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Le fait de la semaine

Branche de l’habillement : Un texte tiré au cordeau

Le fait de la semaine | publié le : 06.11.2017 | Marie-Madeleine Sève

Salaire doublé, repos compensateur, volontariat testé et réversible, planification équitable, avantages divers… Dans son accord, la branche a passé tous les « points durs » au peigne fin et veut créer des emplois. Un modèle du genre applicable depuis le 30 juillet.

L’accord a mis neuf mois pour aboutir, après des négociations marquées, sans surprise, par l’opposition frontale de FO et de la CGT, arc-boutées contre le travail du dimanche. Mais le 4 juillet 2017, l’affaire fut conclue : l’habillement tenait son accord « relatif à la dérogation du repos dominical », signé par la CFDT et la CFTC. C’est la première branche de cette ampleur à franchir le pas sur cet épineux sujet depuis la loi Macron de 2015, car la Fédération des enseignes de l’habillement (FEH) compte plus de 120 sociétés de prêt-à-porter dans l’Hexagone, de Primark et Kiabi, jusqu’à Céline et Giorgo Armani. Pour Claude Boulle, président exécutif de l’Alliance du commerce, dont fait partie la FEH, il s’agissait de laisser d’abord les entreprises négocier en leurs murs avant de s’emparer de la question au niveau sectoriel. « Nous servons de voiture-balai pour celles qui n’y sont pas parvenues. Les plus grandes, pourvues d’un DRH, ont pu discuter avec les élus du personnel, les plus petites avec moins de onze salariés ont pu organiser des référendums, toutefois 60 % de nos adhérents n’étaient couverts par aucun accord. » Or celui-ci est indispensable pour ouvrir le jour du Seigneur dans les zones définies par le législateur. « Nous augmentons la sécurité juridique dans bien des situations, en particulier celle des corners », précise-t-il. Ces boutiques de marques en grands magasins, tenues par les « démonstrateurs » et dont les employeurs n’avaient rien prévu pour le dimanche, étaient en effet vulnérables. Visées par l’accord, elles sont désormais parées. « Selon l’esprit du texte, les enseignes qui ont négocié avant le 4 juillet, gardent leurs particularités même lorsque celles-ci sont moins généreuses que les dispositions de l’accord de branche. En revanche, cet accord collectif s’applique à toutes les autres », explique Antoine Solanet, responsable des affaires sociales de l’Alliance du commerce et de la FEH.

Garantie du volontariat réversible.

Sur le fond, les partenaires sociaux ont considérablement travaillé et creusé les compensations au travail dominical, notamment la garantie du volontariat réversible à bien des égards (Article 1.3). Tout salarié peut se porter volontaire, par écrit, sur une première période de six mois. Au bout de ce laps de temps, il confirme ce choix pour une période d’un an « reconductible tacitement ». En outre, en cas de défection ou d’absence de candidats le dimanche, le document stipule qu’« il peut être fait appel à des salariés d’autres magasins (de la même enseigne, NDLR) du même secteur géographique ». Par ailleurs, si le salarié change d’avis, il peut se rétracter avec un délai de prévenance d’un mois, ramené à quinze jours pour les femmes enceintes. Des conditions identiques pour des indisponibilités ponctuelles (cérémonies, banquets, voyage, etc.). Ces dispositions valent aussi pour les responsables et leurs adjoints en magasin, souligne le texte. Par ailleurs, le nombre de dimanches travaillé est limité à 26, et ils sont planifiés en fonction des besoins. « Soit un week-end sur deux. Ce qui permet d’avoir des dimanches de repos », se félicite la CFDT. Sauf si l’intéressé veut en faire « expressément » davantage. Par ailleurs, la demi-journée de travail dominical ne pourra pas être inférieure à trois heures. « C’était une demande des syndicats afin d’éviter qu’un salarié ne se déplace pour un horaire minime », remarque Antoine Solanet. La journée complète est quant à elle fixée à cinq heures. Les autres contreparties sont assez classiques : doublement du salaire, repos compensateur, avec deux jours de repos consécutifs au moins dix fois par an. Une singularité toutefois : les heures supplémentaires effectuées le dimanche sont tout à la fois récupérées en repos et payées double. On note aussi la prise en charge des gardes d’enfants, les avantages transports et repas conservés. Enfin, point capital, la branche s’engage à maintenir 850 emplois et devrait en créer 500 dans les trois ans en ciblant les publics les plus fragiles, et sur tout type de contrat. Un pari constructif dans un secteur confronté à une kyrielle de fermetures ou cessions.

La branche habillement

Activité : commerce de prêt-à-porter textile. 120 enseignes-succursalistes (ayant au moins 5 magasins), soit 22 000 points de vente.

Effectif : 120 000 salariés (90 % des salariés du secteur).

Chiffre d’affaires 2016 : 20 milliards d’euros.

Auteur

  • Marie-Madeleine Sève