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Démarche compétence : un plus pour les salariés et l'entreprise

Demain | Aller plus loin avec | publié le : 31.05.2005 | Violette Queuniet

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Démarche compétence : un plus pour les salariés et l'entreprise

Crédit photo Violette Queuniet

Plus opérationnelles que les démarches de GPEC, les démarches compétence sont particulièrement bien adaptées aux PME. Si les entreprises peuvent se passer, parfois, des outils traditionnels de la GRH, elles doivent, en revanche, se poser la question de la reconnaissance des nouvelles compétences acquises par leurs salariés.

E & C : Les années 1990 ont été des années «GPEC». Aujourd'hui, les entreprises s'orientent plutôt vers des démarches compétence. Quelles sont les différences entre ces deux démarches ? Pourquoi cet intérêt pour les démarches compétence ?

Michel Parlier et Antoine Masson : Une démarche compétence est centrée sur les individus au travail, une démarche de gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences (GPEC) l'est plutôt sur l'emploi. D'autre part, une démarche compétence se place au centre opérationnel du fonctionnement de l'entreprise - les ateliers, les services, là où se fait la performance en fonction des objectifs de l'entreprise et en fonction des attentes du marché. Une démarche de GPEC, au contraire, est avant tout un dispositif de gestion des RH et n'a qu'un lien indirect avec la performance. Les entreprises, qui sont prises dans le quotidien, ont besoin d'outils plus efficaces et plus opérationnels que les outils de GPEC, trop sophistiqués. Avec la GPEC, on est dans la prévision. Mais le chef d'entreprise, dont le carnet de commandes ne va pas au-delà de trois mois, ne voit pas l'intérêt de concevoir ses métiers à cinq ans. L'objectif d'une démarche compétence n'est pas de planifier, mais de pouvoir développer l'entreprise avec les compétences. Son ambition est d'être un outil de management de l'entreprise.

E & C : Quelle est la place du DRH dans une démarche compétence ?

M. P. et A. M. : Alors que le DRH porte le dispositif de GPEC, l'interlocuteur privilégié des démarches compétence est le responsable de l'entreprise, le responsable de fabrication dans l'industrie, le responsable de clientèle dans une société de services, bref, l'usager principal du dispositif. C'est donc un changement de focale : les DRH qui se lancent dans les démarches compétence s'effacent devant l'usager. Dans certaines entreprises, le DRH ne fait pas les référentiels, ce sont les usagers (encadrement et salariés) qui s'en chargent. C'est le signe d'une sorte de maturité, c'est un processus où l'impulsion est donnée par le DRH, mais où la réalisation n'est pas faite par lui ni par un consultant. C'est pour cette raison que ces démarches sont particulièrement bien adaptées aux PME. Elles savent prendre en compte la nécessité de faire évoluer ensemble l'organisation et les compétences.

E & C : Une démarche compétence doit-elle nécessairement aboutir à une reconnaissance salariale des nouvelles compétences acquises ?

M. P. et A. M. : Il est indispensable qu'il y ait reconnaissance, mais pas forcément salariale. On voit des démarches compétence qui s'arrêtent au milieu du gué parce que les entreprises ne veulent pas développer de système de reconnaissance, souvent par manque de savoir-faire. Mais la première forme de reconnaissance, c'est une évolution du management. Il ne sert à rien de demander aux salariés de développer de nouvelles compétences si l'on ne met pas en place un management qui saura élaborer de nouvelles missions, une nouvelle activité, confier des responsabilités, apprécier l'initiative des salariés.

Il faut donc qu'il y ait un processus de reconnaissance, et c'est uniquement dans ce cas que les démarches compétence peuvent être «mutuellement profitables». C'est l'idée qu'il ne peut y avoir progression d'un côté sans progression de l'autre. Parler de rémunération dès le début d'une démarche serait maladroit, mais, à un moment donné, il faudra l'évoquer. S'il y a développement de compétences, il y a développement de la responsabilisation et résultat économique et, donc, reconnaissance des compétences. Le bénéfice de l'un sert à l'autre. C'est, en tout cas, la préoccupation du réseau Aract/Anact. Nous sommes aussi conscients que certaines démarches compétence peuvent être un moyen de renforcer le niveau d'exigence de l'entreprise vis-à-vis de ses collaborateurs, une forme plutôt intelligente de «presser le citron», sans contrepartie pour le salarié. Nous proposons une alternative, avec une méthodologie où l'organisation du travail et la clarification des enjeux tiennent une place majeure. Nous sommes convaincus que clarifier les enjeux est un passage obligé pour engager les acteurs les uns par rapport aux autres. Par exemple, lorsqu'une démarche compétence a pour but de développer la polyvalence, il s'agit d'analyser tout ce dont la polyvalence est porteuse : développement professionnel, mais aussi tension dans l'équipe. Si cela n'a pas été analysé avant, la démarche compétence ne fonctionnera pas. C'est pour cela que nous nous intéressons au travail. Pour nous, la compétence, ce n'est pas une litanie de savoirs, c'est la maîtrise de situations de travail, et c'est pour cela qu'elle est directement reliée à la performance.

Sociologie du changement, Philippe Bernoux, Seuil, 2004.

Les chantiers du manager, Denis Segrestin, Armand Colin, 2004.

Théâtre, Jean-Paul Sartre, Gallimard, coll. Pleiade, 2005.

parcours

Antoine Masson (debout) est chargé de mission à l'Aract (Action régionale pour l'amélioration des conditions de travail) des Pays de la Loire. Il intervient en PME sur des chantiers liés à l'organisation et aux compétences.

Michel Parlier est chargé de mission à l'Anact (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail) et professeur associé à l'IAE de Lyon. Spécialiste des RH, il a exercé des responsabilités dans un grand groupe français, puis des activités de consultant à Développement et Emploi.

Tous deux sont les auteurs de Les démarches compétence (éd. Anact, coll. Agir sur..., 2004). <www.anact.fr>.

Auteur

  • Violette Queuniet