logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Sur le terrain

Emploi : Le temps partagé fait sespreuves en Alsace

Sur le terrain | publié le : 11.06.2018 | Mathieu Noyer

L’association Gebosse organise le recours simultané à une même personne par plusieurs entreprises, de façon à ne pas en faire un cheval de Troie de l’intérim ou du salariat au rabais.

Le temps partagé a trouvé en Alsace l’un de ses fiefs. Et l’un de ses tremplins vers l’embauche classique. « Sur les trois dernières années, 85 % des salariés sortent de notre dispositif pour être recrutés à temps plein, par l’une des entreprises qui faisait appel à eux », souligne Séverine Chilkowy, directrice de Gebosse. Cette association à statut de groupement d’employeurs porte le temps partagé dans la région. La statistique vient la conforter dans sa conviction que le temps partagé n’est pas un avatar du travail temporaire.

Gebosse a, il est vrai, bien balisé le terrain pour éviter qu’il en soit ainsi. L’entreprise qui recourt au temps partagé par son intermédiaire s’engage à faire travailler la personne pendant au moins 24 mois. « Elle adhère à une philosophie de solidarité : si elle constate que la personne fait l’affaire, il n’est pas question qu’elle l’embauche en exclusif au bout de quelques mois, en se disant : tant pis pour les autres. Mais nous ne rencontrons pas de difficultés, car les entreprises ont pris l’habitude de la mutualisation. Le temps partagé en constitue en somme une déclinaison dans les ressources humaines », poursuit la responsable de Gebosse.

Recrutement en CDI

Initiée et répandue dans le monde agricole, la formule a gagné tous les secteurs d’activité en Alsace. En échange de l’engagement de durée, les entreprises trouvent la souplesse… et l’exonération des lourdeurs administratives d’un recrutement en direct. Gebosse est en effet le recruteur puis l’employeur, en CDI, qui établit et signe le contrat de travail et prend en charge les éléments induits comme la prévoyance.

Le temps partagé n’est pas synonyme de travail à bas coût. La personne est employée au taux horaire respectif de chacune des entreprises d’accueil – Gebosse fait mouliner les calculettes derrière pour établir la fiche de paie – et elle accède aux prestations annexes éventuelles (avantages CE, tickets restaurant…) de même qu’au prorata de 13e mois quand il est en vigueur. L’épargne salariale est par contre exclue. La rémunération, dans tous les cas, atteint au moins le minima de la convention collective à laquelle Gebosse s’est affiliée, celle des commerces de gros.

Que représente Gebosse en quantité ? À un instant t, le groupement emploie 35 à 40 personnes, chiffre stable depuis quelques années, réparties dans une centaine d’entreprises. Ce second chiffre progresse, signe peut-être d’une reprise économique, mais aussi effet plus « mécanique » de l’ouverture récente de Gebosse vers les professions libérales (avocats, experts-comptables, cabinets médicaux…). Le spectre des entreprises bénéficiaires reste toutefois large, il va jusqu’à des établissements de 300 ou 400 salariés.

Fonctions transversales

Les cadres représentent un tiers du personnel employé. En toute logique, les fonctions transversales sont les plus concernées : secrétariat, comptabilité, supervision administrative et financière, communication, marketing, contrôle qualité-environnement-sécurité, maintenance… En moyenne, le travailleur à temps partagé se répartit entre deux entreprises la même semaine, voire trois. Les compétences les plus pointues se partagent jusqu’à quatre ou cinq entreprises, mais alors sur un mois.

Pour chaque salarié, l’addition donne en général un temps plein. « La phase la plus difficile reste le montage du projet au départ », selon Séverine Chilkowy, à savoir « le double recrutement d’une part des entreprises et d’autre part d’actifs qui soient prêts dans leur tête à cette mobilité qui est avant tout intellectuelle » – le groupement trouve en général des entreprises d’accueil à moins d’une demi-heure de leur domicile.

En lien avec cette problématique, Gebosse a ajouté à sa palette, depuis cette année, une offre de conseil RH qui l’engage sur une voie étroite si elle ne veut pas empiéter le domaine des consultants. Ce nouveau service aide les salariés dans la rédaction de leur CV ou dans leurs démarches de reconversion professionnelles, à travers des ateliers de mise en situation. Aux entreprises, il offre une aide au processus de recrutement. La responsable de Gebosse le décrit comme le fait d’apprendre à « prendre le temps de définir un profil, sans se précipiter, afin de se donner les meilleures chances de recevoir un maximum de candidatures appropriées ».

Auteur

  • Mathieu Noyer