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QUEL AVENIR POUR LES SALARIES ?

SANS | publié le : 26.11.2002 |

Opportunité commerciale pour les uns, régression sociale pour les autres, l'ouverture à la concurrence des entreprises publiques cristallise de nombreuses inquiétudes. En premier lieu : l'avenir des régimes de retraite et l'épineuse question des statuts des personnels.

D' EDF à GDF, en passant par la SNCF, La Poste et la RATP, c'est pratiquement tout le secteur public qui est appelé à manifester, ce mardi 26 novembre, à Paris et dans plusieurs villes de France, à l'appel de FO, pour défendre l'emploi, les retraites et les services publics.

La centrale de Marc Blondel sera rejointe par la CGT, Sud, la CFTC et la CFDT. Il s'agit, en fait, de la seconde mobilisation, puisque le 3 octobre dernier, le secteur public avait déjà manifesté. L'approche des élections prud'homales, qui auront lieu le 11 décembre prochain, n'est pas étrangère à cette surenchère revendicative. Mais c'est surtout l'ouverture à la concurrence des marchés publics qui cristallise toutes les inquiétudes (la privatisation n'étant pas, pour l'heure, à l'ordre du jour).

De fait, le compte à rebours a commencé pour les monopoles d'Etat. Initiée par les traités européens, de la signature du traité de Rome, en 1957, à celle du traité de Barcelone en début d'année, la déréglementation commence, à divers degrés, à faire sentir ses premiers effets.

France Télécom en première ligne

France Télécom a joué les défricheurs. Dès 1996, l'opérateur de téléphonie a dû faire face à l'arrivée de multiples concurrents comme Bouygues et Cegetel. Le mouvement s'est ensuite poursuivi avec La Poste, qui a été confrontée à la concurrence des messageries et des entreprises de plis express.

Une nouvelle étape sera franchie, en 2003, avec la SNCF (pour le fret), puis, en 2006, pour EDF. C'est aussi à cette date que la Poste subira sa véritable mutation, puisque le seuil du domaine réservé pour le courrier sera abaissé à 50 g. GDF, de son côté, a déjà anticipé la déréglementation, car, si la directive européenne prévoyait l'ouverture des marchés du gaz en août 2000, le texte ne devrait être transposé en droit français qu'en fin d'année.

Faire face aux mutations

Comment faire face à ces mutations ? Se hisser au niveau mondial et, surtout, adapter les compétences des personnels aux mutations qui se dessinent ? La question hante les directions des ressources humaines des entreprises publiques supposées engager le changement. Le spectre des grandes grèves de 1995, qui ont paralysé la France, est toujours tenace. Les déboires de France Télécom et ses pertes abyssales n'encouragent pas les plus rétifs.

Aucune directive européenne n'oblige, cependant, les monopoles d'Etat à changer de statut. Mais comment jouer la pérennité de ces entreprises avec des règles du jeu complètement différentes ? L'ouverture à la concurrence suppose un changement de stratégie, calquée davantage sur le modèle des concurrents européens - la plupart étant privés - et susceptible de remettre en cause un certain nombre d'acquis sociaux qui font leurs spécificités.

L'un des premiers motifs d'inquiétude des salariés concerne la remise en cause des statuts des personnels (fonctionnaires comme à France Télécom, La Poste, salariés "sous statut", comme à EDF, à GDF, à la SNCF...) offrant l'emploi à vie.

Emploi de contractuels

D'ores et déjà, plusieurs entreprises ont fait le choix de recruter des contractuels au sein de leur équipe, un moyen de contourner la lourdeur du statut et de favoriser en douceur la modernisation de l'entreprise. C'est, par exemple, la stratégie de La Poste, qui prévoit, désormais, 80 % de contractuels dans ses futures embauches alors qu'ils représentaient à peine 15 % des effectifs il y a quinze ans.

Dossier ultra sensible

Autre dossier ultra sensible dans la perspective d'un changement de statut : les retraites. Comme pour la fonction publique, la plupart des monopoles d'Etat ont un régime spécifique, limité à 37,5 annuités de cotisation (contre 40 années pour les salariés de droit commun). Pour les directions, cette question représente, par exemple, une charge à venir de 3 milliards d'euros, en 2010, pour EDF, de 3,38 milliards d'euros, en 2015, pour La Poste. Sur ce point, EDF-GDF est entré dans le vif du sujet en lançant, en septembre dernier, un groupe de réflexion patronat-syndicats. Une négociation qui aura valeur de test pour le gouvernement, dans la perspective de la réforme d'ensemble des régimes de retraite, qui s'ouvrira, en février prochain.

Grève des postiers

La déréglementation pourrait également conduire, de l'avis des salariés, à une réduction drastique des coûts et des effectifs. Premiers signes ? La grève des postiers, à l'appel des fédérations CGT, FO et Sud, en octobre dernier, qui voulaient donner l'alerte sur le futur plan de modernisation de la chaîne de production du courrier, en 2002-2005, avec, à la clé, la suppression de la moitié des centres de traitement.

« Le malaise est réel, s'inquiète Bernard Saincy, secrétaire national de l'Ugict-CGT. On assiste à une véritable souffrance de l'encadrement. Les cadres n'ont plus aucune visibilité sur le projet industriel ni sur l'emploi. »

Pour tirer parti, d'une façon ou d'une autre, de ce défi européen, il faudra cependant aller de l'avant. Plusieurs entreprises se sont, d'ailleurs, engouffrées dans la brèche du changement. Refonte des classifications chez France Télécom et à La Poste, vaste opération de consultation interne à la SNCF, groupes de travail sur les retraites à EDF... Pas à pas, elles cherchent à moderniser leur structure, en recherchant, le plus souvent, l'aval des syndicats qui comptent bien peser de tout leur poids dans le débat. C'est, en tous cas, le message de ce 26 novembre.

L'essentiel

1 A l'appel de FO, la plupart des syndicats des entreprises publiques vont manifester, ce 26 novembre, pour la défense du service public, l'emploi et les retraites. Ils craignent qu'avec l'ouverture à la concurrence, un certain nombre d'acquis sociaux soient remis en cause.

2 Les directions des ressources humaines des entreprises publiques arrivent en première ligne. Elles doivent initier le changement, avec, à la clé, l'adaptation des compétences des personnels.

3 Les entreprises cherchent à jouer le dialogue social pour anticiper les mutations à venir.