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Comment Arcelor a cédé... et reconverti

Enquête | publié le : 14.02.2006 | Christian Robischon

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Comment Arcelor a cédé... et reconverti

Crédit photo Christian Robischon

Créée par Arcelor à l'occasion de la cession d'Unimétal, la société lorraine de 200 salariés Hommes & Emploi présente un profil atypique. L'essentiel du personnel a été reconverti vers des métiers sans rapport avec l'acier.

Hommes & Emploi est une société de services à part, et pas seulement au sein de sa maison mère, le groupe sidérurgique Arcelor. Ses dirigeants la qualifient avec justesse d'« entreprise à l'envers ». A son démarrage, en 1999, elle n'a pas recruté ses 200 salariés pour répondre à un marché défini préalablement, « ce sont les activités que nous avons adaptées au profil des effectifs », rappelle le directeur général Gervais Hans.

H & E a été créée à Rombas (Moselle) à l'occasion de la cession par le groupe européen de sa filiale Unimétal en Lorraine, afin de reprendre, pour l'essentiel dans le cadre du L 122-12, les salariés non conservés par le nouvel employeur Mittal Steel, le leader mondial de l'acier, qui, aujourd'hui, veut racheter Arcelor.

Reclassement classique hypothétique

Reclasser ce public de façon classique semblait très hypothétique : il était en majorité âgé de plus de 52 ans, sans diplôme, usé par plus de trente ans de sidérurgie (60 % présentait une restriction médicale sur poste). En fonction de ces profils, H & E a défini ses trois activités : les travaux de second oeuvre dans le bâtiment (peinture, pose de revêtements de sols, chauffage-sanitaire...), les espaces verts et la numérisation de registres d'état civil et d'archives.

L'externalisation de fonctions ne couvre qu'une petite partie de ce panorama : seule une dizaine de salariés exercent le même métier qu'au temps d'Unimétal, en administratif ou petits travaux. « Des personnels de maintenance auraient pu poursuivre leur activité passée au sein de notre secteur «second oeuvre», mais ils n'en avaient plus forcément l'envie ni la capacité physique. Nous les avons reconvertis », ajoute Gervais Hans.

Arcelor, premier client

L'ancien employeur sidérurgique demeure, en revanche, le premier client d'H & E, à hauteur de 60 % environ. Gervais Hans récuse l'idée d'une concurrence déloyale sur un marché local du bâtiment qui, selon lui, fait difficilement face à ses commandes en raison de sa pénurie de main-d'oeuvre.

En filialisant son plan social, Arcelor a pris le contre-pied des démarches classiques. « Il est à la fois celui qui reconvertit, l'ancien et le nouvel employeur », résume Gervais Hans. Et il persiste : alors qu'H & E semblait devoir sortir de son périmètre au bout de quelques années, elle demeure dans son giron. « La direction générale d'Arcelor a eu conscience qu'elle tenait là un concept reproductible », observe Gervais Hans.

Gestion des sureffectifs

En clair, cette filiale pouvait s'avérer utile pour la gestion de nouveaux sureffectifs âgés. Ce qui s'est déjà présenté : depuis 2002, 70 autres sidérurgistes lorrains ont rejoint H & E, remplaçant au passage les salariés d'origine qui partaient en retraite - l'effectif reste inchangé. H & E n'a pas été cédée, bien qu'elle ait toujours affiché des pertes financières, qu'elle attribue à ses charges particulières - 40 des salariés qu'elle rémunère sont actuellement en congé de fin de carrière - et à son investissement en formation, égal à 20 % de la masse salariale.

La formule intéresse désormais d'autres industries en France, en Belgique et en Allemagne. Elle n'est pourtant pas née dans le consensus. La CGT d'Unimétal l'avait fortement critiquée, y voyant une dévalorisation par rapport au noble travail de l'acier. Gervais Hans récuse cette analyse : « Les salariés restent dans la grille salariale et la convention collective de la sidérurgie. Je ne vois pas en quoi nos métiers sont moins honorables. Et nous avons conservé un travail à un public qui fonçait droit vers le chômage longue durée. »

arcelor

> Effectifs : 94 600 salariés, en 2004.

> Chiffre d'affaires : 30 milliards d'euros, en 2004.

Auteur

  • Christian Robischon