagnons. « Malgré la revalorisation des salaires et l'amélioration des conditions de travail, nous avons toujours autant de difficultés à les trouver, constate Jean-Martin Schulz, le DRH. Les engins sont devenus plus maniables et plus confortables. Dans notre entreprise, l'ascenseur social fonctionne bien. Pourtant, l'image du secteur reste négative et l'Education nationale peine à remplir ses lycées. »

Aussi, l'insertion est-elle devenue, dans plusieurs entreprises, un des leviers du recrutement. D'autant qu'elle contribue à améliorer leur image auprès des acteurs publics. C'est souvent un passage obligé, quand la collectivité inclut une clause d'insertion dans son appel d'offres, comme le prévoit le nouveau code des marchés publics. « Sur le chantier du Tram Train de la ville de Mulhouse, nous avons dépassé l'obligation prévue dans l'appel d'offres, explique Christophe Leblanc, responsable RH de Screg Est. Nous avons, en effet, besoin de recruter et de fidéliser du personnel. » L'entreprise s'est engagée à accueillir et à former pendant un an douze jeunes.

L'opération a été un réel succès puisque dix d'entre eux ont obtenu le diplôme. Trois sont, aujourd'hui, titulaires de CDI dans l'entreprise, la majorité des autres jeunes travaillant dans des sociétés de la région plus proches de leur domicile.

Clubs régionaux d'entreprises pépinières

Chez Eiffage Construction, entreprise née en 2000 du rapprochement de Fougerolle, SAE et Quillery, la politique d'insertion est ancienne et structurée. Un poste de responsable de la politique de la ville et de l'insertion a été créé en 1995. Avant même cette date, en 1993, l'entreprise (alors SAE) a lancé un dispositif original, les Crepi (Clubs régionaux d'entreprises pépinières pour l'insertion).

Chaque Crepi est un club d'entreprises, privées et publiques, de tous secteurs, où les PME sont majoritaires. Ce sont des associations loi 1901 qui montent des actions d'insertion par l'économique. « Ni redondants, ni concurrents, les Crepi visent, à l'échelle d'un bassin d'emploi, la complémentarité et l'articulation avec l'ensemble des dispositifs et des acteurs de l'insertion, explique Catherine Giner, responsable de la politique de la ville et de l'insertion. C'est pourquoi, préalablement au montage d'un Crepi, il convient d'identifier et de répertorier sur le territoire ciblé, les dispositifs existants. »

Neuf Crepi fonctionnent actuellement, ils rassemblent plus de 400 entreprises. Chacun réalise, en moyenne, 70 à 80 insertions durables par an. Deux clubs sont en cours de création, en Normandie et dans les Pays de la Loire.

Participation à de nombreuses démarches

Les différentes sociétés du groupe participent aussi aux Geiq (Groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification), aux Plie (Plans locaux pour l'insertion et l'emploi) et aux plates-formes d'initiative locale qui accompagnent la création d'entreprise. Elles soutiennent des chantiers-écoles et des entreprises d'insertion et participent aux parrainages organisés par les missions locales.

Diversification des profils

« Toutes ces démarches ont permis d'intégrer dans notre groupe des salariés venus d'autres univers, chômeurs de longue durée, allocataires du RMI, étrangers, jeunes habitant les quartiers défavorisés, observe Catherine Giner. Si l'insertion est un levier de recrutement, c'est aussi un moyen de diversifier les profils. » L'insertion complète les trois méthodes traditionnelles de recrutement que sont les relations familiales, les stages et l'intérim.

