logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

SANS

Corsaires et flibustiers

SANS | publié le : 17.09.2002 |

Lecture de vacances.

Je sors du dernier bouquin de Jean-François Deniau, Dictionnaire amoureux de la mer, un délice, de quoi se réconcilier avec l'Académie française. (Pour ceux qui seraient brouillés avec ces vieux messieurs. Ce n'est pas mon cas. Je dois devenir vieux moi aussi...)

On y rappelle, notamment, la différence essentielle entre les corsaires et les flibustiers : les corsaires travaillent en pleine complicité avec l'autorité qui leur délivre une "lettre de course". L'autorité en question, en réalité, c'est le Roi lui-même, qui cherche à compléter ses armées officielles par des équipes plus mobiles, plus hardies, et, finalement, tout à fait fiables, quitte à partager les profits bassement matériels issus des exploits maritimes desdits corsaires. Ainsi sont servis au mieux les intérêts stratégiques du pays et les ambitions matérielles des corsaires. Mais attention, il y a des règles :

1. Le corsaire travaille "à ses frais". Il choisit son bateau, son équipage, et investit son propre argent.

2. On travaille avec habileté, mais sans ruse : à visage découvert, pavillon haut, dans l'honneur.

3. On applique les règles du partage, telles qu'elles sont consignées dans la "lettre de course", qui engage les deux parties. C'est le prix de la protection du Roi. Une espèce de contrat de franchise, en réalité.

Le flibustier, lui, travaille entièrement "à son compte". Il attaque tout ce qui passe, sans distinction (on a même vu des corsaires attaqués par des flibustiers. On voit la scène...). Oh, bien entendu, c'est un métier qui demande également beaucoup d'habileté, de sens tactique, et d'esprit d'aventure. Mais les profits ne sont pas partagés. Tout pour le flibustier. Le Roi de France ? Connais pas. Si on est pris, on est pendu. Haut et court. Et personne pour vous défendre.

Bon. C'est intéressant. Mais quel est le rapport avec le management ? J'y viens.

La question est évoquée lorsqu'un directeur commercial m'interroge sur les différents contrats de représen- tation commerciale.

« Vous comprenez, la compagnie entretient des espèces de sénateurs qui ronronnent doucement en exploitant leur rente de situation. Et, pendant ce temps, nous sommes abandonnés par les plus talentueux de nos jeunes vendeurs, qui rejoignent nos concurrents où leur sont proposées des rémunérations plus attractives. Et pour compenser, me voilà obligé de faire mon complément de chiffre d'affaires avec des saltimbanques (c'est son mot) qui ne respectent aucune règle et me naufragent mon fonds de commerce. Comment faire ? »

Faites comme notre bon Roi de France !

Méfiez-vous des armées régulières : ils préfèrent tous finir marquis d'état-major plutôt que d'aller ferrailler sur le terrain.

Complétez vos équipes avec de bons corsaires, bien mandatés, mais surveillez-les du coin de l'oeil : de temps à autre, ils sont tentés de dissimuler leur butin...

Fuyez comme la peste les flibustiers. Ils vous font mille sourires par devant et vous attaquent par derrière.

Et animez le tout : c'est dans l'animation que réside le succès !