En pleine application de la RGPD en entreprise, voici un essai très pertinent sur les enjeux politiques et éthiques des données, dans une société en pleine révolution numérique. Les auteurs, deux avocats spécialisés dans les big data, retracent l’histoire des données, questionnant les enjeux sociétaux et les contre-pouvoirs démocratiques face à l’hégémonie des « Gafa ». Marketing intrusif, croyance aveugle dans les statistiques, l’analyse est à la fois glaçante et subtile. Les auteurs interrogent la question clé d’un cadre législatif adéquat, et décryptent bien les avancées et les limites de la réglementation européenne : s’ils jugent utiles « les codes de bonne conduite et les démarches de certification des données » dans les entreprises, ils soulignent la difficulté de contrôler « a posteriori » des données opaques et mouvantes. Comment s’assurer que le traçage ne vire pas à l’arbitraire, dans l’accès à l’emploi notamment ? La question se pose selon eux car, en raison des proxys, « éliminer des algorithmes les données sensibles comme l’origine, le sexe, l’âge ou les revenus n’éliminera pas pour autant les risques de discrimination indirecte ». Emploi, santé, justice prédictive : l’essai brasse large. Mais il regorge d’idées intéressantes, posant les jalons d’une gouvernance éthique pluridisciplinaire au niveau des États ou locale, par branches d’activité. Inspirant.