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Insertion : Le long chemin vers l’emploi

Le point sur | publié le : 04.07.2022 | Nathalie Tissot

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Insertion : Le long chemin vers l’emploi

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Organisé par la chambre de commerce et de l’industrie et la ville de Paris à l’occasion de la journée mondiale des réfugiés, un forum pour leur insertion professionnelle a attiré des centaines d’exilés. Reportage.

Ce 21 juin, une queue s’étend sur des dizaines de mètres à l’entrée de la Maison des réfugiés, boulevard Jourdan. À l’intérieur, des structures d’accompagnement et de formation ainsi qu’une quinzaine d’entreprises tiennent des stands bondés. Une traductrice tente d’orienter les participants, en majorité des Ukrainiens, qui bénéficient d’une protection temporaire leur permettant de travailler sans attendre d’obtenir le statut de réfugié.

« Le plus gros problème, c’est que nous devons parler français, or cela prend beaucoup de temps d’apprendre », regrette Diana dans un anglais parfait. Casquette vissée sur la tête, la jeune femme de 27 ans était éditrice pour une chaîne de télévision ukrainienne. Pour les recruteurs, cependant, la langue n’est pas toujours une barrière infranchissable. Véronique Mouly, DRH et responsable administrative et financière au Creuset d’Art, a déjà calé six entretiens. L’entreprise spécialisée dans la fabrication de bijoux fantaisie, rachetée à 51 % par Chanel, a doublé ses effectifs en un an et cherche encore à recruter. « Sur 70 salariés, nous avons une douzaine de nationalités différentes. Certains ne maîtrisent pas le français, mais nous nous débrouillons. Ce sont des gestes manuels, nous leur montrons comment faire », explique-t-elle. Même constat pour Laëtitia Blanc, directrice du développement RH chez Ducasse Paris, où 90 postes sont à pourvoir en vente et en restauration, mais aussi en production, en logistique et en conditionnement dans les manufactures de chocolats, de glaces et bientôt de biscuits. Plus d’une quinzaine de personnes ayant le statut de réfugié travaillent déjà pour la Maison Ducasse. Depuis avril, trois personnes venant d’Ukraine ont également été embauchées. « Nous avons été attentifs à sensibiliser les managers qui les accueillaient afin que l’intégration se passe le mieux possible et avec beaucoup de bienveillance », précise Laëtitia Blanc.

Si les candidats à l’emploi se sentent forcément mieux en France que dans leur pays d’origine, « c’est quand même du stress tous les jours, nous n’avons aucune idée de ce que sera l’avenir », soupire Héléna, 33 ans, CV sous le bras. Elle vit avec une amie depuis trois mois dans une famille, mais ce n’est que temporaire. Comptable et philologue en littérature russe, les deux femmes cherchent « juste un travail », disent-elles, conscientes qu’elles n’auront pas forcément d’opportunités dans leur domaine de compétences. Un déclassement qui est souvent difficile à vivre. « Je travaillais à l’université et dans l’immobilier, mais ici, trouver dans ces secteurs est impossible, c’est trop sélectif, déclare Irène. Je change de famille toutes les deux semaines avec ma mère, c’est difficile, d’autant qu’en Ukraine, j’avais deux beaux appartements et une grande maison. Aujourd’hui, je vis quasiment comme une sans-abri », déplore la quadragénaire.

Les entreprises intéressées sont conscientes de ces difficultés psychologiques. « Nous n’avons reçu qu’un CV avec une expérience dans notre branche, relève Mélanie Bresson, directrice réseau de Domi Ménage. Nous nous doutons bien que c’est compliqué de passer d’un poste d’ingénieur dans son pays d’origine à du ménage et du repassage en France… » Comment faire alors ? « Il faut mettre en adéquation les personnes qui recherchent un emploi et les offres que nous avons, répond Anne-Clarisse Naphetat, cheffe de projet du club de Paris Les entreprises s’engagent. C’est un gros travail. »

Auteur

  • Nathalie Tissot