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Les Pratiques

Jobdumping : un travail pour les moins offrants

Les Pratiques | Expériences & Outils | publié le : 03.05.2005 | Marion Leo, à berlin

Jobdumping, site allemand d'enchères inversées, permet de postuler à un emploi. C'est le candidat qui accepte le salaire le plus faible qui décroche le travail. La polémique est vive outre-Rhin.

Fabian Löw est sur la défensive. « Nous avons créé un instrument innovant. On devrait nous féliciter », assure le jeune entrepreneur. A 31 ans, il a créé un site web qui a provoqué l'indignation des syndicats allemands et qui lui a assuré une grande notoriété. Son portail, baptisé «Jobdumping», est un site d'enchères inversées pour l'emploi. Il permet de postuler en ligne à un emploi en proposant le salaire le plus faible. Exemple : « Entreprise de marketing cherche personne non-qualifiée pour distribuer prospectus dans des zones piétonnes à Berlin ; 5 euros l'heure. Qui dit moins ? » Inversement, le site permet aussi aux gens d'offrir leurs compétences à un salaire minimum. Aux intéressés alors de proposer un prix supérieur. Exemple : « Un garagiste de Potsdam offre ses services pour 10 euros l'heure. Qui est prêt à payer plus ? » Le site fonctionne en somme comme celui de e-bay, mais on y marchande du travail.

Liberté de choix

A ses détracteurs, qui l'accusent d'exploiter la misère régnant sur le marché du travail, Fabian Löw explique que Jobdumping mise sur la « maturité » de ses usagers. « Chacun est libre de choisir pour quel salaire il est prêt à travailler, se défend le jeune homme. Nous devons gagner moins pour permettre la production de produits moins chers. Ce qui relancerait la consommation. » Il ajoute toutefois que « les employeurs peuvent, deux heures avant la fin de l'enchère, opter pour le candidat le plus qualifié ». Et il revendique le placement de 1 300 personnes depuis la création du site en octobre dernier.

Une opération légale

« Ce site est une catastrophe. C'est un instrument qui conduit au dumping salarial », s'indigne, quant à lui, Reinhard Bispinck, chercheur à la fondation Hans Böckler Stiftung, proche des syndicats, qui reconnaît toutefois qu'il s'agit d'une opération légale. En Allemagne, il n'y a pas de salaire minimum fixé par l'Etat. Les partenaires sociaux négocient dans chaque branche leurs propres salaires planchers. Et ces derniers ne s'appliquent qu'aux entreprises membres des associations patronales. En Allemagne de l'Ouest, 70 % des salariés sont couverts par des accords de branche, contre 54 % en ex-RDA. « Une telle enchère ne serait illégale que si une entreprise membre d'une fédération patronale engageait une personne à un salaire inférieur à celui fixé par la convention », remarque Reinhard Bispinck.

« Nous appelons nos usagers à respecter la législation sociale et les accords de branche. Mais ils sont 22 000. Nous ne pouvons pas les contrôler », se défend le fondateur de Jobdumping. En août prochain, il a prévu de lancer un site équivalent en France et en Espagne. La version anglaise est déjà prête.

Auteur

  • Marion Leo, à berlin