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Le fait de la semaine

Entretien : « À l’etranger, l’interet pour les statuts hybrides de l’entreprise ne faiblit pas »

Le fait de la semaine | publié le : 19.02.2018 | Hugo Lattard

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Entretien : « À l’etranger, l’interet pour les statuts hybrides de l’entreprise ne faiblit pas »

Crédit photo Hugo Lattard

Juriste de formation, cofondatrice et associée du cabinet Prophil, Geneviève Ferone Creuzet a conduit une étude sur les réformes de l’objet social de l’entreprise adoptées aux États-Unis, au Canada et en Europe.

Vous avez mené en particulier une étude sur l’existence à l’étranger de statuts étendant l’objet social de l’entreprise. Qu’en est-il ?

Le mouvement a été véritablement lancé aux États-Unis depuis 2010. La demande pour des statuts hybrides permettant de conjuguer lucrativité et mission au service du bien commun a été initiée par les entrepreneurs et les actionnaires eux-mêmes. C’est là que réside le principal intérêt pour ces nouveaux statuts de Benefit Corporation (BC), Social Purpose Corporation (SPC) ou Public Benefit Corporation (PBC) : ce n’est ni la société civile, ni le législateur, qui ont imposé ces statuts. Mais bien les acteurs économiques, qui souhaitaient protéger en droit une mission sociale, environnementale, scientifique ou culturelle. L’inscrire dans le temps long, la protéger à des moments clés – la transmission, l’augmentation de capital – et partager la valeur collective créée avec des parties prenantes identifiées dans la mission. Depuis, différents pays dans le monde ont embrayé ou adapté de nouvelles formes juridiques, notamment le Royaume-Uni qui songe à se rapprocher du modèle américain après avoir lancé en 2003 la Community Interest Corporation (CIC), plus proche de l’économie sociale et solidaire (ESS). Et surtout l’Italie, qui a adopté en 2016 un statut semblable à celui de la PBC, la Società Benefit.

Ces nouveaux statuts reconfigurent-ils la gouvernance de l’entreprise ?

Ces statuts sont une occasion de repenser et de régénérer le fonctionnement des organes de gouvernance, en particulier les liens entre les actionnaires et les dirigeants. Ainsi, la mission leur est opposable. Et ils doivent trouver ensemble, à travers des engagements communs, la meilleure façon de la faire vivre, de créer de la valeur et de la partager avec les parties prenantes bénéficiaires et/ou contributrices. À part les règles posées dans les statuts sur l’opposabilité de la mission, il n’y a aucune figure imposée et chaque entreprise est libre. Contrairement à la responsabilité sociale et environnementale (RSE), qui peine à s’imposer dans les assemblées générales (AG), la mission inscrite dans les statuts est au cœur de la gouvernance.

Quelle ampleur a le phénomène à l’étranger ? Y a-t-il beaucoup d’entreprises concernées ?

Il s’agit d’un mouvement important et l’intérêt pour ces différents statuts qui ont émergé entre 2010 et 2015 ne faiblit pas, notamment pour les entreprises de taille moyenne et les start-up. Globalement, il existe plus de 4 000 entreprises aux États-Unis mais une seule est cotée en bourse, Laureate Education. Il en existe plus de 140 en Italie et le gouvernement britannique a lancé une étude, fin 2016, recensant environ 123 000 entreprises qui ont répondu favorablement à la perspective d’un statut d’entreprise à mission.

Auteur

  • Hugo Lattard