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Sur le terrain

Question de droit : Liberté d’expression et licenciement

Sur le terrain | publié le : 07.05.2018 | Laurent Beljean

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Question de droit : Liberté d’expression et licenciement

Crédit photo Laurent Beljean

Noter son employeur sur un site Internet est-il fautif ?

Un directeur artistique au sein d’une société de communication, avait publié sur un site Internet de notation des entreprises accessible au public des commentaires sur son employeur. À cette occasion, le salarié s’était épanché sur l’ambiance de travail et la politique managériale pratiquée. L’intéressé indiquait également que son employeur ne rémunérait pas les heures supplémentaires, sauf celles effectuées les dimanches, et entretenait un turnover incessant.

Apprenant la publication par l’intermédiaire d’un de ses clients, l’entreprise de communication enjoignait très rapidement au site Internet, qui obtempérait, de retirer ce témoignage. L’entreprise cherchait l’auteur de cette publication et convoquait le directeur artistique à un entretien préalable avant de le licencier pour faute grave.

Contestant la mesure prise à son encontre, le salarié saisissait la juridiction prud’homale afin de faire juger que son licenciement ne reposait sur aucun motif réel ou sérieux, et obtenir un rappel de salaire pour heures supplémentaires impayées.

L’intéressé indiquait notamment que ces propos n’excédaient pas la mesure. Les juges du fond faisaient d’ailleurs partiellement droit à la demande du salarié, condamnant notamment son employeur à lui régler une partie des salaires réclamés, mais considéraient qu’il avait outrepassé sa liberté d’expression et confirmaient son licenciement pour faute grave.

À raison, selon la Cour de cassation, qui dans un arrêt du 11 avril 2018, a considéré que le message élaboré par le salarié, dont les termes étaient déloyaux et malveillants à l’égard de son employeur, et publié sur un site accessible à tout public, présentait un caractère excessif et abusif.

De même, les Hauts magistrats ont considéré qu’en agissant promptement, l’employeur avait démontré l’importance de la faute, et l’impossibilité de maintenir le salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée à son préavis.

Il est notable de constater qu’une partie au moins des propos tenus par l’intéressé, même si jugés excessifs, n’en était pas moins réelle puisque l’employeur a été condamné à verser un rappel de salaire pour heures supplémentaires.

En réalité, la Cour de cassation renvoie aux juges du fond le soin d’apprécier souverainement la matérialité des faits reprochés ainsi que leur importance. Il n’est pas certain qu’une solution identique aurait été adoptée si le site Internet en question n’avait pas retiré la publication litigieuse.

Auteur

  • Laurent Beljean