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Le fait de la semaine

Dialogue social : L’innovation suspendue au sort du CSE

Le fait de la semaine | publié le : 01.07.2019 | Gilmar Sequeira Martins

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Dialogue social : L’innovation suspendue au sort du CSE

Crédit photo Gilmar Sequeira Martins

Alors que les ordonnances de septembre 2017 ont ouvert de nouveaux champs à la négociation collective en entreprise, les accords innovants enregistrent une percée timide, tant les acteurs sociaux semblent encore polarisés sur les moyens à consacrer au CSE.

Le big bang tant annoncé du dialogue social a-t-il eu lieu ? Rien n’est moins sûr, estime Dominique Gillier, membre de l’Observatoire du dialogue social de la Fondation Jean-Jaurès : « Jusqu’à présent, à travers les accords observables, il n’y a pas d’impact significatif ni sur le nombre d’accords signés, ni sur l’innovation. C’est notable alors que les ordonnances ont ouvert beaucoup de nouvelles possibilités d’adaptation et d’innovation au niveau de l’entreprise. » Jean-Dominique Simonpoli, directeur général de l’association Dialogues, en donne des exemples. « S’agissant de la stratégie d’entreprise et la stratégie sociale, il devient possible de les traiter différemment et de les revoir tous les deux ans plutôt qu’annuellement. Il est aussi possible de créer une commission éphémère. » Co-auteur avec Gilles Gateau du rapport sur l’accompagnement de la dynamique des négociations d’entreprises, il souligne que certaines sociétés se sont montrées inventives sur « les outils de mise en œuvre de l’appréciation des compétences » des élus, ont parfois instauré des entretiens avec les représentants syndicaux pour mieux gérer leur parcours professionnel ou encore institué des commissions particulières rattachées au CSE.

Pour autant, les difficultés sont encore bien réelles. De nombreux représentants syndicaux situés dans des PME éloignées des grandes métropoles ont encore peu d’informations sur le nouveau cadre mis en place par les ordonnances. « Cela ne les met pas dans de bonnes conditions pour aborder le CSE et ses nouvelles opportunités », reconnaît Jean-Dominique Simonpoli. La focalisation autour des moyens, réduits en moyenne de 30 %, ne favorise pas non plus le développement du dialogue social, objectif visé par l’exécutif. Pour Jean Grosset, directeur de l’Observatoire du dialogue social de la Fondation Jean-Jaurès, l’équation est simple : « Les entreprises souhaitent obtenir une réduction des moyens dédiés au dialogue social et les syndicalistes veulent l’inverse. » Cet enjeu, qui monopolise souvent les négociations, éclipse les opportunités offertes par la loi et obère le futur, prévient le consultant Jean-Pierre Basilien : « Mobiliser les moyens a minima est un positionnement possible mais si personne n’aborde la question du sens et des objectifs à poursuivre, cela va aboutir à un déséquilibre de la régulation sociale. »

Accompagner les PME/TPE

Cette pente pourrait aussi selon Dominique Gillier « affaiblir, voire tarir, le vivier de candidats » aux élections du personnel. Ce dernier déplore également l’exclusion des suppléants des séances du CSE qui constituait auparavant « une forme d’initiation qui permettait d’assurer un relais ». Regrettant le nombre « anecdotique » d’accords innovants sur la refonte des IRP, Dominique Gillier souligne le besoin d’accompagnement des PME/TPE : « Il existe des dispositifs, par exemple les formations communes avec représentants des employeurs et des salariés, qui doivent être développés, d’autres sont à inventer et il conviendrait d’écouter les propositions des acteurs sociaux qui ne manqueront pas en la matière. »

Il appelle aussi les branches à la rescousse puisqu’elles « peuvent mener des actions auprès [des PME/TPE] pour leur faire percevoir l’intérêt de s’engager dans la voie de la négociation collective et les aider à la mettre en œuvre ». Encore faut-il qu’elles soient « bien structurées, comme la métallurgie ou le bâtiment, qui comptent des PME, et qu’elles aient des moyens humains et une bonne couverture du territoire y compris paritairement ».

Mal engagé, le renforcement attendu de la négociation collective au niveau de l’entreprise est-il pour autant un objectif inatteignable ? Jean Grosset rappelle le rôle clé du facteur humain : « Tout dépendra de l’attitude des acteurs en présence. S’il y a une attitude de respect envers l’autre, une diffusion et un partage d’informations loyaux et une volonté d’aboutissement, les choses peuvent évoluer de façon positive. Mais certains syndicats sont dans une attitude de refus de compromis avec l’employeur. Si ce sont les employeurs qui refusent de négocier, alors tout le monde sera perdant. » La balle est bien dans le camp des partenaires sociaux.

Auteur

  • Gilmar Sequeira Martins