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Santé au travail : Inaptitude : les étapes à suivre

Le point sur | publié le : 07.05.2018 | Lisiane Fricotté

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Santé au travail : Inaptitude : les étapes à suivre

Crédit photo Lisiane Fricotté

En cas d’inaptitude d’un salarié, le médecin du travail doit rendre un avis contenant des préconisations qui s’imposent à l’employeur pour le reclassement. Le parcours est très « balisé », les RH doivent être particulièrement vigilants en s’assurant de bien respecter la démarche.

Entre 5 % et 10 % des salariés seraient exposés à un risque de perte d’emploi en raison de leur santé ; 95 % de ceux qui sont déclarés inaptes seraient licenciés, selon l’Igas*. Ces situations, généralement complexes, sont souvent à l’origine de contentieux. Aussi le législateur a défini le régime de l’inaptitude : lorsque le médecin du travail constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé par le salarié n’est possible et que son état de santé le nécessite, il peut alors déclarer ce dernier inapte à son poste de travail. C’est donc le médecin du travail qui guide la procédure d’inaptitude et qui oriente sur les possibilités de reclassement. Mais si des irrégularités sont constatées, c’est la responsabilité de l’employeur qui est en jeu. Il est donc essentiel pour celui-ci de s’assurer que toutes les obligations sont remplies.

Constater l’inaptitude : un avis précis

Comme nous l’avons souligné, le rôle du médecin du travail est prépondérant. Des conditions de forme et de fond sont requises. Pour motiver sa décision, il doit réaliser – ou faire réaliser – une étude du poste et une étude des conditions de travail dans l’établissement. Il doit aussi indiquer la date à laquelle la fiche d’entreprise, qui renseigne sur les risques professionnels, a été actualisée, et effectuer un examen médical.

Avec la réforme du suivi médical, certaines visites ne donnent plus lieu à examen médical et ne permettent donc plus de constater l’inaptitude. C’est le cas des visites d’information et de prévention (qui ont remplacé les visites d’embauche) ou des visites périodiques désormais effectuées par des professionnels du service de santé au travail (SST), les infirmiers par exemple, tous les cinq ans maximum (au lieu de deux ans auparavant). Les examens pris en compte sont uniquement ceux faits par le médecin du travail et notamment la visite de reprise obligatoire après un congé de maternité, un arrêt de plus de 30 jours ou une absence pour maladie professionnelle. Il peut s’agir aussi de visites effectuées pour des salariés « à risques », qui bénéficient d’un suivi dit « adapté » ou « renforcé » (tous les trois ans ou quatre ans selon les salariés et les postes). Une demande d’examen par le salarié est aussi possible. Cette consultation médicale doit permettre un échange sur les mesures d’aménagement, d’adaptation ou de mutation de poste ou la nécessité de proposer un changement de poste.

Autre élément essentiel dans la procédure : une concertation doit s’engager. Alors que ce dialogue avait plutôt lieu une fois l’avis rendu, désormais, le médecin du travail doit procéder à un échange avec le salarié et avec l’employeur, par tout moyen. Ces échanges servent à recueillir les remarques ou les souhaits concernant les avis et les propositions que le médecin du travail entend formuler. À cette occasion, le salarié peut, par exemple, exprimer son positionnement, voire son refus, sur tel ou tel poste. Un seul examen est requis, alors qu’auparavant, deux visites étaient en principe exigées. Mais si le médecin estime qu’un second examen est nécessaire pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision, il le réalise dans un délai maximal de 15 jours après le premier examen.

Des médecins du travail ont déjà souligné que « le délai de 15 jours maximum prévu avant une seconde visite de reprise… ne permet pas d’organiser dans de bonnes conditions une étude du poste en lien avec l’employeur et le salarié, surtout si cette étude est confiée à un ergonome membre de l’équipe interdisciplinaire » (Igas*).

Une recherche de reclassement

L’avis d’inaptitude est éclairé par les conclusions écrites, assorties d’indications du médecin, utiles pour le reclassement. Il formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation lui permettant d’occuper un poste adapté. Ce levier formation devrait être utilisé tout au long du parcours professionnel. Un « préjudice d’employabilité » a pu être reconnu à des salariés reconnus inaptes qui avaient eu accès à peu de formations durant leur carrière, ce qui avait conduit à réduire leurs chances de reclassement. Sauf à contester devant le conseil des prud’hommes les éléments de l’avis, dans les 15 jours, l’employeur doit se conformer aux propositions du médecin du travail. Avant de transmettre une proposition au salarié, il prend l’avis du comité social et économique (qui remplace les délégués du personnel). En activant différents leviers, une adaptation peut être réussie. Par exemple, pour un ouvrier qui doit réduire les gestes effectués avec le poignet droit selon les préconisations du médecin du travail, un aménagement de poste a été rendu possible par le biais de l’installation d’un enrouleur ou robinet d’incendie armé (RIA) pour lui éviter de dérouler plusieurs tuyaux et la création de passerelles de sécurité (escaliers) pour lui permettre un meilleur accès à certaines machines (source : cabinet Jeantet).

Recherches de reclassement

Une précision importante a été apportée : l’employeur n’est plus tenu d’étendre ses recherches au niveau international. Les recherches sont cantonnées au périmètre national. Par exception et uniquement dans ce cas, si le médecin du travail a mentionné que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l’employeur est dispensé de recherche de reclassement et peut rompre directement le contrat. Sinon, l’employeur devra invoquer l’impossibilité de reclassement caractérisée (par exemple, pas de postes disponibles adaptés aux capacités du salarié) ou le cas de refus du poste par le salarié, pour le licencier.

* La prévention de la désinsertion professionnelle des salariés malades ou handicapés, décembre 2017.

Auteur

  • Lisiane Fricotté