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La force des émotions

Chroniques | publié le : 15.01.2018 |

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La force des émotions

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Meryem le Saget conseil en entreprise

L’entreprise découvre les émotions.

Avant, c’était plutôt réservé à la sphère privée. Dans la vie professionnelle, on restait sérieux, on parlait objectifs, actions, chiffres. Étaient tolérées quelques explosions de colère (venant des chefs), mais en gros, chacun se contenait. Or ce monde-là disparaît.

Les personnes ne veulent plus vivre tronquées

, déposant le matin au vestiaire la moitié d’elles-mêmes (la sensibilité, les ressentis, l’appréhension, l’intuition, les énervements, les joies, la créativité…). Les collaborateurs veulent pouvoir s’exprimer, être pleinement eux-mêmes, parler de ce qui ne va pas comme de ce qui les enthousiasme. Après tout, la vie est faite d’interactions, d’émotions, de partage, non ?

Ouvrir la porte aux émotions

pose bien sûr la question des répercussions sur la vie collective. D’une certaine manière, nous sommes en apprentissage face à cette nouvelle donne ! Il y a ceux qui croient « qu’ils ont bien le droit de s’exprimer » ; en fait, ils saoulent leur entourage avec leurs états d’âme, sans réaliser qu’ils polluent l’atmosphère de travail de toute une équipe. D’autres confondent authenticité avec « je te balance tes quatre vérités à la figure, où et quand je veux ». Comme des enfants qui mangeraient encore avec les doigts, ils n’ont pas encore appris à se socialiser ni à donner des feedbacks circonstanciés et bienveillants.

Émotion rime avec éducation. Comme dans tout nouvel apprentissage, nous avançons par étapes. Les formations de développement personnel se sont largement répandues en entreprise. Communication non violente, connaissance de soi et des autres, écoute et respect des différences, intelligence émotionnelle, capacité à bâtir des consensus solides, mindfulness … Comme pour parler une nouvelle langue, il nous faut acquérir des bases de vocabulaire, de grammaire, et beaucoup pratiquer, à l’intérieur d’un cadre sécurisant.

Engagés dans ce parcours individuel et collectif,

certains plongent dans la bassine et n’en ressortent plus. Transformés en prosélytes, ils parlent facilement de la nouvelle approche qu’ils ont découverte et aimeraient tellement contribuer au bonheur de tous en la généralisant. Hommes ou femmes, ils ont découvert à l’âge adulte leur côté « féminin », sensible, et la puissance des émotions. S’ils le pouvaient, ils ne vous demanderaient pas le matin « bonjour, comment vas-tu ? » mais plutôt « là, maintenant, que ressens-tu ? ». Oui, la passion est parfois extrême…

Plus simplement,

ils sont en train d’explorer leur planète intérieure, et c’est un job à plein temps. C’est le travail de toute une vie d’ailleurs, pour chacun d’entre nous. L’essentiel est de ne pas confondre les balises découvertes au cours du chemin et la destination du voyage. Bref, évitons de nous complaire au camp de base quand l’ascension nous attend.

Que voulons-nous créer dans ce monde,

à quoi voulons-nous contribuer ? Loin d’être un but en soi, la construction de la personne et la maturité émotionnelle constituent le socle d’une aventure collective plus vaste, celle de mieux vivre ensemble sur une planète limitée, peuplée de milliards de personnes douées de sensibilité, d’empathie, de créativité mais aussi des pires égoïsmes. Le défi des entreprises du 21e siècle est peut-être d’ouvrir la voie.