Intéressant et bien documenté, cet ouvrage d’un sociologue met en lumière l’étroite imbrication des facteurs d’inégalités sociales, en France ou dans les pays de l’OCDE : géographie, logement, emploi, discriminations, représentation identitaire… Le livre dresse un panorama des différents facteurs d’inégalités qui, selon Nicolas Duvoux, « se cumulent et se renforcent ». Il estime donc que les politiques de redistribution ou les autres mesures publiques (lutte contre les discriminations liées à l’origine, par exemple), trop ciblées, sont inefficaces pour résoudre ces problèmes multifactoriels, où joue aussi la distance géographique, le « patrimoine culturel transmis par les parents » ou la représentation sociale. Si le constat n’est guère nouveau, cet enchevêtrement des inégalités est bien étudié, même si la problématique du chômage de longue durée, jugée centrale, aurait mérité d’être davantage creusée. Mais le livre a l’intérêt de montrer le nouveau visage des inégalités : le sociologue note ainsi que la polarisation des emplois (entre d’un côté des cadres hautement qualifiés et bien rémunérés et de l’autre des employés peu qualifiés) s’est accentuée en France sous l’effet de la crise de 2008 et des nouvelles technologies, qui suppriment les emplois administratifs. Si notre système de protection sociale reste l’un des efficients en Europe, Nicolas Duvoux pointe du doigt des politiques d’État, devenues « actives » et trop individualistes, renforçant « l’idée que le chômage reste volontaire et résulte d’une faiblesse des personnes dites assistées ». Une logique de responsabilisation de soi qui accentue le sentiment d’exclusion, conclut le sociologue.