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Le dialogue social au coeur du débat électoral

SANS | publié le : 22.01.2002 |

A l'occasion de son congrès exceptionnel, le Medef a adopté neuf résolutions qu'il compte soumettre aux candidats à l'élection présidentielle. Le mouvement plaide pour un "nouveau cadre législatif et constitutionnel pour refonder le dialogue social".

C'est devant près de 2 000 chefs d'entreprise réunis au Palais des congrès de Lyon, le 15 janvier dernier, que le Medef a fait la synthèse des propositions de réforme élaborées durant son "Tour de France" en sept forums régionaux. Présentées par Denis Kessler, vice-président délégué du Medef, au cours de trois tables rondes, neuf résolutions ont été adoptées par vote électronique à plus de 90 % des voix pour la quasi-totalité d'entre elles.

Sur les thèmes de la protection sociale, de la formation, du travail ou encore de la fiscalité, c'est à un véritable "droit d'ingérence" qu'Ernest-Antoine Seillière, président du Medef, a exhorté ses troupes. « Nous considérons que c'est notre devoir de participer au débat public, de faire entendre la voix des entrepreneurs », a-t-il déclaré, alors que cette prise de parole dans le cadre de la campagne présidentielle est loin de faire l'unanimité. « Nous ne voulons pas être en débat avec les politiques. C'est à eux de débattre, entre eux, de nos propositions. Et s'ils l'oublient, nous leur rappellerons qu'il y a des sujets sur lesquels ils doivent nous dire ce qu'ils comptent faire », a précisé Ernest-Antoine Seillière.

Nouvelles règles du jeu

Parmi ceux-ci, quatre domaines nécessitent, d'après le président du Medef, la définition de nouvelles règles : le régime des prélèvements obligatoires, la protection sociale, la formation et, avant tout, le dialogue social. L'organisation plaide ainsi pour une nouvelle hiérarchie des normes et un renforcement du rôle de la négociation d'entreprise, « au plus loin du ministre ». « A la loi l'ordre public, y compris, éventuellement, la durée hebdomadaire maximale du travail, et aux partenaires sociaux l'application sur le terrain », a résumé Denis Gautier-Sauvagnac, vice-président délégué général de l'UIMM et membre du conseil exécutif du Medef. Ajoutant que « le gouvernement se serait évité bien des déboires avec le Conseil constitutionnel s'il n'était pas entré autant dans les détails dans sa loi de modernisation sociale ». Le Medef réclame encore l'émergence d'un syndicalisme plus fort, plus actif et plus responsable, grâce à l'élaboration de nouvelles règles de représentativité. Ainsi que la possibilité pour les PME de conclure des accords d'entreprise, en l'absence de délégués syndicaux, avec les élus du personnel.

Il reste que ces voeux ne semblent pas encore faire l'unanimité au sein de l'organisation. A l'occasion d'une intervention sur l'actionnariat salarié, Serge Dassault, président de Dassault aviation, s'est ainsi félicité de la relation plus directe avec les salariés qu'il permet : « Dans les entreprises qui fonctionnent comme cela, il n'y a plus de grève, les syndicats n'ont plus d'influence... »

Manifestation

Par ailleurs, la cinquième résolution, relative au dialogue social, est celle qui a été adoptée avec le moins bon score : 87 % des voix pour, 4 % contre et 9 % d'abstentions. « Nous sommes, en matière de refondation sociale, assez exigeants vis-à-vis des syndicats, mais aussi vis-à-vis des entrepreneurs, a alors averti Ernest-Antoine Seillière. Et même si ceux-ci ont été soumis pendant des décennies à la règle extérieure, ils doivent maintenant se mettre activement au dialogue social. »

Le thème a également mobilisé à l'extérieur du Palais des congrès, où plusieurs milliers de manifestants (12 000 selon les syndicats, 7 000 selon la police) de la CGT, de la CFDT, de la FSU, de l'Unsa et du Groupe des Dix ont défilé derrière Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT. « Le projet politique du Medef est de faire voler en éclats les garanties collectives, a expliqué Annick Coupé, porte-parole du Groupe des Dix. Le Medef défend les intérêts du patronat, qu'il ne nous fasse pas croire qu'il défend les intérêts de la société civile. »

Les salariés connaissent mal la définition du dialogue social

La surprise. Telle est la réaction des salariés lorsqu'on les interroge sur le dialogue social dans leur entreprise. « Le terme n'est pas entré dans leur vocabulaire. Si on leur en demande une définition, ils évoquent avant tout une relation directe, sans intermédiation, entre le chef d'entreprise ou le DRH et eux-mêmes », précise Hélène Valade-Thong, directrice du département Opinion publique à l'Ifop, qui a réalisé pour le compte de l'association RDS (Réalités du dialogue social) une enquête qualitative sur ce thème, rendue publique le 14 janvier dernier à l'occasion d'un colloque sur "l'avenir du dialogue social". Les salariés reprochent également aux syndicats leur manque de visibilité, tout en manifestant une ignorance des mécanismes de la négociation collective en entreprise. Quant aux DRH, « leur définition spontanée du dialogue social est très proche de celle des salariés », souligne Hélène Valade-Thong. Ils dénoncent en outre le formalisme de la négociation collective, et affirment privilégier le dialogue informel avec les syndicats, en dehors des instances représentatives, et la consultation directe des salariés par référendum.

Les bémols de Francis Mer

Invité à s'exprimer sur son thème de prédilection, la formation, le patron d'Usinor, Francis Mer, en a profité pour ajouter sa (fausse) note personnelle à la belle harmonie du congrès. Il a tout d'abord fustigé la méthode de vote, trop expéditive à son goût : « Avant de voter une résolution, il faut la lire et la méditer. Nous votons contre notre camp en procédant de cette manière. » Et, interrompu par Ernest-Antoine Seillière qui lui rappelait que ces résolutions étaient le résultat des réflexions menées lors des forums régionaux, a répondu : « Personnellement, je ne les connaissais pas. Ce qui prouve qu'il y a un problème de communication. » Il a ensuite tenu à rappeler à ses confrères, qui venaient d'applaudir une charge contre les 35 heures, quelques vérités économiques simples : « La raison économique de base, c'est de faire toujours plus avec moins. C'est-à-dire de réduire le temps de travail en augmentant le niveau de vie. »