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Danone forme ses bas niveaux de qualification

Les Pratiques | Point fort | publié le : 30.08.2005 | Marie-Pierre Vega

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Danone forme ses bas niveaux de qualification

Crédit photo Marie-Pierre Vega

Depuis octobre 2003, près de 500 salariés de Danone ont bénéficié d'Evoluance, un programme de formation mis en place par le groupe agroalimentaire pour développer l'employabilité des collaborateurs les moins qualifiés. La CGT, deuxième organisation syndicale, se montre critique à l'égard du dispositif, qui pourrait être pérennisé.

Trois outils : la VAE, des formations menant à des CQP (certificat de qualification professionnelle) et des formations débouchant sur le CFG (certificat de formation générale). Une cible : les salariés aux plus bas niveaux de qualification. Et un objectif : développer leur employabilité en prévision d'une éventuelle mobilité interne ou externe, souhaitée ou imposée. « Le programme ne s'accompagne pas forcément d'une évolution. Mais le salarié qui en a bénéficié se prépare, ainsi, à toutes les éventualités en augmentant son niveau de compétence et en développant son autonomie », explique Laurence Kopelman, responsable de ce projet. Traduction de Mario Pisanu, délégué syndical central CGT : « Il y a de la restructuration dans l'air. Le nouveau directeur industriel nous a d'ailleurs annoncé que nous devions nous préparer à «faire des petits sacrifices». Il ne faut pas oublier que la responsable de ce projet a été en charge d'un programme similaire chez Lu, à la fin des années 1990, avant que le groupe ne procède à des dégraissages massifs. »

Le dispositif est actif depuis octobre 2003. Il doit permettre de former 670 personnes. Il s'appuie sur une convention de coopération signée avec le ministère de l'Education nationale, qui détache un collaborateur sur le projet, et avec l'Agefaforia, l'Opca de l'industrie agroalimentaire. Il est financé en partie sur le plan de formation, indique Danone, qui ne communique pas le budget consacré au programme.

A ce jour, environ 320 salariés se sont engagés dans une VAE. Une soixantaine d'entre eux sont parvenus au terme du parcours avec, à la clé, une validation intégrale du diplôme. Seules huit personnes n'ont obtenu qu'une validation partielle et une a été recalée. Les diplômes visés sont très variés : « Au total, 40 diplômes sont concernés, allant du CAP au BTS, avec, à la marge, une dizaine de personnes positionnées sur un diplôme de niveau supérieur », indique Laurence Kopelman. Une quinzaine de Dava (dispositif académique de validation des acquis) et les Greta accompagnent les salariés dans la constitution de leur dossier de VAE et les préparent à l'entretien devant le jury, sur une durée totale de 17 à 18 heures. « Environ 120 heures de travail personnel sont également nécessaires », précise Laurence Kopelman.

Un certificat peu connu

Autre outil : le CFG. Un choix pédagogique particulier, car ce certificat est peu connu. Ouvert aux adultes dans le cadre de la formation continue, ce diplôme sanctionne le premier niveau d'études de l'Education nationale, et correspond au premier niveau d'exigence du référentiel des domaines généraux des CAP. De fait, les matières enseignées sont les mathématiques, le français et la vie sociale et professionnelle. L'entreprise y a aussi intégré des éléments répondant à ses propres objectifs, comme la connaissance de ses produits, les accidents du travail ou encore l'organisation d'une sortie pédagogique par les stagiaires eux-mêmes, au plus tard à mi-parcours de la formation. Selon Laurence Kopelman, « l'objectif est d'être plus à l'aise dans le milieu professionnel et dans la vie quotidienne, d'acquérir davantage d'autonomie, de s'exprimer plus facilement, notamment sur ses propres situations professionnelles, d'être capable de développer un argumentaire... et d'être à même de suivre ensuite des formations à caractère plus technique ».

La formation se déroule sur site, sur une moyenne de 200 heures à raison d'une journée par semaine. Elle est délivrée par un formateur du Greta, et se conclut par la rédaction d'un rapport soutenu devant un jury ; 49 personnes sur 110 candidats ont déjà obtenu leur diplôme.

67 parcours de CQP

L'entretien de motivation qui précède le démarrage de la formation au CFG a permis de réorienter les salariés qui ne disposaient pas des prérequis nécessaires. « Il faut éviter tout risque d'échec. Des ateliers fondamentaux ont donc été mis en place pour six personnes qui ne pouvaient pas entrer en CFG. Cette formation est validée par une attestation signée par le directeur de l'usine et le centre de formation », précise Laurence Kopelman. Enfin, 67 parcours de CQP ont été engagés, dont 61 sont arrivés à terme. Ils se déroulent aussi pendant le temps de travail, sur 240 heures à raison de deux jours toutes les six semaines. La plupart concernent la gestion et l'administration de la paie, ainsi que le métier de conducteur de ligne.

La CFDT, première organisation syndicale du groupe, porte un regard bienveillant sur le dispositif. « L'entreprise offre aux salariés l'opportunité de valoriser et de faire reconnaître leurs compétences. Ce peut être un tremplin pour eux si des possibilités d'évolution se dégagent. De toute façon, c'est globalement intéressant car on ne sait pas ce qui peut arriver au groupe dans l'avenir », estime Bruno Fourné, délégué syndical central CFDT. La CGT est beaucoup plus critique. « Remettre à niveau des salariés qui ont été des laissés-pour-compte de la formation pendant des années, c'est une bonne chose. Proposer un programme qui s'inscrit dans une logique de performance individuelle mise au service de l'entreprise, nous n'avons rien contre non plus, concède Mario Pisanu. Mais plus de 30 % de la population ouvrière ne bénéficie toujours d'aucune formation, en dépit d'Evoluance. Certains métiers y échappent complètement, comme les caristes, qui travaillent en flux tendu et ne sont pas autorisés à s'absenter pour se former. »

Mario Pisanu estime que l'entreprise « a du mal à faire vivre le CFG ; 110 personnes concernées, c'est peu. C'est difficile de motiver un opérateur de conditionnement qu'on a tranquillement laissé dans son coin pendant quinze ans ». La CGT désapprouve aussi le choix du CQP, qui « ne constitue pas un diplôme qualifiant rémunérant comme un CAP, un bac pro ou un BTS », et les conditions d'accompagnement mises en place dans le cadre de la VAE : « On nous demande de finaliser le dossier en deux mois et demi avec 18 heures d'accompagnement. Ce n'est pas suffisant ! »

Pérenniser le dispositif

De son côté, la direction de Danone affiche sa volonté de pérenniser ce programme. « L'idée serait que chaque site se l'approprie et le fasse vivre lui-même, comme le font déjà certains, avec moins de coordination centrale », indique Laurence Kopelman. Dans cette logique, un film de témoignages et un guide méthodologique sont en préparation.

L'essentiel

1 Actif depuis octobre 2003, le programme Evoluance de Danone vise à former, qualifier et diplômer 670 de ses 9 000 agents de production et agents de maîtrise à l'horizon de mars 2006.

2 Le programme comporte trois outils : la VAE et des formations menant au CFG ou à des CQP. 320 salariés se sont engagés dans une VAE, 110 dans une formation menant au CFG et 67 dans un parcours de formation à un CQP.

danone

> Activité : agroalimentaire ; 40 sites en France, dont 22 sites de production.

> Effectif total hors cadres : 9 000 personnes.

> Moyenne d'âge : 41 ans.

Auteur

  • Marie-Pierre Vega