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Sur le terrain

Formation : Comment Alenvi redonne envie d’être auxiliaire de vie

Sur le terrain | publié le : 25.05.2020 | Lys Zohin

Créée en 2016, Alenvi remet de l’humain dans la relation entre les auxiliaires de vie et les personnes âgées. Autonomie, émancipation, relationnel et gestion des émotions sont au programme de sa formation. Pour ses salariés et d’autres, dans un secteur crucial pour la société, comme l’a prouvé la crise sanitaire.

Remis par Myriam El Khomri en octobre dernier, le rapport sur le grand âge est clair. Avec près d’un milliard d’euros d’investissement prévu par an, pour accompagner quelque deux millions de personnes dépendantes en 2040, il souligne comme une évidence sociétale la nécessité d’en revaloriser les métiers. D’autant que le taux de pauvreté des salariés du secteur est trois fois supérieur à la moyenne et que son image est largement dégradée. Au point que 7 % des postes sont actuellement non pourvus.

« Au-delà de la simple production de services, il faut repenser les métiers de l’accompagnement dans leur dimension humaine. Il ne s’agit pas de se contenter de maintenir à domicile des personnes âgées, il faut les accompagner dans leur projet de vie », relève Guillaume Desnoës, qui a fondé Alenvi en 2016, avec Clément Saint Olive et Thibault de Saint Blancard, précisément dans ce but. La crise du Covid-19 est venue souligner cette nécessité.

« Le travail des 500 000 auxiliaires de vie actuels est souvent précaire, à temps partiel subi et infantilisant, dit-il. Et si des investissements sont évidemment nécessaires, de même qu’une meilleure rémunération, il s’agit aussi de faire mieux en termes d’organisation, de formation, de collaboration. »

Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS), Alenvi parie donc sur l’innovation, pour ses 80 salariés auxiliaires de vie et d’autres dans le secteur, de même que pour les encadrants qu’il s’agit de faire passer du rôle de manager à celui de coach, pour une meilleure collaboration des équipes. Alors que les encadrants sont souvent venus dans ce secteur par vocation, leur frustration n’en est que plus grande face à leurs conditions de travail.

L’innovation s’applique à l’organisationnel, les collaborateurs d’Alenvi étant laissés libres de gérer eux-mêmes leur planning et de choisir les candidats qui viendront les rejoindre, par exemple, afin de leur donner une plus grande autonomie. En outre, la gouvernance de l’entreprise est partagée.

Certificat de compétences

Et l’innovation est également intégrée aux formations que la société propose, en interne comme en externe. Les dix heures de présentiel et les quatre heures d’e-learning, par petites séquences de deux heures, en fonction des moments creux, souvent en début de journée, pour les auxiliaires notamment, font la part belle à l’humain, et donnent lieu à l’obtention d’un certificat de compétences. Communication et création du lien avec une personne âgée, empathie et prise de recul, gestion des émotions et capacité d’écoute, connaissance des troubles cognitifs et de comportement, prise en compte des signes d’épuisement et adoption de stratégies pour le prévenir en sont les éléments phares. Et ça marche ! « Par la communication non violente, un auxiliaire a réussi à débloquer une situation tendue avec un aidant familial, par exemple », souligne Guillaume Desnoës. « En regroupant les auxiliaires en formation, les sessions permettent de tisser des liens, alors qu’ils exercent, seuls, leur métier à domicile. Ils sont donc très en demande de contacts. Par ailleurs, s’ils ont bien sûr reçu des formations pratiques, sur la toilette ou la diététique, ces cours n’incluent pas forcément les aspects psychologiques. Or les auxiliaires se retrouvent souvent, malgré eux, au centre d’une histoire familiale. Il leur faut adopter la bonne attitude », remarque pour sa part Alison Herbreteau, formatrice au sein de Compani, la société de formation d’Alenvi. Ces professionnels se sentant davantage reconnus et valorisés – ils ont été rebaptisés « auxiliaires d’envie » par Alenvi – leur taux d’absentéisme se situe en-deçà des 4 %, alors qu’il est, selon le rapport El Khomri, de 8 % à 15 % dans les Ehpad et de 10 % à 20 % pour l’aide à domicile.

Cette année, Alenvi aura formé plus de 1 000 personnes (auxiliaires et encadrants) dans le secteur. Certes, c’est peu au regard du nombre de professionnels du grand âge qui souffrent du manque de reconnaissance et de mal-être au travail, mais c’est un début. Et l’objectif d’Alenvi est plus large que le simple partage de bonnes pratiques. « Nous ne sommes pas une ESUS par hasard, conclut le cofondateur de l’entreprise. Nous nous sommes lancés dans l’entrepreneuriat pour être au service d’une cause – et de la société toute entière. Le projet d’Alenvi est d’humaniser l’accompagnement des personnes âgées à grande échelle et de transformer tout le secteur. »

Auteur

  • Lys Zohin