Les idées innovantes sont les bienvenues. Depuis 2015, Bouygues immobilier développe une politique d’intrapreneuriat qui lui permet de « faire remonter les initiatives du terrain », explique Jean-François Schoonheere, directeur de l’expérience collaborateur. Une démarche dans laquelle la direction générale et la présidence sont très impliquées. Car qui, mieux que les salariés au contact quotidien avec les clients, peuvent comprendre leurs besoins et proposer de nouveaux produits ou services ? L’entreprise, qui a placé l’innovation au cœur de sa stratégie et emploie 80 % de cadres, entend ainsi « libérer les énergies et mobiliser l’intelligence collective au service du client ». Cette démarche « empowerment », ou d’autonomisation, est aussi une façon de « faire évoluer la culture de l’entreprise » afin d’« embrasser les ruptures technologiques et créer directement de l’innovation », affirme Jean-François Schoonheere.

Une fois par an, Bouygues immobilier lance un appel à projets auprès de ses salariés via le challenge Digital Makers, puis accompagne les porteurs des projets qui ont été retenus. Pendant six mois, les lauréats sont dégagés de leurs tâches quotidiennes afin de se consacrer pleinement à la réalisation de leurs travaux, coachés par l’équipe Innovation qui leur apporte une aide méthodologique, et soutenus financièrement par l’entreprise. Ce programme leur permet de « découvrir leurs talents, développer leur leadership, et expérimenter leur concept », précise Jean-François Schoonheere. Un timing volontairement serré, l’idée étant d’« aller à l’essentiel, de créer un prototype viable et voir si cela marche, comme le font beaucoup de start-up », précise Christian Grellier, le directeur de l’innovation.

Une dizaine d’initiatives est accompagnée chaque année. Parmi lesquelles, « cinq ou six aboutissent à la création d’une nouvelle offre ou d’un nouveau service, ou permettent d’améliorer les process internes », se félicite Christian Grellier. C’est ainsi que, face au développement des Mooc internes, qui progressivement se substituent aux formations en présentiel, un responsable formation a eu l’idée de monter un « studio » dédié à la création des supports au sein de l’entreprise. Jusqu’ici, pour lancer un Mooc, le service RH devait faire appel à une agence qu’il fallait briefer. Le processus était long et coûteux. « Le studio Mooc, aujourd’hui autogéré par le service RH, a été rapidement mis en place en collaboration avec des salariés du service Informatique, dans un délai et un budget réduit », souligne Christian Grellier.

Certaines marques de Bouygues immobilier, comme Owwi, ont également été créées de cette façon. Cette offre de logements modulables, grâce à un système de cloisons amovibles, permettant d’adapter l’habitat aux modes de vie des usagers, a été imaginée par un commercial. Le projet a été soutenu par l’entreprise qui a validé son modèle économique, testé le concept sur des logements en construction, puis a aidé le salarié à créer sa start-up afin de développer l’offre sur l’ensemble du marché, la production de Bouygues n’étant pas suffisante pour assurer seul ce business. Plutôt que de passer à côté d’une bonne idée, l’entreprise a préféré laisser le collaborateur quitter le groupe. Et en faire un partenaire commercial.

Mais le plus bel exemple de projets initiés par des collaborateurs est Nextdoor. Lancé en 2014, cet espace de travail collaboratif, créé pour répondre aux nouvelles attentes des entreprises, doit être déployé dès cette année et d’ici à 2022 à un rythme de 10 à 15 ouvertures par an en Europe, en partenariat avec AccorHotels. Soit 80 espaces au total.

Si le challenge Digital Makers est l’occasion pour les collaborateurs de sortir du rang, voire de développer leur propre business, quid de ceux dont le projet n’a pas abouti ? « Ces profils nous intéressent », insiste le directeur de l’expérience collaborateur en quête de talents « capables d’audace et de sortir du cadre ». Des soft skills très appréciés au sein du groupe et qui seront pris en compte dans leur évolution de carrière.