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Le fait de la semaine

Numérique : L’intelligence artificielle au service de l’entreprise

Le fait de la semaine | publié le : 09.04.2018 | Lys Zohin

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Numérique : L’intelligence artificielle au service de l’entreprise

Crédit photo Lys Zohin

Chabots pour la relation clients, véhicules autonomes pour les livraisons, assistants aux multiples fonctions : l’intelligence artificielle promet une révolution dans le fonctionnement des organisations. Charge à elles de l’anticiper et d’y préparer les collaborateurs.

La fin du travail ? Le règne des robots, qui, grâce à l’intelligence artificielle (IA), se substitueront aux humains, en apprenant toujours plus, toujours mieux ? Pas si vite ! À l’image d’autres révolutions technologiques, celle de l’IA ne sera pas forcément linéaire, soudaine, brutale. Mais comme les autres, elle est de nature à entraîner des « déplacements » massifs d’emplois. Remplacés par des robots, des ouvriers sur une chaîne de montage, par exemple, voient leur poste disparaître, tandis qu’un autre, celui de programmeur ou de gestionnaire du robot, apparaît. Dès lors, pour les entreprises et la fonction RH, tout l’enjeu est de pouvoir identifier les éventuels changements qui se feront jour grâce à l’IA, puis d’anticiper, sous forme de formation notamment, l’impact qu’ils pourraient avoir sur la nature et l’organisation du travail, les parcours professionnels et le bien-être général des collaborateurs.

Nombre d’entre elles ont déjà lancé une réflexion stratégique sur ces questions. Le rapport de Cédric Villani, remis le 28 mars dernier au président Macron, pourrait leur donner des pistes supplémentaires. Dans un contexte d’avènement de l’IA dans les entreprises, ce document envisage en tout cas que « l’amélioration des conditions de travail est une hypothèse tout aussi crédible que l’aliénation et l’intensification du travail. Tout dépend de la manière dont les gains de productivité permis par l’IA sont partagés ou des choix opérés dans l’organisation des tâches et des équipes ». Les sociétés qui embrasseront l’intelligence artificielle sont donc prévenues…

Répartition des tâches

Le rapport Villani se concentre sur trois grands secteurs : la santé, la banque, les transports. Les changements induits par l’adoption de l’IA pourraient être les plus spectaculaires dans le domaine de la santé, avec la banalisation de robots chirurgicaux ou de l’interprétation des radios et des électrocardiogrammes par une machine intelligente. L’aide au diagnostic, à la prescription de médicaments ou au suivi des patients à distance fait aussi partie des possibilités, voire, déjà, des réalités. De quoi « changer profondément la donne, prédit le rapport, en particulier dans la répartition des tâches entre professions de santé ».

Quant au secteur bancaire, « hors scénario de développement rapide de nouveaux acteurs très innovants, qui ne s’est pas matérialisé jusqu’ici, l’intégration de l’IA devrait avoir un impact significatif sur la pratique professionnelle des conseillers commerciaux, et accentuer la tendance à la réduction de leur nombre en agences, mais sans rupture majeure », prophétise le rapport.

Les transports, enfin. Ce domaine est peut-être le plus exposé, du fait de l’essor envisagé, malgré certains problèmes récents, des véhicules autonomes. Par ailleurs, dans un secteur en tension comme celui du transport de marchandises, l’enjeu est là aussi d’importance, même si l’idée de voir des semi-remorques circuler de façon totalement autonome sur les autoroutes, et avec elle, l’obsolescence programmée des chauffeurs routiers, relève encore de la science-fiction. Seules les livraisons proches sont pour l’instant concernées.

Retrouver du sens

Toujours est-il que le rapport Villani identifie trois axes pour relever les défis posés aux entreprises. Il s’agit d’abord de « conduire, à l’échelle de la branche ou de la filière, des travaux de prospective sur le potentiel de l’IA, pour assurer un bon niveau d’information et d’anticipation des acteurs ». Puis, une fois le diagnostic posé, les entreprises, en fonction de leur profil, devront s’assurer que la formation joue à plein. Il leur faudra, selon les cas, « produire des spécialistes hautement qualifiés pour générer des outils à base d’IA », ou pour les entreprises utilisatrices, par exemple, « former des experts techniques, juridiques, économiques ou éthiques qui pourront répondre aux questions que pose le recours à des outils à base d’IA », et enfin, nombreuses sont les entreprises qui devront « renforcer des dispositifs de sécurisation des parcours professionnels », avec comme priorité les secteurs qui seront fortement affectés, bien entendu, préconise le rapport Villani.

À cela s’ajoute un dernier point, tout aussi crucial : la question du sens pour les salariés. Car les experts interrogés dans le cadre de l’élaboration du rapport ne sous-estiment pas « le risque d’une perte d’autonomie du salarié, soumis à un contrôle automatisé de plus en plus insidieux, avec les risques psychosociaux associés ». Autant dire que si l’IA peut soulager les salariés en prenant en charge, via des robots ou des logiciels, les tâches les plus ingrates et les plus répétitives, son déploiement pourrait aussi, dans certains cas, non seulement conduire à des destructions d’emplois mais à une destruction de sens, le salarié n’effectuant plus que des tâches très fragmentées… Les services RH et les entreprises dans leur ensemble devront donc redoubler d’efforts pour éviter ce vertige, forcément synonyme d’engagement moindre de la part du collaborateur.

La France va investir 1,5 milliard d’euros

Dans le sillage de la remise du rapport Villani sur l’intelligence artificielle, le président Macron a annoncé un investissement total de 1,5 milliard d’euros d’ici 2022 (prise sur le fonds pour l’innovation de 10 milliards d’euros) pour favoriser son développement en France. Quelque 400 millions seront consacrés à des appels à projet divers, tandis que 100 millions d’euros le seront à l’amorçage de start-up et, enfin, 70 millions vont être confiés à Bpifrance pour que l’institution épaule le développement de sociétés spécialisées dans la deep tech (innovation de rupture).

Par ailleurs, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place, d’ici à 2022, d’un cadre législatif concernant la circulation de voitures autonomes, de même que la création d’un centre de données de santé (émanant des hôpitaux, de l’Assurance maladie, etc.) exploitables par des programmes d’intelligence artificielle.

Autre annonce, enfin, concernant la recherche : le lancement d’un programme national, coordonné par l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) et dans le cadre duquel les chercheurs pourront passer la moitié de leur temps dans une entreprise privée (contre 20 % autorisés actuellement).

Auteur

  • Lys Zohin