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Sur le terrain

Retour sur… La collaboration entre France Télévisions et le secteur du travail protégé et adapté (STPA)

Sur le terrain | publié le : 26.09.2017 | Violette Queuniet

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Évolution des achats au STPA (en euros) – direction des achats hors programmes

Crédit photo Violette Queuniet

EN CINQ ANS, le groupe audiovisuel public a quadruplé ses achats auprès du secteur du travail protégé. Le résultat d’une politique volontariste et d’une montée en compétences de la direction des achats.

Objectif : 1,2 million d’euros. C’est le chiffre d’affaires utile, c’est-à-dire celui retenu pour être converti en unités bénéficiaires (1 UB = 1 emploi de travailleur handicapé), fixé par le plan handicap de France Télévisions à l’horizon de 2020.

Alors que le budget total de fonctionnement du groupe s’élève à 2,842 milliards d’euros pour un effectif de 9 931 ETP (équivalent temps plein), le taux d’emploi des travailleurs handicapés atteint 5,07 %, dont 4,54 % en emploi direct et 0,53 % en emploi indirect. La direction des achats hors programmes (dont le budget s’élève à 450 millions d’euros,), qui gère notamment les achats auprès du STPA, devrait atteindre l’objectif sans trop de problèmes. Depuis 2013, elle a en effet impulsé une nouvelle dynamique dans sa politique d’achats. Résultat : le chiffre d’affaires de cette catégorie d’achats a été multiplié par 4,25 (voir le tableau).

Une acheteuse spécialisée dans les achats responsables, Caroline Allier, a été recrutée pour impulser cette politique et faire monter en compétences ses collègues acheteurs et juristes (ils travaillent en binôme), au niveau de la direction comme en région. Un réseau de 40 référents a été créé dans les 13 régions et 9 stations d’outre-mer, qui sont autonomes dans leurs achats à hauteur de 100 000 euros. Ces référents sont des représentants des RH – qui suivent la politique d’emploi direct de travailleurs en situation de handicap – et des correspondants moyens généraux.

Première traduction concrète de cette politique : réserver certaines familles d’achats au STPA. Il s’agit des espaces verts, du recyclage des D3E (déchets d’équipements électriques et électroniques), du recyclage des cassettes vidéo et de l’activité traiteur et plateaux-repas. Le basculement est aujourd’hui effectif à quasiment 100 % dans les trois premiers domaines. C’est plus compliqué pour l’activité traiteur et plateaux-repas qui nécessite une flexibilité horaire (week-ends, soirées électorales…) que n’ont pas toujours les structures du STPA.

La montée en charge des achats en direction du STPA ne s’est pas limitée à ces domaines. « Depuis 2014, nous investiguons d’autres secteurs : le transport de personnes, la communication, l’accueil, la formation. Nous y allons pas à pas. D’abord avec des marchés de moindre envergure permettant de s’assurer de la capacité et de la compétitivité du STPA. La réussite de ces marchés contribue à nous convaincre en interne et permet d’envisager des marchés plus importants et récurrents », explique Caroline Allier, chargée du développement des achats responsables. C’est le cas des marchés impression-routage. Ils ont d’abord concerné le bilan social individualisé, puis les 10 numéros du magazine interne, et à présent les bulletins de paie des presque 10 000 collaborateurs du groupe.

Le recours aux entreprises adaptées s’est étendu à de multiples secteurs : transport de personnes en horaires décalés pour certaines émissions (entreprise Fastroad), stickage et déstickage des véhicules de France TV sur le Tour de France, gestion des mails simples au sein du centre de relations téléspectateurs, etc. Au point que la part du CA dans ces secteurs (540 000 euros) est presque aussi importante que celle des domaines réservés.

Cotraitance

Le principal frein au basculement plus important des achats vers le STPA n’est pas le coût des prestations (aussi compétitif que dans le secteur ordinaire), mais la taille des entreprises (souvent des PME), qui ne permet pas toujours de répondre aux besoins volumineux de France Télévisions. D’où un avantage compétitif pour celles qui répondent aux appels d’offres en cotraitance avec une entreprise du secteur ordinaire.

Pour trouver des prestataires de bon niveau, France Télévisions s’est beaucoup appuyé au départ sur l’expertise de l’association Handeco. « Se faire accompagner par des experts capables de sourcer et qualifier les bons fournisseurs est partie prenante du succès du basculement progressif de nos achats vers le secteur protégé », souligne Caroline Allier. Par ailleurs, France Télévisions est un membre fondateur de Pas à Pas, association d’acheteurs auprès du STPA, qui lui permet de partager des bonnes pratiques entre grands donneurs d’ordre et de faire de la veille sur le marché fournisseurs.

Une clause sociale d’exécution

La direction des achats hors programmes exploite aussi les possibilités données par la loi. Sous le régime des marchés publics, elle a intégré pour certains marchés une « clause sociale d’exécution » qui impose la réalisation d’un certain volume d’heures par des personnes en situation de handicap. Par exemple, l’accueil est assuré par une entreprise ordinaire qui a recours à l’Association des paralysés de France pour la clause sociale d’exécution.

Une autre façon d’augmenter le chiffre d’affaires utile est le recours à l’article 272 de la loi Macron autorisant l’intégration du chiffre d’affaires effectué auprès de travailleurs indépendants en situation de handicap dans la DOETH. C’est le cas de nombreux prestataires de France Télévisions : sténotypistes pour les réunions avec les IRP, maquilleuses, webdesigners, formateurs… Récemment, les membres du comité exécutif de MFP (société de production filiale de France Télévisions) ont été coachés par un indépendant en situation de handicap, avec des retours très positifs. Un exemple, parmi tant d’autres, souligne Caroline Allier, « que le handicap n’empêche pas la compétence ».

Auteur

  • Violette Queuniet