Parce qu'ils sont isolés, les salariés nomades sont une population à part dans les entreprises. Un management sur mesure s'impose. « Ne dit-on pas "loin des yeux, loin du coeur " ? Pour faire mentir cette maxime, les entreprises doivent maintenir un lien entre elles et leurs salariés éloignés », souligne Bernard Sembeilles, consultant en management et animateur, chez EFE, d'une formation intitulée "Comment manager une équipe à distance sans perdre en efficacité ?"

Chez Chubb sécurité, société spécialisée dans la sécurité des biens et des personnes comptant 1 400 salariés nomades, le cordon se tisse dès l'arrivée des nouvelles recrues commerciales et techniciennes.

« Lors de leur intégration, nous leur remettons un livret dans lequel elles trouvent l'ensemble des contacts back office qui leur seront utiles une fois sur les routes, explique Jérôme Soltani, responsable marketing opérationnel. Ensuite, nous leur assignons un parrain, un point d'ancrage dans l'entreprise pour que s'instaure, même à distance, une certaine proximité. » Enfin, le journal interne de l'entreprise, Trait d'union, envoyé au domicile des commerciaux, leur permet de prendre connaissance de ce qui a pu leur échapper de la vie de leur entreprise.

Autre entreprise, autre pratique, celle du Laboratoire Arkopharma, qui réunit l'ensemble de ses commerciaux, trois fois par an, lors de séminaires.

« Si ces rendez-vous sont l'occasion de présenter et de lancer de nouveaux produits, ils sont aussi des événements managériaux de taille pour dynamiser la cohésion et le sentiment d'appartenance des collaborateurs. La direction au grand complet est présente, tout comme la force de vente et les représentants de nos filiales étrangères. Les uns et les autres échangent sur leur métier, leur quotidien... », décrit Christophe Blond, directeur commercial, responsable d'une équipe de 54 délégués commerciaux. Dans l'intervalle, ces délégués en tournée reçoivent régulièrement la visite de leur directeur régional, qui va les accompagner pendant plusieurs jours. Au moindre problème, ils peuvent aussi se tourner vers leur salarié référent, une secrétaire affectée à 5 délégués.

Cette articulation entre sédentaires et nomades existe aussi à la Sodie, société spécialisée dans l'accompagnement des salariés licenciés et dans le développement économique local. « Chacun de nos consultants - ils sont 130 au total -, absents plusieurs semaines d'affilée dans le cadre de mobilités dites de chantier, dispose en permanence d'un point de rattachement dans l'entreprise, autre que hiérarchique, pour traiter des questions ressources humaines et administratives : jours de congés, notes de frais..., explique Vincent Kalus, directeur des opérations. Nous nous appuyons aussi sur diverses technologies communicantes. Pour autant, elles ne peuvent remplacer l'échange direct. C'est pourquoi notre management est organisé de façon à éviter toute rupture de communication et d'information. Nous organisons, ainsi, de nombreuses réunions, des groupes de travail afin que, au moins une fois par mois, le consultant retrouve ses collègues et son supérieur ». Ensuite, au quotidien, il est épaulé par des outils, en particulier des applications métiers qui le guident dans ses activités. « Ces bases documentaires et techniques en réseau sont autant de référentiels qui permettent à chaque salarié de travailler selon des règles communes, pour une cohérence de l'ensemble de nos prestations », ajoute-t-il.

Reste que les entreprises ne peuvent lâcher dans la nature une partie de leur personnel sans opérer un suivi régulier de leur travail. D'où les nécessaires reporting et les fameuses réunions du début de semaine. « Chaque lundi, les délégués commerciaux font un point quantitatif et qualitatif avec leur directeur régional. Ils rendent compte de leur semaine passée, des rendez-vous effectués, du nombre de commandes enregistrées, de la situation de la concurrence locale », énumère Christophe Blond.

Même exercice chez Chubb Sécurité. « Le lundi matin, le chef d'agence reçoit ses commerciaux, regarde où ils en sont par rapport à leurs objectifs (un commercial doit organiser une quinzaine de rendez-vous par semaine, NDLR), puis rédige un compte-rendu de la réunion qu'il leur adresse en retour », signale Jérôme Soltani. Les consultants de la Sodie, pour leur part, reportent au quotidien l'évolution de leur prestation sur le réseau. Autant de données qui viendront alimenter le reporting mensuel ou semestriel adressé, ensuite, aux clients. L'enjeu du suivi est donc de taille.