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Sur le terrain

Mécénat de compétences : Table ouverte à la Cantine numérique pour les exilés

Sur le terrain | publié le : 28.05.2018 | Dominique Perez

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Mécénat de compétences : Table ouverte à la Cantine numérique pour les exilés

Crédit photo Dominique Perez

Comment des entreprises peuvent-elles participer à l’intégration d’exilés sur un territoire ? À Nantes, des fleurons de l’écosystème numérique leur ouvrent leurs portes. En lançant un appel à la solidarité…

Novembre 2016 : la Cantine numérique, sorte de symbole du succès des start-up de la métropole nantaise, est en flamme. Les entreprises se retrouvent du jour au lendemain sans local. Immédiatement, l’appel alors lancé à la solidarité porte ses fruits. Entreprises et institutions se mobilisent pour héberger provisoirement les sociétés et indépendants, en attendant une réinstallation dans de nouveaux locaux.

Mars 2018 : 110 exilés hébergés dans un bâtiment de l’université de Nantes, « réquisitionné » par des étudiants, sont évacués et se retrouvent dans la rue. Le sang de Simon Robic, product manager et associé d’iAdvize, plate-forme de marketing conversationnel, l’une des figures du monde numérique nantais, qui s’était fortement mobilisé pour la Cantine, ne fait qu’un tour. « J’ai lu cette nouvelle dans la presse et ai ressenti une grande émotion. Je me suis dit que l’écosystème de Nantes, capable parfois de faire preuve de solidarité, pouvait également se mobiliser. Je ne suis pourtant pas, à la base, un militant de la cause des exilés, c’est un sujet que je ne maîtrisais pas. »

Sur son compte Facebook, il poste un appel sans ambiguïté : pourquoi ne pas faire preuve de la même solidarité auprès de personnes qui se retrouvent sans rien, en leur offrant un hébergement dans des locaux inoccupés ? « La première idée qui m’était venue était celle-ci, pour faire face à l’urgence. J’ai reçu de nombreux retours, mais plutôt en privé, disant que je m’attaquais à un gros sujet, mais que si j’initiais quelque chose, des start-up étaient prêtes à me suivre. Parmi les messages, celui de la Prépa solidaire, qui réunit plusieurs associations d’aide aux exilés et souhaite notamment sensibiliser les entreprises à leur situation. »

La rencontre se fait, et il emmène dans son sillage Adrien Pogetti, directeur de la Cantine numérique. Plus que sur l’hébergement, dont plusieurs associations ou collectifs se préoccupent déjà, il est décidé d’axer les actions sur les domaines d’expertise des entreprises, en travaillant sur des parcours d’intégration d’exilés adultes, quel que soit leur statut actuel. Un premier atelier CV organisé à la Cantine numérique avec une dizaine d’exilés leur permet de découvrir « des parcours souvent riches, avec de multiples expériences qui peuvent être utiles aux employeurs. Nous avons compris qu’il y avait des blocages pour leur formation ou emploi avec la préfecture, que des freins étaient mis à des conventions de stages, nous pensons que nous pouvons avoir un poids pour débloquer des situations. Nous avons souvent une vision de l’exil assez déshumanisée, abstraite. Quand on discute avec eux, en face-à-face, on mesure la complexité de leur chemin, et leur motivation pour s’intégrer ».

« Mieux vaut demander pardon que demander la permission »

Un site internet, Start-up et exilés*, lancé à la mi-mai, propose trois types d’actions, permettant progressivement d’apprendre à connaître les situations et d’aider concrètement à l’élaboration d’un parcours, en plusieurs étapes : une aide de quelques heures sur une candidature et un entretien, des demi-journées d’accueil pour participer à un projet dans l’entreprise, à la proposition d’un stage court ou de longue durée… le choix est ouvert, et les propositions commencent à se faire jour. « Ce type de projet parle à une génération qui souhaite s’engager, à des personnes qui adorent leur boulot mais sont en recherche de sens. De nombreuses entreprises sur ce territoire sont déjà engagées dans d’autres actions. » Considérer l’aspect humain avant les éventuels obstacles juridiques, et contribuer même à les lever, est la base de ce projet. « De toute façon, commencer par une aide ponctuelle est peu engageant. Et je compte sur la devise des start-up : « mieux vaut demander pardon que demander la permission ». » Bref, oser dans tous les cas, fortes de leurs poids vis-à-vis du monde économique et des institutions.

* https://exiles.startupsnantes.com/

Auteur

  • Dominique Perez