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États-Unis : Les derniers combats de l’EEOC

Sur le terrain | International | publié le : 10.10.2017 | Caroline Crosdale

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États-Unis : Les derniers combats de l’EEOC

Crédit photo Caroline Crosdale

L’agence pour l’égalité des chances en matière d’emploi s’en prend à la discrimination contre les hommes chez Estée Lauder. Un dossier qui n’est sans doute pas du goût du président Donald Trump. Mais les experts qu’il veut installer au cœur de l’agence ne sont pas encore arrivés.

L’agence américaine EEOC (Equal Employment Opportunity Commission) s’est récemment engagée dans une affaire de discrimination contre les hommes. La juriste Mindy Weinstein du bureau de Washington poursuit en justice le géant Estée Lauder pour son traitement inégal des pères de famille. Les nouvelles mères ont en effet droit à 6 semaines de congés payés lors de la naissance d’un enfant. Mais les pères eux doivent se contenter de 2 semaines pour faire connaissance avec le bébé. « La loi fédérale impose une paie égale, y compris pour les avantages annexes, lorsqu’on a accompli le même travail. Et cela s’applique aux hommes aussi bien qu’aux femmes », déclare Mindy Weinstein. L’avocate invoque la loi sur les droits civils de 1964 et la législation sur l’égalité des salaires de 1963. Cette affaire judiciaire, claironnée par l’EEOC, semble étrange dans le nouveau Washington, qui a dû se mettre à l’heure du président Donald Trump. L’actuel maître de la Maison Blanche n’a jamais montré un intérêt particulier pour la lutte contre les discriminations. Bien au contraire. Son gouvernement vient d’annoncer qu’il ne demanderait pas aux entreprises de publier leurs statistiques sur l’écart de salaires entre hommes et femmes, comme le demandait l’administration précédente de Barack Obama.

Donald Trump défend habituellement un agenda probusiness. Il se veut l’ennemi de la réglementation bureaucratique et prône le laisser-faire dans les entreprises. Alors pourquoi s’en prendre à Estée Lauder ?

L’EEOC défend peut-être l’un de ses derniers combats… de la présidence d’avant. Car les nouveaux responsables de l’agence, nommés par Donald Trump, ne sont pas encore arrivés.

En attente De nouveaux responsables

La commission supervisant l’EEOC comprend normalement cinq membres. Deux des postes sont occupés par des démocrates, Charlotte Burrows en poste jusqu’en juillet 2019 et Chai Feldblum dont le mandat s’arrête en 2018. La troisième titulaire, présidente intérimaire de la commission, Victoria Lipnic est certes Républicaine, mais c’est une juriste modérée qui a été nommée par le président Obama et elle restera jusqu’en 2020. Donald Trump a bien l’intention de faire venir deux candidats républicains pour occuper les sièges vacants, mais ils n’ont pas encore été confirmés par le Sénat. Et le poste de conseiller juridique, gestionnaire au quotidien de l’EEOC, n’est lui non plus pas pourvu. La rumeur veut que l’avocate Esther Lander soit en bonne position. Elle a passé plusieurs années au ministère de la justice. Et elle fait partie aujourd’hui du cabinet juridique Akin Gump. Esther Lander défend habituellement les patrons impliqués dans de complexes affaires de discrimination. Elle travaille aussi beaucoup sur des plaintes collectives liées aux salaires et aux horaires. Bref, Esther Lander possède le profil probusiness qu’apprécie le président Donald Trump. Mais elle n’est pas là.

En attendant l’arrivée des nouveaux venus, les piliers de l’EEOC bouclent leurs vieux dossiers. Et l’affaire Estée Lauder a tout ce qu’il faut pour leur plaire. Il y aurait même les ingrédients nécessaires pour séduire le futur conseiller juridique de l’agence. « L’EEOC a déjà adopté les priorités des prochaines années, explique Risa Lieberwitz, professeur de droit du travail de la School of Industrial and Labor Relations de l’université Cornell. L’agence doit respecter un cadre et un certain nombre de contraintes. La discrimination justement est une de ses priorités. » Et de poursuivre : « L’affaire Estée Lauder est un bon cas, car le traitement très différent des pères et des mères semble aisé à prouver ». Et tout à fait gagnable devant la justice.

Le prochain conseiller juridique, désireux de montrer des résultats, pourrait prendre goût au dossier Estée Lauder. Quitte à prendre une orientation plus conservatrice par la suite. Risa Lieberwitz croit ainsi que la future agence ne fera guère de zèle pour lutter contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre. Le sénateur Républicain Lamar Alexander, président du comité travail l’a bien dit. Pour lui, il est temps que l’EEOC « revienne à sa mission de base ».

Dans les médias

WALL STREET JOURNAL L’écart entre salariés noirs et blancs se maintient

L’écart de traitement entre salariés noirs et blancs n’a pas changé en vingt-cinq ans. C’est la conclusion d’une étude menée par les chercheurs de la Northwestern University et Harvard University. Les enquêteurs ont épluché plus de 55 000 CV de faux candidats envoyés entre 1989 et 2015. Les CV affichaient les mêmes diplômes et les mêmes expériences, la seule nuance était le nom, révélant des origines différentes. Conclusion : les Blancs sont 33 % plus souvent invités à un premier entretien d’embauche. Une autre étude de la Federal Reserve Bank of San Francisco montre que l’écart de rémunération se creuse. En 1979, le salarié noir empochait 80 cents de l’heure quand son collègue blanc touchait 1 dollar, aujourd’hui l’homme noir se contente de 70 cents. 3 octobre 2017, Wall Street Journal, le quotidien affiche plus de 2 millions de lecteurs.

Auteur

  • Caroline Crosdale