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Intégrer l'importance des différences culturelles

Enquête | publié le : 06.09.2005 | C. L.

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Intégrer l'importance des différences culturelles

Crédit photo C. L.

La fidélisation des salariés chinois repose sur plusieurs éléments, dont, notamment, les perspectives et la notoriété de l'entreprise, le style de management pratiqué, ainsi que le charisme et la «délicatesse» des managers.

La question de la fidélisation des salariés chinois est primordiale. Au coeur de celle-ci : le manager, acteur du bien-être des salariés et de leur loyauté. « Un bon chef, en Chine, est un manager à l'écoute, qui s'occupe de ses salariés, résout leurs problèmes, répond à leurs interrogations et à leurs soucis », explique Marc Raynaud, associé du cabinet ICM (Inter Cultural Management Associates).

Disparités des attentes

« La gestion des employés chinois se fait sur un mode paternaliste, protecteur et affectif », confirme Eric Tarchoune, directeur de Dragonfly Group, cabinet de conseil en management, ressources humaines et intelligence économique. Mais il n'y a aucune recette. « Il existe, en effet, en Chine, de grandes disparités entre les salariés dans leurs attentes et leurs attitudes au travail, selon leur âge, et selon qu'ils ont vécu avant, pendant ou après la Révolution culturelle ; selon l'entreprise où ils ont débuté leur carrière (fonction publique, entreprise publique ou privée, entreprise domestique ou étrangère) ; selon leur province d'origine... », énumère Loïc Mahé, senior vice-président d'Alstom Transport China.

Plus fidèle au patron qu'à l'entreprise

Pour inciter les salariés à rester, le lien avec le manager doit être solide. « C'est le Guangxi (importance de la relation), qui suppose présence et patience », indique Thierry Lacarne, DRH Asie d'Areva. Car, « en Chine, on est davantage fidèle à son patron qu'à son entreprise », signale Eric Tarchoune. « La notion de patron est très prégnante, ajoute Emmanuel Méril, avocat, responsable Chine de CMS Bureau Francis Lefebvre. Ce qui n'est pas sans poser de problème dans les entreprises occidentales qui fonctionnent de manière collégiale. » Et lorsque, le moment venu, les managers, souvent expatriés, quittent la Chine.

Payer de sa personne

Le pendant ? « On doit, en tant que manager, payer de sa personne, dorloter ses collaborateurs en les aidant, par exemple, à trouver un logement », répond le représentant local d'une grande société française. C'est aussi l'organisation d'activités collectives, des sorties afin d'installer un esprit de famille. Nelly Biche de Bere, Pdg de la société de confection et de fabrication de bijoux éponyme, en convient : « Il faut se creuser la tête. On organise des repas, on fête les anniversaires ou le départ des stagiaires. »

Soutien personnel

Egalement appréciés, selon Sabine de Villoutreys, DRH d'Arkema, la filiale chimie de Total, « le soutien en cas de difficultés particulières personnelles ou familiales, les «plus» dans la couverture sociale ou encore les voyages d'entreprise ».

Autre élément à ne pas négliger : le mianzi. Autrement dit : la face. L'ensemble des relations humaines en Chine est fondé sur ce principe. Le Chinois ne veut pas perdre la face. Ce qui conditionne la pratique managériale. « Pour ne pas perdre la face, on ne dit pas à son responsable que l'on n'a pas compris, explique Nelly Biche de Bere. Cela nous oblige à un suivi et à des reportings permanents. »

« Il faut aussi systématiquement reformuler, faire dire ce qui a été compris et s'assurer que le travail que vous attendez est bien celui qui va être produit », commente Thierry Lacarne. Le tout, sans perdre patience : « S'énerver devant son collaborateur lui fera perdre la face », explique Eric Tarchoune. En fait, « c'est la recherche d'harmonie qui prévaut. On ne revendique pas, on ne trouble pas l'ordre social. On passe, par exemple, par un intermédiaire. C'est moins direct que le management à l'occidentale. Ce qui n'empêche pas d'aborder les problèmes, mais cela se fait par des voies détournées », ajoute Emmanuel Méril. Cette notion dépasse les frontières de l'entreprise. « Si le salaire proposé ne paraît pas en ligne avec le marché, cela fera réagir les amis et la famille, et l'intéressé se souciera de ne pas perdre la face », illustre Sabine de Villoutreys.

Entreprise reconnue

Cette notion conditionne également le choix de l'entreprise. Sur le plan social, l'emploi est très important. Cela suppose de travailler dans une entreprise connue ou qui sait se valoriser. « Il importe, ainsi, de communiquer en interne sur nos réussites, sur le plan de développement et la bonne santé de l'entreprise. Autant d'arguments qui seront ensuite relayés par les salariés dans leur vie privée », signale la DRH d'Arkema.

Cette approche est également celle de Loïc Mahé : « Nous présentons à nos collaborateurs les marchés que l'entreprise a décrochés, le dépassement de nos concurrents. Notre avantage est de construire des produits qui se voient comme le métro dans lequel on peut emmener sa famille. » Appréciée, également, la mode. « C'est très glamour pour les Chinois. Ils sont attirés par notre entreprise », expose Nelly Biche de Bere. Autre «plus» : l'environnement international des entreprises étrangères. « Ils aiment la collaboration avec les experts expatriés, la possibilité de venir en France ou dans des pays anglophones », conclut Jean Laporte, career development à la direction du service du personnel de Michelin Asia Pacifique.

Accélérer le développement

Danone l'a bien compris. Le groupe a, ainsi, mis en place un programme baptisé «speed up program», dont le but est d'accélérer le développement des collaborateurs chinois. « L'objectif est de donner, après cinq ans d'expérience dans le groupe, des parcours à l'international pendant deux à trois ans. Une quinzaine de jeunes sont concernés », présente Pierre Deheunynck, vice-président développement hommes et organisation de Danone.

Enfin, un collaborateur sera d'autant plus fidélisé qu'il est bien formé. « Il faut constamment les intéresser, leur apprendre des choses nouvelles pour qu'ils puissent progresser dans leurs compétences. Ils ont une soif d'apprendre incroyable », commente Nelly Biche de Bere.

Programmes transversaux

Areva a mis en place, ces trois dernières années, des programmes transversaux de formation qui ont un écho très favorable auprès des managers, selon Thierry Lacarne. « Il s'agit d'un cycle de trois semaines auquel on associe un projet, retenu par le comité de direction, à mener à la fin du stage. Dernièrement, nous avons lancé un nouveau cursus «marketing excellence» qui rencontre pas mal de succès auprès de nos forces commerciales. » La formation est un facteur de fidélisation, elle est aussi à risque. Les entreprises ne se voilent pas la face. Elles savent, en effet, qu'elles forment bien souvent pour les autres.

Auteur

  • C. L.