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Patronat : L’Opco des services de proximité déchire la CPME et l’U2P

L’actualité | publié le : 14.01.2019 | Benjamin D’Alguerre

L’U2P et la CPME ont chacune transmis une demande d’agrément au ministère du Travail en vue de la constitution de l’Opco des services de proximité. Les deux organisations n’ont pas pu se mettre d’accord sur une gouvernance commune… mais la rue de Grenelle pourrait les y forcer.

Entre la CPME et l’U2P, la guerre est déclarée autour de la constitution de l’Opco des services de proximité. Faute d’avoir pu s’entendre sur un partage équitable de la gouvernance du dixième opérateur de compétences recensé par le rapport Marx-Bagorski, les deux organisations patronales ont, chacune de leur côté, déposé une demande d’agrément en fin d’année 2018 auprès du ministère du Travail. La première pour fonder cet Opco à partir d’Agefos PME, l’Opca interprofessionnel de la Confédération des PME ; la seconde pour le développer autour d’Actalians, l’organisme paritaire collecteur agréé des professions libérales. Dans cette course à l’agrément, l’U2P est partie avec une longueur d’avance puisqu’elle, contrairement à sa rivale, se présente porteuse d’un accord constitutif signé avec trois syndicats (FO, CFTC et CFE-CGC) alors que la CPME ne peut se prémunir que d’un projet de texte « ouvert à la signature » et du discret soutien de la CGT et de la CFDT qui ne l’ont cependant pas paraphé. Il faut dire que du côté des artisans, les grandes manœuvres avaient débuté très tôt avec un premier accord, signé le 13 juillet 2018, visant à transformer Actalians en organisme préfigurateur de l’Opco à venir (Opco PEPS).

Trois rencontres entre les deux organisations d’employeurs ne leur auront pas permis de déboucher sur un Yalta de la gouvernance de l’Opco de l’économie de proximité. « La CPME souhaitait assurer 50 % de la gestion, à égalité avec l’U2P. Mais pour nous, ce n’était pas acceptable au vu de notre poids réel dans l’opérateur de compétences. La CPME n’ayant pas voulu revoir ses demandes à la baisse, la négociation s’est achevée sur une impasse », résume Alain Griset, président de l’Union des artisans.

« Il nous semblait d’autant plus naturel de demander un partage équitable des responsabilités que l’U2P et la CPME ne seront pas les seules organisations patronales présentes au CA puisque la gouvernance s’ouvrait autant aux confédérations qu’aux fédérations patronales représentant les branches adhérentes », regrette Céline Schwebel, présidente d’Agefos PME. « Si l’U2P a refusé la proposition de la CPME de créer l’Opco à partir d’Agefos, c’est aussi parce qu’elle sait que les réseaux régionaux de ce dernier ont souvent servi de porte d’entrée pour faire adhérer les entreprises à la CPME. Elle craint de se faire dépouiller de ses adhérents… », décrypte un connaisseur du dossier.

Maison commune ?

Sur le papier, cependant, la proposition de la Confédération des PME pourrait séduire le ministère du Travail puisque son projet d’accord de désignation a reçu le soutien de 31 branches « pesant » quelque 253 000 entreprises. En face, l’U2P n’aligne « que » 22 branches (soit environ 200 000 entreprises) sur un secteur de l’économie de proximité qui pourrait en rassembler jusqu’à 45.

Problème : le « projet Agefos » fait davantage figure de patchwork « interprofessionnel résiduel » que d’organisation à périmètre cohérent puisque parmi ceux ayant annoncé leur ralliement figurent aussi bien des groupes comme La Poste que des branches (enseignement privé hors contrat, assainissement-désinfection…) dont le lien avec l’économie de proximité ne saute pas aux yeux.

À l’inverse, le projet « Opco PEPS » peut se targuer de l’adhésion de la plupart des branches des professions libérales et de l’artisanat, dont la Capeb (bâtiment) qui avait un temps hésité à rejoindre l’opérateur de compétences de la construction.

Toutefois, le ministère du Travail a toujours été clair : il n’existera qu’un seul Opco par périmètre. De quoi promettre des séances de lobbying intensif de la part de chacune des organisations concernées rue de Grenelle ces prochaines semaines puisqu’en dernier ressort, c’est le ministère qui détient le Graal de l’agrément final.

Dans cette hypothèse, le scénario d’un « mariage forcé » par les services de Muriel Pénicaud n’est donc pas à exclure. « Il y aura des arbitrages, des claquements de portes, des postures politiques… mais l’affaire finira fatalement par la création d’une « maison commune » dans laquelle U2P et CPME seront contraintes de siéger ensemble, à égalité. Ça ne peut pas finir autrement ! », analyse un observateur du monde social. Pas dit cependant qu’une telle solution de compromis satisfasse les intéressés. À suivre, donc.

Auteur

  • Benjamin D’Alguerre