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« Il faut passer à la génération mentors-mentorés » (Benjamin Blavier et Boris Walbaum, Article 1)

Le point sur | publié le : 11.10.2021 | Irène Lopez

 

Chaque année depuis plus de quinze ans, l’association Article 1 accompagne près de 2 000 binômes mentors-mentorés. Avec le lancement récent de sa plateforme DEMA1N.org, elle dispose désormais des moyens et de l’expertise nécessaires pour former et accompagner 20 000 binômes. Un changement d’échelle financé par le gouvernement à travers son plan « 1 jeune, 1 mentor ». Alors que le mentorat est passé des directions RSE aux DRH, Benjamin Blavier et Boris Walbaum, cofondateurs et coprésidents d’Article 1, décrivent les enjeux.
 
Concrètement, qu’est-ce que la plateforme DEMA1N.org ?

Benjamin Blavier : DEMA1N.org est la seule plateforme digitale, facile d’accès et gratuite, pensée pour rendre le mentorat accessible à tous. En quelques clics, le mentor et l’étudiant remplissent leur profil. Ils suivent un petit module de formation. Mentor et mentoré sont ensuite « matchés » par les équipes d’Article 1 en fonction de la concordance des besoins de l’étudiant et des compétences du mentor. Des éléments tels que des hobbys en commun peuvent être pris en compte, pour faciliter la relation. Chaque binôme est ensuite libre de s’organiser comme il le souhaite : échanges en visio, en présentiel, par mail… On estime à trois heures par mois la durée moyenne d’accompagnement. En cas de besoin, les équipes d’Article 1 peuvent intervenir à tout moment. Des temps collectifs sont proposés dans les antennes de l’association.

Qui sont les mentors et les mentorés qui vont s’inscrire sur la plateforme ?

Boris Walbaum : Les mentors sont des professionnels de tous les secteurs d’activité, engagés et bienveillants, sans certification particulière mais motivés pour partager leurs connaissances avec un étudiant. Les mentorés sont des étudiants issus en priorité des milieux populaires, qui ont entre 18 et 25 ans et ont besoin d’un coup de main pour leurs études et/ou leur insertion professionnelle.

Quelle expérience personnelle ou professionnelle vous a poussés à vous engager dans le développement du mentorat ?

B. W. : J’ai travaillé dans de grands groupes de consulting. Mes collègues français étaient davantage en relation avec leurs homologues à New York qu’avec leurs voisins ! La France n’a pas la culture du mentorat. Dans les pays anglo-saxons, on offre son aide et des opportunités plus facilement. Car tout le monde peut aider quelqu’un. Aujourd’hui, il convient de progresser dans ce domaine. Le mentorat est un concept très simple : c’est une relation entre deux personnes. De plus, c’est une solution universelle, destinée à tous, salariés, étudiants, lycéens, écoliers… Aider les autres, expliquer ce que l’on sait ou ce que l’on a compris peut se faire à tout âge. Nous sommes face à un enjeu culturel majeur. Cela fait trois ans que nous cherchons à convaincre le gouvernement. Nous avons enfin été entendus. L’État a compris qu’il n’était pas capable de régler l’égalité des chances seul. D’où la création de la plateforme pour s’inscrire et se mettre en relation. Nous activons nos communautés, nous communiquons énormément auprès des DRH. Le mentorat est passé des directions RSE aux DRH. Le sujet est désormais inscrit dans les agendas des exécutifs des entreprises.

B. B. : Mon fils de 18 ans a étudié à distance pendant toute sa terminale. Il m’a confié que l’année avait été difficile pour lui et toute sa génération, en particulier en raison de la solitude et de la difficulté à socialiser, même avec les réseaux sociaux. Comment fait-on pour se confronter aux autres ? Comment imaginer un métier plus tard ? Outre la pandémie, les jeunes sont accablés par les fractures sociales, la montée des extrêmes, l’urgence climatique. Les trois quarts des 18-25 ans pensent que leur avenir est effrayant. Mon fils sait qu’il ne fait pas partie des plus mal lotis. Mais comment font ceux qui n’ont pas de réseau, ceux qui manquent de confiance, ceux dont les parents n’ont pas d’argent, ceux qui sont assignés à une couleur de peau, à un genre ? Je n’ai pas toutes les réponses mais je pense que c’est le moment d’aider cette jeunesse. Il y a une génération Covid, créons une génération mentors-mentorés ! Les jeunes ont besoin de conseils pour organiser leurs cours, pour réfléchir à leur orientation, de même que d’entretiens pratiques pour décrocher un job… J’ai la conviction que c’est possible. Je soutiens le proverbe africain selon lequel « il faut tout un village pour élever un enfant ». Il n’y a pas que le cadre familial qui importe. Les rencontres sont la clé. Elles peuvent changer les vies.

Auteur

  • Irène Lopez