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Le fait de la semaine

Insertion professionnelle : Nouvelle donne pour les stages

Le fait de la semaine | publié le : 15.11.2021 | Irène Lopez

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Insertion professionnelle : Nouvelle donne pour les stages

Crédit photo Irène Lopez

Près de 80 % des étudiants n’ont pas pu effectuer leur stage dans les conditions habituelles cette année. Face à l’inquiétude des jeunes quant à leur insertion professionnelle, les universités ont assoupli les règles. Une région a même mis la main à la poche pour venir en aide aux stagiaires.

D’habitude, la journée internationale des stagiaires, le 10 novembre, est l’occasion d’enjoindre les entreprises à respecter la loi sur les gratifications et à veiller à offrir des conditions de travail convenables… Mais cette année, les conséquences de la crise sanitaire éclipsent ces demandes. Selon l’Observatoire de la vie étudiante, en 2020, 78 % des étudiants ayant prévu un stage n’ont pu le réaliser dans les conditions initiales. Sésame pour l’obtention du diplôme, le stage est également un incontournable fait d’armes pour être recruté par une entreprise. L’enjeu de l’employabilité a donc pris une dimension forte et certains s’inquiètent de voir arriver sur le marché du travail une génération de jeunes sans aucune expérience préalable… De fait, les stages ont été particulièrement compliqués ces derniers mois.

Étudiant en sciences et technologies, Ulysse, 23 ans, a ainsi effectué son stage de troisième année universitaire par écran interposé. « Je n’ai jamais rencontré ma responsable de stage, soupire-t-il. Le seul échange que j’ai eu avec elle a été lors d’une visioconférence avec l’ensemble de l’équipe. Et certains n’avaient pas mis leur caméra en route. Je ne connaissais donc pas leur visage… Je n’avais déjà pas apprécié les cours à distance. Le stage a été une horreur. » Ce jeune homme fait pourtant partie des « chanceux » qui ont réussi à obtenir un stage en 2020.

Selon la Dares, l’année dernière, le nombre d’entrées en stage ayant fait l’objet d’une déclaration par les entreprises a été de 225 000, après 289 000 en 2019, soit une baisse de 22 %. En 2019 comme en 2018, le nombre d’entrées avait augmenté régulièrement (+ 4 % par an). Cette forte diminution s’explique quasi intégralement par l’effondrement des entrées en stage durant le premier confinement, de mars à mai, période durant laquelle elles sont habituellement très nombreuses. La baisse est de 24 % en mars 2020 par rapport à la même période en 2019, de 87 % en avril et 50 % en mai. Toujours selon la Dares, les moins de 20 ans sont les plus concernés par la baisse (-39 % d’entrées en stage par rapport à 2019). Viennent ensuite les plus de 25 ans (-17 %). Le repli est plus limité (-13 %) pour les 21-25 ans qui représentent le plus grand nombre de stagiaires (160 000 par an en moyenne sur les trois dernières années). La baisse concerne tous les secteurs, à l’exception de celui de la santé et de l’action sociale, où le nombre d’entrées en stage augmente de 16 %. Le plus fort recul se situe dans l’hébergement et la restauration (– 50 %, pour atteindre 6 700 en 2020). Il est plus modéré dans l’industrie manufacturière (– 29 %) et le commerce (– 26 %), qui représentent chacun 40 000 entrées en stage par an en moyenne en 2018 et 2019. Les autres secteurs de services résistent un peu mieux : – 18 % pour l’information-communication, – 16 % pour les activités financières, – 15 % pour les activités spécialisées, scientifiques et techniques (principal secteur employant des stagiaires, avec 64 000 entrées par an en moyenne en 2018 et 2019).

Alternatives

La loi de 2014 sur l’encadrement des stages limitant habituellement le télétravail pour les stagiaires, les écoles ont dû s’adapter à cette situation exceptionnelle. Nombre d’entre elles ont ainsi pris contact avec les stagiaires et les tuteurs pour modifier les conventions de stage et autoriser temporairement une nouvelle organisation à base de relations à distance. Une initiative qui n’a pas pour autant résolu tous les problèmes. « Ma responsable m’avait prévenu : je devais trouver une nouvelle façon de travailler. Mais je ne connaissais même pas l’ancienne !, s’agace Ulysse. Qu’est-ce que j’étais censé faire à part envoyer des mails ? Les professeurs nous parlaient du stage comme une expérience valorisante sur le plan professionnel. Dans mon cas, je n’y ai trouvé aucune valeur. Je suis plutôt inquiet à l’idée de devoir exposer à un recruteur ce que j’ai appris pendant mon stage. »

Quant aux jeunes qui ont été carrément privés de stages, le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et les établissements d’enseignement supérieur ont procédé à un certain nombre d’assouplissements pour qu’ils ne soient pas pénalisés. Outre la possibilité de réaliser les stages à distance, les étudiants peuvent les effectuer dans un autre domaine que le leur. De même, des modules compensatoires et des « situations professionnelles » ont été mis en place dans les établissements. Enfin, l’année universitaire a été allongée jusqu’au 31 décembre 2021 pour permettre la réalisation d’un stage. Et d’autres dispositifs ont été validés en guise d’alternatives. C’est ainsi le cas du projet tutoré, du bénévolat, de l’entrepreneuriat, du service civique… et même des réserves ! Les étudiants peuvent en effet venir en renfort hospitalier, par exemple, dans le cadre de la réserve sanitaire. En outre, faire des exposés dans les écoles sur le harcèlement afin de sensibiliser les jeunes fait également partie des missions de la réserve citoyenne et peut faire l’objet d’un stage. L’université de Lille a d’ailleurs encouragé ses étudiants à s’y inscrire. Idem pour la réserve civile et la réserve militaire, où les étudiants peuvent participer à un périmètre de sécurité lors d’accidents ou aider à secourir des populations sinistrées en cas de catastrophes naturelles.

Incitation aux entreprises

Les collectivités territoriales ont également incité les entreprises à prendre des stagiaires. Ainsi, en Champagne, la métropole Troyes Champagne a mis en place dès la rentrée de septembre 2021, en partenariat avec le Conseil départemental de l’Aube, un dispositif d’aide au financement de l’ordre de 30 000 euros pour les stages de longue durée (quatre à six mois), consistant en un financement partiel de la gratification due aux étudiants. Et le 18 novembre prochain, l’Avuf (Association des villes universitaires de France) organise, en partenariat avec la CPU (Conférence des présidents d’université), la CGE (Conférence des grandes écoles) et la CDEFI (Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs), une journée dévolue à l’évaluation et à l’évolution des stages dans le parcours étudiant. Les retours d’expériences, notamment autour du déroulement des stages à distance, font partie du programme de cette septième édition. Étudiants et entreprises sont invités à y participer.

Auteur

  • Irène Lopez