L'insertion est également un moyen de rajeunir l'effectif. Comme les autres entreprises du BTP, Eiffage Construction est, en effet, confronté à la difficulté de renouveler son personnel ouvrier. Dans de nombreuses filiales, les pyramides des âges sont déséquilibrées. Globalement, les moins de 30 ans, qui représentent moins de 20 % de l'effectif, sont en nombre insuffisant pour compenser les départs à la retraite. Les jeunes en difficulté sont donc des candidats potentiels. « D'autant que le BTP est l'un des rares secteurs où l'on peut entrer avec pour seul bagage l'envie d'y travailler, note Catherine Giner. L'entreprise se charge, ensuite, de former et de qualifier le salarié. »

Mobilisation interne et externe

Au total, Eiffage Construction, comme Screg Est, réalise 5 % de ses recrutements par ce biais. Un chiffre qui ne pourra guère être dépassé. « Une mobilisation interne et externe est indispensable pour réussir ces opérations », note Christophe Leblanc. Plusieurs tuteurs se sont fortement impliqués. Ils ont appris à être patients, attentifs et ont su, parfois, remettre en question leur management. Plusieurs ETT d'insertion ont joué un rôle déterminant en assurant un accompagnement tant personnel que social et professionnel. »

Une politique sur la durée

Pour Eiffage Construction, une politique d'insertion se mène sur la durée. « Au fil des ans, nos méthodes se sont affinées et nos efforts ont porté leurs fruits, constate Catherine Giner. Il faut du temps pour organiser des partenariats avec le service public de l'emploi et avec les différents acteurs de l'insertion. C'est une condition indispensable pour réussir l'intégration de jeunes qui, au départ, étaient peu attirés par nos métiers. »

Des salaires en hausse

D'après la FFB, les salaires minima moyens pour 39 heures ont augmenté de 5,8 % par an, entre début 2000 et mi-2005.

Pour les ouvriers professionnels débutants, le salaire minimum moyen mensuel, hors primes, s'élève à 1 288 euros (35 heures, soit 5,75 % de plus que le Smic) ou à 1 472 euros (39 heures, soit 8,47 % de plus que le Smic). Le salaire minimum moyen d'un ouvrier expérimenté s'élève à 1 732 euros (35 heures) ou à 1 979 euros (39 heures).

Les travaux publics ont aussi consenti des efforts. Un rapprochement entre les minima des différentes régions a été réalisé et ceux-ci se situent, désormais, à l'intérieur d'une marge de 6 % par rapport à une valeur moyenne nationale pondérée.

Pour les ouvriers, le salaire moyen annuel dépassait, début 2005, les 20 000 euros, soit une augmentation de plus de 15 % en quatre ans, tandis que, dans le même temps, les horaires diminuaient de 7,5 %, soit une progression de plus de 22 % en quatre ans.

Une plaquette destinée aux jeunes annonce des salaires d'embauche (indemnités et avantages inclus) de 21 000 euros à 22 500 euros annuel pour les constructeurs de route titulaires d'un CAP, d'un BEP ou d'un bac pro ; de 20 000 à 22 000 euros pour les canalisateurs, titulaires d'un CAP, BEP ou bac pro.

L'accord de février 2005 sur le statut de l'apprenti dans le BTP augmente les rémunérations (elles vont de 40 % à 80 % du Smic ou du minimum conventionnel) et offre des avantages nouveaux comme le prêt à taux réduit pour l'achat du premier deux-roues ou de la première voiture, l'obtention du permis de conduire ; l'accès à des séjours en centre de vacances ; une couverture complémentaire.

Les salaires des jeunes en contrat de professionnalisation sont supérieurs aux minima légaux.

Les jeunes qui débutent leur vie professionnelle dans certains métiers en tension (ouvriers qualifiés des travaux publics ou du gros oeuvre du bâtiment, techniciens du BTP) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt de 1 000 euros.

L'essentiel

1 Face aux pénuries de main-d'oeuvre, l'insertion est devenue un des leviers de recrutement. Les entreprises contribuent ainsi à améliorer leur image auprès des acteurs publics.

2 Dans le bâtiment, un tiers des candidats recrutés sont des demandeurs d'emploi.

3 Plusieurs outils existent : les Crepi (Clubs régionaux d'enteprises pépinières pour l'insertion); les Geiq (Groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification), les Plie (Plans locaux d'insertion pour l'emploi) ou encore les plates-formes d'initiative locale qui soutiennent la création d'entreprise.

Auteur

  • Sylvie Karsenty