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Reclassement et nostalgie

SANS | publié le : 21.05.2002 |

Cinq ans après la fermeture de l'usine Renault à Vilvorde, dans la banlieue bruxelloise, le bilan du reclassement est plutôt satisfaisant. Mais tous les salariés licenciés n'ont pas encore fait le deuil de l'entreprise.

Si l'usine rouvrait demain ? 2 000 ex-salariés reviendraient pointer. » Pour Raymond Smeulders, délégué syndical des ouvriers de la FGTB, la centrale socialiste de Rib (Renault Industrie Belgique), cela ne fait aucun doute. Cinq ans après la fermeture de l'usine Renault, dans la banlieue flamande de Bruxelles, à Vilvorde, qui avait soulevé la colère et l'indignation de part et d'autre de la frontière franco-belge, la nostalgie reste bien présente chez les ex-ouvriers de l'entreprise au losange. Un grand rassemblement sera ainsi, organisé, en septembre prochain, avec tous les ex-Renault, au siège même de l'entreprise, avec les syndicats européens. Histoire de montrer que le lien social reste bien présent.

50 cas sans solution

Certes, depuis 1999 (les salariés ont eu deux ans pour se reclasser), la vie active a repris ses droits. Le programme de reclassement s'est plutôt bien passé. « Seule une cinquantaine des 3 097 an- ciens salariés de Renault Vilvorde restent sans solution, mais uniquement pour des raisons personnelles », poursuit Karel Gacoms, secrétaire provincial de la FGTB qui a suivi l'ensemble du dossier. Difficile toutefois de retrouver la trace de tous les ex-salariés. « Certains nous appellent parfois, poursuit Raymond Smeulders. Il nous arrive toujours de reclasser des personnes. »

Bilan de deux ans

Quelques éléments de repère existent cependant. Les plus de 50 ans sont, aujourd'hui, en préretraite. 400 personnes, les salariés plus âgés et ceux qui avaient le plus d'ancienneté, ont été repris par RIB, sous statut Renault, devenu aujourd'hui fournisseur exclusif en pièces détachées (tôlerie, échappements).

Les plus jeunes, eux, ont trouvé un travail à l'extérieur, en CDI pour la plupart. Une centaine est allée chez Volkswagen Bruxelles ; une autre centaine chez Van Hool (constructeur de cars flamand), 66 ont été recrutés chez Moorkens Diffusion (matériel de bureau) qui s'est installé sur le site laissé par Renault. En revanche, AnAlu, spécialisée dans l'aluminium, n'est jamais venue à Vilvorde, contrairement à ses engagements.

Les autres salariés ont changé de secteur, ils travaillent aujourd'hui dans le textile, le transport, le BTP... Ils sont devenus caristes, magasiniers, soudeurs, ma- çons ou agents de surveillance ; 660 personnes ont reçu une formation, soit au total 155 278 heures de reconversion. « En 1999, le marché du travail redevenait plus favorable, se souvient Karel Gacoms, surtout à Vilvorde, où le taux de chômage était le plus bas du pays. Et les "Ribiens" ont bénéficié d'un capital sympathie très important chez les autres employeurs. »

Mais tous n'ont pas fait le deuil de l'entreprise. « Après quelques années, certains étaient prêts à redonner leur prime de départ (23 000 euros en moyenne) pour être employé à nouveau par Renault », rappelle Gino Winjs, délégué syndical pour le collège cadres. Car si les "Rib" ont gardé le salaire et les primes d'ancienneté du constructeur français, les autres ont accusé une chute de leur revenu de « 40 % environ », selon les syndicats.

Les préretraités perçoivent, quant à eux, une pré-pension d'environ 45 % de leur salaire antérieur brut.

Expérience de la flexibilité

Surtout, pour la plupart, les conditions de travail ne sont plus les mêmes. Tous n'ont pas retrouvé un emploi à la hauteur de leurs compétences et tous ont fait l'expérience de la flexibilité.

« Nous sommes passés d'une grande entreprise à une PME à l'avenir incertain, indique Raymond Rötte, DRH de RIB. On vit dans un environnement qui peut changer d'un moment à l'autre. ça a demandé un grand effort d'adaptation. Les délais sont plus courts, la production varie au gré des commandes. Les ouvriers ne bénéficient plus du service de bus mis en place par le constructeur français (certains habitant à 80 km de l'entreprise) et les jours de congé sont planifiés 14 jours à l'avance (deux mois auparavant avec Renault). Surtout, des craintes pèsent sur l'usine, toujours dans le rouge. »

Optimiser les coûts salariaux

C'est pourquoi la direction et la FGTB viennent de signer un protocole d'accord destiné à "optimiser" les coûts salariaux. Concrètement, les augmentations générales décidées au niveau national par les branches professionnelles, chaque année, sont gelées pour 2002 et 2003. Les tickets-restaurant et les primes au transport ont également été réduits : « Cela correspond à une baisse d'environ 5 % à 6 % des salaires. » Un accord définitif devrait être signé, fin mai, qui inclurait également les cadres.

L'objectif ? « Nous avons toujours les salaires de la branche automobile. Mais aujourd'hui, nous sommes sous-traitants et nos salaires doivent s'aligner sur ce dernier secteur. Sinon, on perd notre compétitivité, ex- plique Raymond Smeulders. Le plus important est de maintenir l'emploi et de rendre cette activité pérenne. Au départ, beaucoup pensaient qu'il ne s'agissait que d'une activité provisoire. Or, aujourd'hui, notre carnet de commandes est assuré jusqu'en 2010 avec une baisse de l'activité en 2007. » La survie est à ce prix-là.

LE BILAN RENAULT VILVORDE

Personnes licenciées: 3 097.

Reprises par Renault Industrie Belgique : 400 (dont 344 ouvriers).

Reprises par Moorkens Diffusion : 66.

En pré pension : 654.

Emplois : 600 dans la métallurgie, 40 dans la construction, 18 dans le transport.

Sans solution : 50.