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Crise de confiance chez les salariés

SANS | publié le : 22.10.2002 |

Huit mois après l'annonce de la suppression de 416 emplois en France, Gemplus, l'ex-enfant prodige de l'électronique française, traverse une crise interne sans précédent. Et les syndicats crient au pillage d'un savoir-faire technologique développé avec des aides publiques.

Le plan présenté par le leader mondial de la carte à puce, le 5 février dernier, n'avait surpris personne. Compte tenu des mauvais résultats du groupe, qui employait alors 6 721 personnes dans le monde, dont plus de 3 100 en France, les salariés avaient anticipé l'annonce. De fait, le groupe venait d'enregistrer une perte nette de 100 millions d'euros pour l'année 2001, après un bénéfice net de 99 millions d'euros en 2000. Sur la même période, subissant le ralentissement de l'industrie des télécommunications mobiles, les ventes de Gemplus se sont effondrées de 15 %.

Appel au volontariat

Le 15 juin, le plan social est donc bouclé. Le site de Sarcelles (Val-d'Oise), spécialisé dans la personnalisation bancaire, qui emploie 100 salariés, est fermé et 285 postes sont supprimés au siège du groupe, à Gémenos, près de Marseille. Le plan fait appel au volontariat. Les candidats au départ doivent être sélectionnés sur la base d'un projet personnel ou professionnel et bénéficient, outre des indemnités légales de licenciement, de six à seize mois de salaire brut pour les cadres et assimilés, et de 18 500 à 35 500 euros pour les non-cadres, selon l'ancienneté. Le plan prévoit, également, la mise en place d'une antenne emploi pour une période de six mois, des mesures de passage à temps partiel, avec compensation de salaire et de reclassement interne, des aides financières à la reprise d'étude, à la création ou à la reprise d'entreprise et des aides à l'embauche pour le futur employeur.

Trop de candidats

Un plan relativement attractif, qui a pour conséquence de susciter trop de candidatures. Sur Gémenos, 350 salariés se sont portés volontaires. Seuls 250 ont été retenus. La direction reste discrète sur leur sort. « Le plan est en cours. Gemplus ne souhaite pas communiquer pour l'instant, alors que les gens sont dans des états de grande inquiétude. Nous pouvons juste indiquer que 33 personnes ont déjà créé ou repris une entreprise », explique Sylvie Brunet, directrice de projet de l'antenne emploi, qui a été confiée au cabinet Garon Bonvalot et restera ouverte jusqu'en février 2003.

La prudence de la direction contraste avec le commentaire des organisations syndicales. « Le plan se déroule bien, toutes les personnes qui ont quitté l'entreprise le désiraient », indique Franck Casalini, délégué du personnel et porte-parole du syndicat maison USG. « Les résultats apparaissent, pour l'instant, positifs », estime Ismaël Chinchilla, pour FO. Selon le syndicat, 50 à 60 personnes seraient actuellement prises en charge par l'antenne emploi. Une solution aurait déjà été définie pour le reste des licenciés : reprise d'études, entrée en formation ou embauche en CDI.

Gemplus ouvrira, par ailleurs, début novembre, le deuxième volet du plan social, qui concerne exclusivement les opérateurs de production. Un maximum de 35 candidatures au départ sera accepté. « Il y aura certainement suffisamment de volontaires, pense Ismaël Chinchilla. Le package financier et les mesures d'accompagnement expliquent, en partie, cet afflux de candidatures. Mais une immense perte de confiance dans l'entreprise en est aussi à l'origine. »

Soupçon de pillage

Et c'est là le coeur de l'histoire, dont les licenciements ne sont que la partie immédiatement visible. Des soupçons de pillage technologique pèsent sur l'entreprise et son actionnaire principal, TPG (Texas Pacific Group), un fonds d'investissement américain, entré au capital, en 1999, à la demande du fondateur Marc Lassus. « Gemplus est assis sur une mine d'or, explique Dominique Blanc, de l'Union départementale FO des Bouches-du-Rhône. La carte à puce est un domaine où l'industrie américaine n'est pas en pointe, alors que cette technologie est en passe de devenir un élément clé de l'industrie de la sécurité. On se pose des questions sur la nomination récente, au poste de directeur général du groupe, d'Alex Mandl, candidat de TPG et membre de la CIA jusqu'alors. »

Les syndicats et une partie de l'encadrement de Gemplus sont convaincus que TPG a pour mission de transférer, aux Etats-Unis, le savoir-faire technologique du groupe français, alors que celui-ci a été développé grâce à plus de 10 millions d'euros d'aides publiques directes et indirectes. Une hypothèse qui mérite certainement d'être prise au sérieux, alors que Bercy, via la DVNI (Direction des vérifications nationales et internationales), enquête depuis plus d'un an sur le transfert opaque du siège juridique de Gemplus au Luxembourg, via la création du holding Gemplus International SA.

Principales mesures du plan social

Outre les indemnités légales de licenciement, six à seize mois de salaire brut pour les cadres et assimilés ; et de 18 500 à 35 500 euros pour les non-cadres, selon l'ancienneté.

Antenne emploi pour une période de six mois.

Mesures de passage à temps partiel avec compensation de salaire.